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  • : Le blog des Grande-et-petites-histoires-de-la-thaïlande.over-blog.com
  • : Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.
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  Il était une fois Alain, Bernard …ils prirent leur retraite en Isan, se marièrent avec une Isan, se rencontrèrent, discutèrent, décidèrent un  jour de créer un BLOG, ce blog : alainbernardenthailande.com

Ils voulaient partager, échanger, raconter ce qu’ils avaient appris sur la Thaïlande, son histoire, sa culture, comprendre son « actualité ». Ils n’étaient pas historiens, n’en savaient peut-être pas plus que vous, mais ils voulaient proposer un chemin possible. Ils ont pensé commencer par l’histoire des relations franco-thaïes depuis Louis XIV,et ensuite ils ont proposé leur vision de l'Isan ..........

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10 décembre 2023 7 10 /12 /décembre /2023 03:19

 

Cette question ne contredit en rien ce que nous avons écrit sur l’échec de l’évangélisation du Siam. Nous avons publié en 2018 un premier article (en thaï) de Madame Suthida Tanloet  (สุธิดา ตันเลิศ) มิชชันนารีชาวฝรั่งเศสในเมืองอุบลราชธานี ช่วงปี ..2409-2453 (Les missionnaires français à Ubon Ratchathani de 1867 à 1910) (1).

 

C’est un travail universitaire d’une profonde érudition étayé par des recherches  d’une grande rigueur.

 

Nous avons découvert avec un  vif intérêt une publication récente de Phongsathon Tancharoen (พงศธร​ณ์​ ตัน​เจริญ​). Cet étudiant à l'Université de Maha Sarakham, (มหาสารคามmilitant) se présente comme militant politique qui aime étudier le marxisme et les mouvements sociaux et œuvre pour le changement dans la société. Sa page Facebook ne laisse planer aucun doute sur ses inclinations. Cet article a été publié sur le site Isaan record  (2) sous le titre ไถ่ทาสจากกุลา ให้การศึกษาเด็กยากจน โรงเรียนคาทอลิกแห่งแรกที่อุบลฯ ร่องรอยคริ (Racheter les esclaves dee Kula - Éduquer les enfants pauvres - La première école catholique d'Ubon Ratchathani – les traces du christianisme)

 

Une précision  Kula (กุลา), sauf erreur de ma part, est un terme spécifique à la langue du nord-est désignant de façon négative, les marchands d’esclave en général birmans.

 

Le travail de Phongsathon Tancharoen n’est pas à proprement parler un article universitaire, mais un solide travail d’investigations et ses conclusions, qu’il soit sympathisant marxiste ou pas, rejoignent – mutatis mutandis – celles  de la très érudite universitaire

 

 

Une précision, les deux auteurs qui sont à l’origine de cet article parlent de catholiques romains de toute évidence pour les distinguer des catholiques orthodoxes. L’implantation de l’église orthodoxe dépendant du patriarche de Moscou ne date que de 1999  de toute évidence pour répondre à la présence d’une importante population russe et ukrainienne depuis le début de ce siècle. Les 10 églises enregistrées officiellement se situent en des régions où la présence de l’immigration russo-ukrainienne est significative. Il n’y avait auparavant pas d’implantation russe au Siam. Le Bangkok Siam directory note en 1913 la présence de 23 russes enregistrés, uniquement le personnel de la légation. Des Russes ont pu se réfugier ponctuellement au Siam en temps de l’Empire mais il s’agissait de juifs qui fuyaient les pogromes et qui ne s’enregistraient pas à la légation pas plus qu’ils n’auraient hanté les églises

 

 

La présence de communautés catholiques en Isan est caractéristique essentiellement autour de l’archidiocèse de Tha Rae-Nong Saeng  (ท่าแร่-หนองแสง) dans la province de Sakon Nakhon (สกลนคร) autour duquel la plupart des villages sont catholiques et dans les provinces Nakhon Phanom, Mukdahan et Kalasin (นครพนม มุกดาหาร และกาฬสินธุ์). Cela contredit, constate Phongsathon Tancharoen, l’opinion des beaux esprits de Bangkoj qui considèrent les habitants de la région comme des paysans tout autant bouddhistes qu’animistes.

