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  • : Le blog des Grande-et-petites-histoires-de-la-thaïlande.over-blog.com
  • : Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.
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  Il était une fois Alain, Bernard …ils prirent leur retraite en Isan, se marièrent avec une Isan, se rencontrèrent, discutèrent, décidèrent un  jour de créer un BLOG, ce blog : alainbernardenthailande.com

Ils voulaient partager, échanger, raconter ce qu’ils avaient appris sur la Thaïlande, son histoire, sa culture, comprendre son « actualité ». Ils n’étaient pas historiens, n’en savaient peut-être pas plus que vous, mais ils voulaient proposer un chemin possible. Ils ont pensé commencer par l’histoire des relations franco-thaïes depuis Louis XIV,et ensuite ils ont proposé leur vision de l'Isan ..........

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6 avril 2024 6 06 /04 /avril /2024 03:23

 

Le nord-est du Siam (Isan), connu par les premiers explorateurs français sous le nom de « Laos siamois » a été très méticuleusement exploré dans des circonstances alors difficiles et plus encore, dans le dernier quart du XIX siècle par le grand explorateur que fut Étienne Aymonier. La seconde partie de son compte rendu publié en 1885 concerne ce « Laos siamois ». Nous y apprenons que toute cette région, depuis l’extrême sud ; le long de la chaîne des Dangrek qui marquait la frontière avec le Cambodge, jusqu’au nord dans la province de Loei, était riche en sel, extrait selon des procédés primitifs qui sont toujours utilisés et alors seule ressource du sous-sol dans une terre ingrate (1).

 

 

Il n'y avait pas le moindre impôt sur cette industrie, unique gagne-pain des villageois qui l’exportaient dans tout le pays. La gabelle fut une imagination française !

 

 

Nous retrouvons ces explications dans une étude universitaire plus récente (2) : « les mines de sel ont vraisemblablement constitué une ressource importante du pays Isan et le sel a fait l‟objet d‟échanges depuis les temps anciens: des salines ont été identifiées dans la vallée de la Nam Moun et près de Phimaï ».

 

Quel en est l’origine géologique ? Probablement de l’existence il y a des millions d’années d’une vaste océan d’eau salée aujourd’hui submergé dont il reste probablement un souvenir, dans la région de Selaphum (เสลภูมิ), dans la province de Roiet (ร้อยเอ็ด) un grand lac salé appelé bungklua (บึงเกลือ – le lac salé). Les habitants des environs l’appellent « la mer de l’Isan » (thalé isan – ทะเลอีสาน).

 

 

Connu initialement pour ses vertus conservatrices avant toute autre,  l’origine de sa découverte est légendaire mais était encore présente dans la tradition locale il y a 10 ans : Les habitants avaient constaté que la chair d’un rhinocéros mort et tombé dans un lac gorgé de sel était parfaitement  conservée. Pourquoi pas ? Une autre légende fait état d’un éléphant blanc qui avait pissé dans une rivière la gorgeant ainsi du sel conservateur  Un éléphant urinant – paraît-il – 100 lires par jour, il y a évidemment de quoi saler un cours d’eau puisqu’il y a du sel  dans nos urines (3).

 

 

Ces vertus sont en tous cas le fruit d’une expérience probablement millénaire ?

 

Les procédés utilisés à ce jour n'ont pas changé.

 

 

 

C’est probablement une explication plus ou moins similaire qui est venue aux oreilles d’Aymonier. Dans la vallée de la grande rivière Mun (แม่น้ำมูล) qui traverse le nord-est avant de se jeter dans le Mékong se trouvent de multiples points d’extraction du sel. Ses eaux sont saumâtres en saison sèche ; « Les Laotiens prétendent que ce nom de Moun vient du sanscrit mûtra (urine), et pour expliquer cette prétendue étymologie, ils ont forgé après coup une histoire quelque peu indécente ».

 

 

Il semble bien que les vertus conservatrices du sel furent découvertes avant que ne soit connue sa nécessité pour l’organisme.  L’expérience a alors démontré qu’il était indispensable à l’organisme en plus d’être fondamental pour la conservation des denrées alimentaires avant – ou après – avoir été découvert comme « exhausteur » de goût, permettant de faire ressortir les saveurs d’un plat, même insipide. Si le sel n’est pas un élément majeur de la cuisine locale, comme le remarque Aymonier, il est souvent (et toujours considéré) comme un médicament dans le nord-est en particulier

 

 

Il est en tous cas considéré comme un don des cieux, des dieux ou des génies.

