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  • : Le blog des Grande-et-petites-histoires-de-la-thaïlande.over-blog.com
  • : Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.
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  Il était une fois Alain, Bernard …ils prirent leur retraite en Isan, se marièrent avec une Isan, se rencontrèrent, discutèrent, décidèrent un  jour de créer un BLOG, ce blog : alainbernardenthailande.com

Ils voulaient partager, échanger, raconter ce qu’ils avaient appris sur la Thaïlande, son histoire, sa culture, comprendre son « actualité ». Ils n’étaient pas historiens, n’en savaient peut-être pas plus que vous, mais ils voulaient proposer un chemin possible. Ils ont pensé commencer par l’histoire des relations franco-thaïes depuis Louis XIV,et ensuite ils ont proposé leur vision de l'Isan ..........

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6 août 2023 7 06 /08 /août /2023 02:29

 

Les journalistes de la presse locale se font parfois l’écho d’une prise exceptionnelle d’un disciple de Saint Pierre dans nos rivières européennes. Il s’agit le plus souvent d’un silure géant, le plus gros poisson d’eau douce, de plus de deux mètres en général, remis à l’eau après la bataille, nulle maitresse de maison n’ayant dans sa cuisine une marmite d’une taille suffisante pour l’y faire pocher ! Ainsi au mois de juin 2023 en Italie, un animal de « près de trois mètres » a été sorti de l’eau après une bataille homérique. Naturellement, nous ne savons pas de quel fleuve il a été extrait, probablement le Po ni le matériel utilisé par notre heureux pécheur, ils sont toujours discrets sur leurs « coins » et sur leurs procédés. Le poisson n’a par ailleurs pas été pesé. Je remercie Philippe Drillien de m’avoir communiqué le renseignement extrait de la revue Ça m’intéresse.

 

 

Parler de « poisson-chat » même géant est un abus de langage car ces silures, s’ils sont de la famille des siluridés, n’ont rien à voir avec le fort peu intéressant poisson-chat, Ameiurus nebubosus, espèce invasive venue d’Amérique du nord dans des conditions plus ou moins mystérieuses, un fléau pour nos cours d’eau. 

 

 

La présence de ces géants des eaux douces est connue depuis toujours. S’agit-il du même animal dont nous avons déjà parlé et qui faisait l’objet de cérémonies rituelles pour les capturer au filet à certaines époques de l’année ? (1)

 

Nous n’aurons pas le privilège de pouvoir assister à l’une de ces cérémonies ; L’espèce est en danger d'extinction en raison d’une pêche excessive, de la pollution des cours d’eau et des multiples barrages sur le Mékong. Toute prise est interdite en Thaïlande depuis 1992 mais un individu a été capturé dans le nord le 1er mai 2005 bien après l’interdiction ! Près de 2 mois après la prise, une fois qu’il avait été pesé, photographié et débité en darnes, les pêcheurs ont rapporté à la presse qu'il pesait 293 kg pour 2 m 75 de long (très exactement 9 pieds et 646 livres). Les spécialistes n’ont pas eu l’occasion de l’examiner plus en détail. C'est le plus grand poisson capturé depuis la tenue de registres, commencée en 1981, mais aussi le plus grand "poisson-chat" jamais pêché en eau douce.

 

 

Il est actuellement sous la haute protection de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction signée à Washington le 3 mars 1973.

 

Ce n’est pas le cas du silure qui fait la joie des pécheurs européens dits « sportifs », puisqu’il prolifère dans tous nos cours d’eau apparemment sans dommage pour leur équilibre écologique.

 

L’histoire des poissons a fait l’objet d’un ouvrage exhaustif du Baron Cuvier en 22 énormes volumes publiés entre 1828 et 1849 « Histoire naturelle des poissons ». C’est la somme du savoir ichtyologique à cette époque. Le tome XIV est consacré en grande partie aux silures car les plus grands des poissons d’eau douce, fondé soit sur des constatations personnelles soit sur celles des correspondants qu’il avait dans le monde entier.

 

 

Cuvier avait été précédé par Lacépède dont l’ « histoire naturelle des poissons », moins détaillée, date de l’an XI (1802-1803)

Cuvier distingue le silure d’Europe au premier chef puis le silure de daourie (en Sibérie), celui de la Cochinchine, celui du Malabar (aux Indes), le silure wallagoo en Birmanie ou l’on trouve également le silure asote, le silure à deux taches de Java comme le silure Pabo et celui à deux fils, le silure anostome du Bengale, le silure pabda également du Bengale et le silure Oudney que l’on trouve dans le Nil et qui nourrit les soldats de Bonaparte.

 

 

Lacépède signale une espèce en Amérique, ce que ne fait pas Cuvier.

Nous ne trouvons guère de différences entre tous ces silures au vu des belles gravures de Cuvier, sinon leur origine, Europe, Asie et Afrique.  

Gravures de Cuvier :

 

 

Gravure de Lacépède :

 

 

Cuvier et Lacépède s’accordent à attribuer le record de taille à l’espèce qui vit dans la Volga dont on aurait péché des exemplaires de plus de 3 mètres et de 400 kilos ? « Baleine d’eau douce » dit Lacépède ! Tous sont laids et ont une caractéristique commune, une extrême voracité, poissons, petits oiseaux aquatiques ou petits animaux ? Il court de nombreuses légendes sur le fait qu'il n'épargnerait pas l'espèce humaine ? Les plus grands en tous cas ont la gueule assez grande pour qu'on pût y faire entrer facilement un enfant de six ou sept ans. Carnivore assurément, les pécheurs européens l’appâtent avec des vifs, poisson ou grenouille. Mais est-ce bien le même monstre que l’on péchait au filet sur les rives du Mékong et de quelques affluents ? La première description précise que nous en avons est celle de Pavie en 1904 (2).