 

Cette propagation de « la bonne parole » - et les conclusions de nos deux auteurs se rejoignent, tient au dévouement et au sacrifice de leur santé des pionniers de l’évangélisation dans la région qui n’était alors pas d’un accès facile. Il faut partir du traité de Montigny en 1856, qui assure la liberté d’évangéliser et la possibilité pour les missionnaires de voyager librement pour la propagation de leur foi.

 

 

Ces pionniers, ce furent au premier chef, Monseigneur Jean-Louis Vey, désigné comme vicaire apostolique du Siam et du Laos (alors siamois) en 1875. Nous le connaissons déjà comme fondateur du premier hôpital catholique français à Bangkok qui donnait accès aux soins à tous y compris les plus démunis (3).

 

 

Cela tient encore à trois missionnaires des Missions étrangères en dehors du vicaire apostolique, jeunes, ils ont moins de trente ans, et enthousiastes, Constant Jean Baptiste Prodhomme qui finira vicaire apostolique du Laos lorsque celui-ci devinf rançais

 

 

et François Marie Xavier Guego d’abord (4)

 

 

Monseigneur Vey les envoya alors en 1876 évangéliser la région qui ne l’avait pas encore été depuis le traité de Montigny. Il n’y avait alors trace que de petits groupes de catholiques épars sans pasteur – probablement réfugiés des persécutions au Vietnam. Leur destination était la ville d'Ubon Ratchathani Le groupe accompagné d’un catéchiste Kru Naen Thong (ครูเณรทอง) et de serviteurs partit de Bangkok le 12 janvier 1881. Le choix d’Ubon n’était pas innocent. Elle était consécutive à des facteurs sociopolitiques qui les conduisirent à s'y installer définitivement et devenir es pionniers dans l’évangélisation de la religion catholique romaine et marquer la région de son empreinte.

 

La ville abritait 5000 habitants,  des Chinois comme il se doit, des moines, des esclaves et des hommes libres ; Elle était le centre administratif de la province (monthon) de Laokao (มณฑลลาวกาว) sous le nom de Ubon Ratchathani Siwanalai (เมืองอุบลราชธานีศรีวนาลัย). Elle était dirigée par un gouverneur nommé et venu de Bangkok Luang Phakdee Narong (หลวงภักดีณรงค์). Elle était en proie à des querelles internes et c’est alors que le dit gouverneur qui avait connu Monseigneur Vey à Bangkok, lui demanda l‘envoi de missionnaires. Des factions rivales s’affrontaient entre elles et il se manifestait une forte résistance au pouvoir central expansionniste. Le gouverneur nommé par Bangkok avait eu l’occasion d’y rencontrer à plusieurs reprises Monsieur Vey et l’invita à venir propager le christianisme dans sa région qui abritait par ailleurs des catholiques romains du Vietnam, victimes de persécutions religieuses

 

 

Le voyage dura 102 jours, arriva le 24 avril 1881. Notons qu’il y a entre les deux villes aujourd’hui 600 kilomètres par bonnes routes !

 

La question du financement de ces missions reste à déterminer : les catholiques y sont pauvres. Une intervention occulte du gouvernement français n’est pas à exclure, peut être aussi des autorités siamoises et bien sûr du siège de Paris : La MEP envoie des prédicateurs dans toutes les paroisses de France et y quêter des subsides. Il était de bon ton alors d’aider financièrement à la conversion des « petits chinois » comme on appelait tout ce qui venait d’Asie

 

 

Le rachat puis la conversion des esclaves

 

Le groupe fut bien accueilli à Ubon tant par les autorités que par les factions rivales au sein de la ville. Il lui fut attribué un local proche de l’hôtel de ville. La première de ses tâches fut de lutter contre l’esclavage, son abolition n’était pas à l’ordre du jour du gouvernement central. Il fut rapidement en contact avec un groupe de 18 esclaves, hommes, femmes et enfants que les trafiquants avaient capturé dans la ville de Phuan au Laos (เมืองพวน). Dans l’espoir de les convertir évidemment mais le christianise à ses débuts, ne fut-il pas un refuge pour les esclaves et les déshérités ? Avec courage et détermination, ils intentèrent des actions en justice  et obtinrent leur libération. Ils furent leurs premiers  fidèles et inscrivirent leurs enfants au catéchisme. Ils en retirèrent un grand prestige et un grand respect dans les populations au moins chez les plus démunis.