 

Nous le trouvons déjà dans une légende venue de la nuit des temps (Thangchangphueak -  ทางช้างเผือก) dont nous avons parlé au cœur de laquelle se trouve évidement un éléphant blanc ! (4)

 

 

Ces origines légendaires sont liées à ces cultes qui n’ont peut-être pas totalement disparu dans notre région. Aymonier nous donne l’exemple d’un culte à la divinité ou au génie d’un puits d’eau salé dans un village ont les habitants tirent leur richesse : « Chaque année, les habitants du village offrent à la divinité du puits un canard, un poulet, un porc, une jupe de femme, un habit blanc, une écharpe rouge, un miroir et un peigne. Faute de lui consacrer ces vivres et ces objets féminins, l'eau sourdrait mal. En outre, pendant l'exploitation, ils doivent s'abstenir de salir cette eau, d'y cracher, etc., d'insulter autrui, d'aller eux-mêmes ou d'y conduire des étrangers vêtus de noir ou de rouge. Toute faute de ce genre doit être expiée par une nouvelle offrande d'un canard, deux poulets, cinq bougies, cinq fleurs, cinq baguettes odoriférantes ». C’était certes dans la dernière moitié du XIXe siècle.

 

Charles Archaimbault, autre érudit mais mort au début de ce siècle nous décrit très longuement un culte similaire autour d’un puits d’au salée tout aussi sacré dans un village du moyen-Laos dans une région qui fut autrefois siamoise. Nous sommes en 1956 (5). Le nom du village est parlant, Ban Bo (บ้านบ่อ) c’est le village du puits.

 

 

En dehors de ces considérations où ce qu’Aymonier appelle l’indécence rejoint la légende et des rites venus de bien avant l’époque bouddhiste, nous disposons d’une analyse plus scientifique quoique passionnée, de Bamphen Chairak (บำเพ็ญ ไชยรักษ์ข. Elle est chercheuse au sein d’un groupe d'études écoculturelles.  Son étude en thaï vient d’être publiée eu mois de février 2024  sur le site Isaan record et sous le titre “เกลือ” ขุมทรัพย์ใต้ดินอีสาน (« Sel », un trésor souterrain en Isan) (6)

 

Elle nous rappelle que la région du nord-est est riche en sel gemme et aussi en minéraux de potasse. Elle produit du sel depuis la préhistoire jusqu'à nos jours, depuis plus de 3 000 ans et aujourd'hui, on le voit encore partout en Isan. Nous en avons parlé à suffisance (3) et (4). Toutes les études techniques et scientifiques réalisées pour résoudre le problème de la sécheresse dans la région ont montré que les eaux souterraines y sont salées. Le développement des techniques d’extraction du sel a été tel que le déplacement de la base de production de sel du golfe de Thaïlande s’est déplacé vers l'Isan. En particulier, la Phimai Salt Company Limited (บริษัทเกลือพิมาย จำกัดข) dans la province de Nahkonrachasima (นครราชสีมา) fore entre 200 et 270 mètres pour en ramener la saumure qu’elle cristallise ensuite en sel pur à 99,99 %.

 

 

Ce sel pratiquement chimiquement pur ne part pas sur les tables de cuisine. Il est utilisé en particulier dans l’industrie chimique pour la production de soude caustique nécessaire à la fabrication  du savon ou d’acide chlorhydrique utilisé dans l'industrie sidérurgique et automobile. Une petite partie par probablement comme sel de table,  alimentant ce que l’on trouve vendu dans les grandes surfaces ou Seven Eleven, mais le sel pur (NaCl) est aussi insipide que l’eau pure (H2O). Or, ce sel extrait de ces exploitations artisanale, vendu des sommes dérisoires au bord de toutes nos routes, celui que j’achète et que je mouds, a le goût du sel

 

 

Il y aurait 18 000 milliards de tonnes de sel gemme sous notre et la capacité actuelle de production de sel n’y est que de 2 millions de tonnes par an.

 

Le sol de la région est pauvre, les sols salins ne favorisent pas les cultures vivrières.