 

 

Par ses dimensions considérables, souvent plus d’un mètre, autant que par le parti qu'on en tire, ce poisson méritait mérite son attention à un degré particulier. Pavie assortit son texte de plusieurs photographies.

 

 

« Les Laotiens l'appellent Pla-boeuk : ils croient que les femelles seules parcourent le fleuve et s'imaginent que des   mâles, aux écailles dorées, attendent leur arrivée au lac Tali ». Il décrit longuement le rituel de la pèche, n’y revenons pas. Il écrit aussi « la faune  ichthyologique de l'Indo-Chine orientale est encore à établir, particulièrement en ce qui concerne les espèces d'eau douce ». Selon P. Chevey dont l’œuvre ichtyologique est considérable, il n’est pas douteux qu’il s’agit d’un silure mais de quel genre ? Il n’y eut jusqu’en 1931 aucune étude scientifique, aussi curieux  que cela soit.  Arrivé en Indochine, il lui fallut attendre deux ans avant de pouvoir étudier un « exemplaire frais » de 2,50 mètres, indispensable notamment pour l'étude de la dentition, caractère primordial chez les Siluridés que l’on croyait tous carnassiers.  Il put alors en relever sur place les principaux caractères, et constater, à sa grande surprise, que l'animal est absolument dépourvu de dents, aussi bien sur les mâchoires que sur le palais. Cette disposition, tout à fait-anormale pour un Pangasius et même très rare dans l'ensemble de la famille des Siluridés, l'autorisa absolument à créer une section générique spéciale pour ce poisson. Il proposa le nom de Pangasius gigas qu’il porte dorénavant (3). 

 

Notre géant du Mékong est incontestablement herbivore !

 

Il se pose évidemment la question de savoir si les deux espèces peuvent se reproduire entre elles ? Je ne suis pas compétent pour y répondre. Peut-on faire le rapprochement avec l’éléphant, ceux d’Asie  ne peuvent se reproduire avec ceux d’Afrique.

 

D’autres questions restent à cette heure sans réponse tant pour les espèces européennes que pour le géant du Mékong :

 

La longévité ?

 

Probablement plusieurs dizaines d’années ? L’âge d’un poisson se détermine aussi facilement que celui d’un arbre par l’examen de ses ossements mais il y a évidemment un problème majeur, il faut le disséquer et tous les plus grands spécimens sortis de l’onde par nos pécheurs, entre deux et trois mètres, sont remis dans l’eau. L’occasion se présentera peut-être d’un animal qui trépasse une fois amené sur la berge ce qui permettrait alors à des spécialistes d’effectuer l’opération. L’examen  n’a pas pu s’effectuer sur le spécimen sorti du Mékong en 2005.

 

 

Le record

 

Espèce encore mal étudiée, il est donc probable, pensent les spécialistes, qu'il puisse atteindre des proportions supérieures. Compte tenu de la profondeur du fleuve en certains endroits dans les lieux de pêche du Mékong, 60 mètres et de l’existence de cavernes subaquatiques, il est probable que des géants s’y terrent ou se terrent dans les profondeurs. Nul plongeur expérimenté n’est, à notre connaissance, à ce jour allé effectuer des plongées dans le fleuve et ses cavernes. Tous les pêcheurs d’eau douce savent bien que le plus gros spécimen d’une espèce n’est pas celui qu’ils ont attrapé mais celui qui leur a échappé. A ce jour toutefois, aucun spécimen de plus de trois mètres n’a été signalé. Le signalement de silures de la Volga de 400 kilos reste aléatoire.

 

 

L’avenir ?

 

Protégée, l’espèce est à l’abri de ces pèches collectives qui se soldaient souvent par des prises de plusieurs centaines sinon de plusieurs milliers d’individus. Il est vrai qu’il s’agissait alors d’assurer la subsistance de populations déshéritées. Le poisson fait l’objet d’élevages dans la région du nord et du nord-est, reproduction assurée par insémination artificielle.

 

 

Sa chair est savoureuse et il se vend d’ailleurs fort cher. Rien à voir avec le vulgaire poisson chat qui ne présente d’intérêt ni pour la table ni pour la pèche.

 

 

NOTES

 

(1) Voir notre article A 208 - LE RITUEL DE LA PÊCHE AU PLABUK, « LE GÉANT DU MEKONG » DANS LE NORD – EST DE LA THAÏLANDE.

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2016/01/a-208-le-rituel-de-la-peche-au-plabuk-le-geant-du-mekong-dans-le-nord-est-de-la-thailande.html

Voir «  Les techniques rituelles de la pêche du palŏ'm au Laos » par Charles Archaimbault in : Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 49 N°1, 1958. pp. 297-336;

(2) Mission Pavie – Indochine, tome III,  RECHERCHES SUR L'HISTOIRE NATURELLE DE L'INDO-CHINE ORIENTALE)

(3) « SUR UN NOUVEAU SILURE GÉANT DU BASSIN DU MÉKONG PANGASIANODON GIGAS » in Bulletin de la société zoologique de France, 1930. 

 

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