 

 

Création de la première communauté chrétienne du Nord-Est.

 

Les autorités fournirent alors un terrain aux missionnaires.au bord d’un étang à l’ouest de la ville, la zone était abandonnée car considérée comme maléfique et peuplée de démons et autres esprits malveillants. C’était une zone marécageuse peuplée de fantômes et d’esprits maléfiques qui faisaient mourir ceux qui s’y aventuraient. Or les catholiques y vivaient heureux. Ce phénomène fut interprété comme miraculeux par la population. Le terrain avait tout simplement été défriché autour de la zone marécageuse détruisant ainsi les moustiques à l’origine du paludisme.

 

Elle s’appelait  Bung Ka Saeo (บุ่งกาแซว) actuellement appelé Bung Kra Thaeo (บุ่งกระแทว). Ils y établirent un village le 17 octobre 1881 qui fut la première communauté catholique romaine d'Isan. Le terrain comportait une maison de style traditionnel qui devin à la fois la chapelle et la résidence des missionnaires. Ils accueillirent des malades et des handicapés qui demandaient leur protection et construisirent des huttes à proximité. La Vierge Marie et immaculée conception  devint protectrice de la première église du nord-est, appelée « Wat Mae Phra Narumontin » (วัดแม่พระนฤมลทิน) aujourd'hui cathédrale de l'Immaculée Conception. Ce fut le début de l’expansion de la communauté.

 

 

 

Répandre le « Dhamma » sous la devise « Libération, Miséricorde et Justice »

 

Après avoir créé avec succès la communauté de Bung Kra Thaeo, les missionnaires devaient compter sur les ressources de la mission du Siam car la plupart des chrétiens étaient pauvres et les missionnaires devaient donc les soutenir. Ils avaient des objectifs prioritaires avant même de procéder à des baptêmes et comptabiliser les conversions, apporter leur soutien aux défavorisés de la société comme nous allons le voir et lutter contre les superstitions Ainsi, mais ce n’est qu’un exemple, le terrain que la communauté avait acheté un terrain à l’ouest et à la périphérie de la ville à Bung Ka Thaew, une zone marécageuse peuplée de fantômes et d’esprits maléfiques  qui faisaient mourir ceux qui s’y aventuraient. Or les catholiques de Bungkathaew vivaient heureux. Ce phénomène fut interprété comme miraculeux par la population. Le terrain avait tout simplement été défriché autour de la zone marécageuse détruisant ainsi les moustiques à l’origine du paludisme qui y sévissait à l’état endémique.

 

 

Par ailleurs, les groupes ethniques Lao Thoeng (พวกลาวเทิง) et Lao Phuan  (พวกลาวพวน)  situés sur la rive gauche du Mékong invitèrent les missionnaires à venir les instruire. Ce fut le père  Alfred Marie Théophile Rondel (4), lui aussi jeune et dynamique, qui partit en 1883 explorer tout la région, Amnat Charoen. Nakhon Phanom jusqu’à Nong Khai (อำนาจเจริญ – อนครพนมง - หนองคาย) ? Il en revint avec quelques dizaines de disciples, beaucoup d’esclaves rachetés.

 

 

Notre auteur, Phongsathon Tancharoen, met à l’actif des missionnaires une stagnation de l’esclavage dans le nord-est avant que son abolition ne devienne de droit positif. L’équipe de Ubon va alors se répandre dans tout le nord-est,  Nong Khai, Nakhon Phanom et Sakon Nakhon (หนองคาย – นครพนม – สกลนคร). En dehors du « camps de base » d’Ubon, des communautés avec leur église au départ modeste, sont présentes dès 1884 dans ces villes.

 

 

 

La création des Sœurs religieuses « amantes de la  croix ».

