Après avoir rappelé le contexte international, il nous faut maintenant nous donner quelques pistes de travail pour orienter nos futurs articles qui nous permettront de préciser ce qu’il en fut des relations entre le Siam et les différents pays européens jusqu’au XVII ème siècle.
Quelques repères historiques.*
5. Les Portugais au Siam.
- En 1511, Alfonso de Albuquerque conquiert Malacca alors pivot du commerce en Asie et lance plusieurs missions diplomatiques à l'est : Duarte Fernandes est ainsi le premier Européen à être reçu à la cour d’Ayutthaya.
- 1518 Signature d’un traité commercial avec le Portugal.
Rita Bernades de Carvalho
nous aidera à préciser ce que fut « La présence portugaise (Siam) aux XVIe et XVIIe siècles », (Master, Paris, 2006), avec ce pouvait représenter le commerce portugais en Asie, avec le Siam ; les différentes ambassades en 1511, 1512, 1518, 1540 … 1646, 1684-1686 ; les Portugais contre les Hollandais (1610-1616) ; l’établissement portugais à Ayutthaya.
Nous vous présenterons aussi un document savoureux que donne M. Forest sur les « Instructions données aux mandarins siamois pour le Portugal » qui illustre bien « la langue diplomatique siamoise de l’époque ». (in « Les Missionnaires français au Tonkin et au Siam (XVIIe-XVIIIe siècle), Analyse comparée d’un relatif succès et d’un total échec », l’Harmattan,1998)
6. Les Espagnols au Siam.
- 1598 Signature d’un traité commercial avec l’Espagne. Compétition commerciale avec les Japonais. (T.C.)
« Durant le règne de Naresuan le Grand, les Espagnols, après les Portugais, commencèrent des échanges commerciaux avec Ayutthaya.
Après avoir réglé les problèmes aux Philippines en désignant Manille comme leur capitale en 1571, ils se répandirent dans les pays voisins.
En 1598, Don Tello de Aguirre quittait Manille pour une mission diplomatique à Ayutthaya. Cette ambassade devait mener à la signature d'un traité d'amitié et de commerce avec le Siam. C'était le deuxième traité que le Siam signait avec un pays européen. Les termes du traité étaient similaires à ceux du traité d'avec le Portugal en 1516. » (http://bottu.org/histoire/histoire10.htm)
Mais après une première recherche, nous n’avons pas trouvé les termes du traité, ni le volume et les produites échangés. Mais nous ne renonçons pas.
On peut supposer que ce commerce devait être limité, en considérant que le commerce espagnol s’effectuait surtout en Asie entre les Philippines et Acapulco et avec les commerçants chinois.
Nous verrons que les Espagnols eurent surtout des relations avec le Cambodge. On pense à l’aide apportée au roi du Cambodge par le Portugais Diogo Veloso qui arriva avec une poignée d’hommes pour former la Garde Royale du roi de Lovek avec l’aide de l’Espagnol Blaz Ruiz en 1592.
Les deux hommes devinrent les favoris du roi (nommé par les auteurs portugais et espagnols « Apram Langara » ou « Prauncar Langara ») et essayèrent vainement d’obtenir l’alliance des Espagnols implantés aux Philippines.
Malgré ces renforts d’ailleurs, la capitale Lovek est prise et entièrement pillée en janvier 1594 , 90.000 khmers sont déportés au Siam. (Cf. notre article 67. Le roi Naresuan, et ses guerres contre le Cambodge.
7. Les Hollandais.
En 1601, les Hollandais avaient atteint Pattani, un petit état Thaïlandais vassal du sud, où ils reçurent la permission à bâtir un comptoir de commerce.
- 1602, la VOC établit un comptoir à Pattani.
- 1604, ils allèrent à Ayutthaya où leur arrivée fut marquée par une audience accordée par le Roi Naresuan à leur chef, Cornelius Specx. Il permettait l'établissement d'un comptoir de commerce.
- Ekathosarot envoya en 1608 des émissaires à La Haye. Le voyage devait durer sept mois, et l'Europe pour la première fois faisait connaissance avec des Thaïs.
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- (16 dec 1607. Une ambassade de 16 siamois, envoyés par le roi Ekathotsarot, arrive à Bantam pour chercher à se rendre en Hollande.(Indonésie). 28 janv 1608. L'ambassade siamoise embarque à Bantam sur le navire "Orange" de Matelief pour la Hollande. 1608. La VOC établit un comptoir à Ayutthaya afin d'en faire une base pour leur commerce avec la Chine et le Japon. 2 sept 1608. Une ambassade siamoise débarque à La Haye, du navire "Orange" de Matelief.(Pays-Bas). 11 sept 1608. L'ambassade siamoise est reçue en audience à La Haye par Maurice de Nassau.(Pays-Bas). 30 janv 1610. Une ambassade siamoise quitte la Hollande.(Pays-Bas)
- En 1617, Les Hollandais signaient leur premier traité avec le Siam.