 

Des chiffres méritent d’être médités. Il y a en Isan 1,5 million de raï de sol très salin, 3,7 millions de raïs de sols moyennement salins, 12,6 au total 17,8 millions de raïs ce qui fait 2 millions 840.000 hectares soit la superficie moyenne de trois département français. Sur 1,5 million de raï  de sol très salin, la superficie d’un petit département français, il ne peut pousser que ce qui pousse sur les sols salins, des herbes folles et au mieux des grenadiers, mais on ne se nourrit pas des fruits du grenadier. Il faut ajouter à ces chiffres 37,2 millions de raïs potentiellement salins éparpillés sur le bassin des provinces de Sakonakhon et Khorat, près de 6 millions d’hectares, 10 départements français

L'analyse plus scientifique quoique passionnée, de Bamphen Chairak (บำเพ็ญ ไชยรักษ์ข) - chercheuse au sein d’un groupe d'études écoculturelles - vient d’être publiée eu mois de février 2024  sur le site Isaan record et sous le titre “เกลือ” ขุมทรัพย์ใต้ดินอีสาน (« Sel », un trésor souterrain en Isaan) (6)

 

 

 

Il y aurait 18 000 milliards de tonnes de sel gemme sous notre et la capacité actuelle de production de sel n’y est que de 2 millions de tonnes par an.

Le sol de la région est pauvre, les sols salins ne favorisent pas les cultures vivrières.

Des chiffres méritent d’être médités. Il y a en Isan 1,5 million de raï de sol très salin, 3,7 millions de raïs de sols moyennement salins, 12,6 au total 17,8 millions de raïs ce qui fait 2 millions 840.000 hectares soit la superficie moyenne de trois département français. Sur 1,5 million de raï  de sol très salin, la superficie d’un petit département français, il ne peut pousser que ce qui pousse sur les sols salins, des herbes folles et au mieux des grenadiers, mais on ne se nourrit pas des fruits du grenadier

 

 

Il faut ajouter à ces chiffres 37,2 millions de raïs potentiellement salins éparpillés sur le bassin des provinces de Sakonakhon et Khorat, près de 6 millions d’hectares, 10 départements français

Cette situation ne posa guère de difficultés jusque dans les années 70 du siècle dernier après que l’on eut constaté que ces gisements de sel (NaCL) coexistaient avec d’énormes gisements de potasse (KCL), plus de 600 milliards de tonnes (400 milliards de tonnes de potasse carnallite, 200 milliards de tonnes de tachyhydrite et 7 milliards de tonnes de potasse sylvite) et qu’il y avait des perspectives fortunes colossales à faire, beaucoup plus qu’avec le simple chlorure de sodium. Vinrent alors d sérieuses difficultés sur lesquelles nous reviendrons dans l’article suivant. Les dégats qui pourraient être causés à l'environement risquent d'être irreversibles.

 

Les habitants ont la craine légitime d'être dépossédés comme le furent les amérindiens dont les réserves devinrent des puits de pétrole  Leur activité se situe dans le cadre d'une économie parallèle sur laquelle on ne dipose en réalité d'aucun chiffre.

 

 

... mais pas à leur profit comme dirait Hergé !

 

 

NOTES

 

(1) Étienne Aymonier : « Notes sur le Laos » 1885.

(2) Mémoire Inalco de Marc Mouscadet « Mini-mémoire : l’exploitation des ressources du  sous-sol au Laos à l’époque coloniale de 1893 à 1940 » de 2013.

(3) Voir notre article

LA LÉGENDE INSOLITE DE LA DÉCOUVERTE DES VERTUS DU SEL PAR LES HABITANTS DE L’ISAN (NORD-EST DE LA THAÏLANDE)

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2019/02/la-legende-insolite-de-la-decouverte-des-vertus-du-sel-par-les-habitants-de-l-isan-nord-est-de-la-thailande.html

(4) Voir notre autre article

A 300- LA LÉGENDE INSOLITE DE LA DÉCOUVERTE DU SEL PAR LES HABITANTS DE L’ISAN (NORD-EST DE LA THAÏLANDE)

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2019/02/a-300-la-legende-insolite-de-la-decouverte-du-sel-par-les-habitants-de-l-isan-nord-est-de-la-thailande.html

(5) Charles Archaimbault. : « Une cérémonie en l'honneur des génies de la mine de sel de Ban Bo, Moyen Laos ». In: Bulletin de l’École française d'Extrême-Orient. Tome 48 N°1, 1956. pp. 221-232;

(6)  https://theisaanrecord.co/2019/09/08/potash-mining-in-thailand/

 

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T
g00d !
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