 

Les missionnaires apportèrent également une assistance aux membres de divers groupes ethniques défavorisés, en dehors du rachat des esclaves, soins médicaux et développement de l'éducation et du « travail social ». Epidémies et famine causaient la mort de nombreuses personnes et les orphelins étaient nombreux en sus des difficultés causées par l’esclavage qui dispersait les familles. Ils créèrent un orphelinat en 1883. Ils en confièrent la responsabilité à deux filles d’anciens esclaves chargées non seulement des soins à leur donner mais encore de leur procureur un enseignement de base. Elle fut la première école catholique du Nord-Est et la première école de la ville d'Ubon Ratchathani. Ces femmes furent les premières religieuses catholiques du Siam. Le père Prodhomme leur fit construire un couvent en 1889 et les nomma « les sœurs qui aiment la croix » souvent traduit par « amantes de la croix » (คณะภคินีรักไม้กางเขน) à charge pour elles d'aider au travail social de la mission, adoption et prise en charge des orphelins et d'aider à l'éducation en enseignant des enseignements dans les écoles et de fournir des soins médicaux aux malades. Elles sont toujours omniprésentes dans les communautés catholiques de Thaïlande avant que la mission confiée aux prêtres de la MEP, transférer la charge missionnaire aux prêtres indigènes ne soit présentement complétement réalisée.

 

 

QUELQUES CHIFFRES

 

L’Archidiocèse de Tha Rae - Nong Saeng (อัครสังฆมณฑลท่าแร่-หนอง) a été créé en 1965. Il ne couvre qu’une petite partie (15 %) de la région nord-est (25.500 kilomètres carrés sur 160.000). Sa juridiction recouvre 4 provinces à savoir Sakon Nakhon, Nakhon Phanom, Mukdahan et Kalasin. Sa population est de 3.190.000 habitants et le nombre de catholiques enregistrés, de 57.000 soit 1,8 % de la population.

 

Sur tout le pays, la proportion n’est que de ½ %, ce chiffre est significatif. En sus de son archevêque et de son prédécesseur devenu honoraire, 76 prêtres desservent 74 cathédrales ou églises. Il existe en outre 13 prêtres moines : capucins, de l’ordre de Saint Gabriel, dominicains et cisterciens. Les religieuses « amantes de la croix » sont 92 et 26 de divers ordres féminins. Ces chiffres sont donnés sur le site en thaï de l’archidiocèse (https://www.cbct.or.th/อัครสังฆมณฑลท่าแร่-หนอง/). Tout le clergé, archevêque en tête est actuellement thaï ce qui est conforme à la mission confiée au Missions étrangères par le Pape lors de sa création, former en priorité un clergé indigène.

 

 

Le diocèse d’Ubon, créé à la même date, gère 7 provinces à savoir Ubon Ratchathani, Maha Sarakham, Yasothon, Roi Et, Sisaket, Surin, Amnat Charoen. Il est plus de deux fois plus peuplé (près de 8 millions d’habitants), n’abrite que 25.000 fidèles qui ne sont desservis que par 36 prètres. Ces chiffres viennent du site https://www.cbct.or.th/สังฆมณฑลอุบลราชธานี/

 

 

Les chiffres deux deux autres diocèses dee l'Isan, Korat et Udonthani sont encore plus attristants, ne reuons pas le couteau dans la plaie

Conclusions

 

Les actions humanitaires, rachat d’esclaves d’abord et ensuite soins médicaux et enseignement, furent un facteur essentiel au succès évidement relatif de la prédication de la bonne parole évangélique. Les biographies de ces missionnaires sur le site des archives de Missions étrangères s’en glorifient non sans raisons. A l’inverse des premiers missionnaires de l’épopée de Louis XIV qui pensaient convertir le Siam en convertissant son roi, cette réussite évidemment relative démontre d’où il fallait partir

NOTES

 

(1) https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2018/09/a-275.2409-2453-les-missionnaires-francais-dans-le-mueang-d-ubonrachathani-de-1867-a-1910.html

(2) https://theisaanrecord.co/2023/12/06/propagation-of-christianity-roman-catholic-church-in-isaan

(3) voir notre article :

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/article-a140-1898-le-premier-hopital-fran-ais-catholique-a-bangkok-122232355.html

(4) Les notices détaillées de leur vie de missionnaires se trouvent sur le site des archives de la MEP.

https://irfa.paris/en/missionnaire/0874-vey-jean-louis/

https://irfa.paris/en/missionnaire/1193-prodhomme-constant/

https://irfa.paris/en/missionnaire/1428-guego-francois/

https://irfa.paris/en/missionnaire/1459-rondel-alfred/

 

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