Les relations entre la Hollande et le Siam continuèrent à être amicales jusqu'au règne du Roi Prasat Thong (1630-1656).- 1633. La VOC obtient un monopole et un terrain pour construire un comptoir à Ayutthaya.
- 1638. Schouten publie sa "Notice sur la situation, gouvernement, puissance, religion, coutumes, commerce et autres choses remarquable du royaume de Siam", à la Haye.(Pays-Bas)
- En 1641, les Hollandais chassèrent les Portugais de Malacca et établirent leur domination sur les mers de l'Asie du sud-est.
- En 1648, ils firent une démonstration de force magistrale dans le golfe de Siam, ce qui persuada Prasat Thong de leur accorder certaines concessions commerciales, leur donnant virtuellement le contrôle de l'économie siamoise.
- En 1661, au début du règne du Roi Narai, les Hollandais capturèrent un navire transportant des marchandises du Roi du Siam. Les Hollandais n'aimaient pas le système de Monopoles Royaux et n'étaient plus satisfaits du traité avec le Siam.
Poussé par son mépris des Hollandais, le fils de Prasattong, Naraï (1656-1688), fit appel aux Anglais pour le soutenir dans sa lutte contre l'influence de la Hollande. - En 1664, quelques cuirassés Hollandais bloquèrent l'embouchure du Chao Phraya, forçant ainsi le Siam à signer un autre traité, par lequel les Hollandais obtenaient un monopole sur l'exportation de peaux. S'ils commettaient un crime au Siam, ils devaient être livrés au chef du comptoir de commerce et punis selon les lois des Pays-Bas.
Les Hollandais obtinrent également, et pour la première fois dans l'histoire du Siam, les privilèges de l'extraterritorialité. - Le roi Narai n'avait apparemment pas l'intention d'observer les termes du traité et devait se tourner vers les Français pour contrecarrer les Hollandais. Mais de cela, nous avons déjà beaucoup parlé.
- En 1688, le Roi Phetracha
- (1688-1703) réussissait à signer un nouveau traité avec la Hollande. (Il contenait les mêmes termes que ceux du premier traité de 1617).
Quelques dates des comptoirs hollandais.
- comptoir de Ayutthaya : de 1613 à 1767.
- comptoir de Patani (Pattani) : de 1602 à 1623.
- comptoir de Sangoua (Songkhla) : de 1607 à 1623.
- comptoir de Ligor (Nakhon Si Thammarat) de 1664 à 1705 et de 1752 à 1766.
1765. Départ des Hollandais du Siam.
9. Les Anglais.
Les Anglais commençaient à montrer de plus en plus d'intérêt pour Ayutthaya après que la Compagnie des Indes fut fondée en 1600.
- En juin 1612, sous le règne de Songtham (1610-1628) les Anglais arrivèrent à Ayutthaya pour la première fois, porteurs d'une lettre de Jacques 1er.
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- Comme les Hollandais, ils furent bien accueillis et on leur accorda un coin de territoire pour y installer leur comptoir.
Une usine fut même ouverte à Ayutthaya et à Pattani mais elles ne firent aucun profit et ce fut la fermeture en 1623.
- En 1619, les Hollandais prennent Jacatra (Djakarta) au sultan de Bentam allié aux Anglais (ils rebaptisent la ville du nom de Batavia),
- cette même année ils attaquent deux navires anglais dans la baie de Pattani, en 1623, ils exécutent dix Anglais accusés d’espionnage à Amboine. Pendant que des accords, des traités, des arrangements sont signés en Europe, le canon tonne toujours dans les mers des Indes orientales, où règne un état de guerre larvée.
- Pour les Anglais comme pour les Hollandais, le comptoir d’Ayutthaya n’est guère rentable, et son principal intérêt est de constituer un passage vers le Japon et vers la Chine. Les Anglais le ferment en 1623. Ils ne le réouvriront qu’en juin 1661.
- La faible rentabilité du comptoir d’Ayutthaya est encore aggravée par les agissements des « interlopers. » C’est ainsi qu’on appelle alors ceux qui trafiquent pour leur propre compte et bravent le monopole de la Compagnie. Certains n’hésitent pas à concurrencer directement l'EIC en affrétant en Angleterre des navires qui vont en Asie acheter des marchandises revendues à prix cassés. La plupart, cependant, se contentent d’un petit trafic côtier limité à l’orient. Il est vrai également qu'un grand nombre des employés de la Compagnie sont peu ou prou impliqués dans ces trafics, une façon de compenser leur faible salaire. On peut vraisemblablement penser que l’EIC est minée de l’intérieur. C’est comme assistant de George White, un de ces « interlopers » que Constantin Phaulkon arrive au Siam. Nous avons vu dans notre lecture du livre d’Alex Aylwen, « Le Faucon du Siam », comment le fils Samuel White, nommé par Naraï et Phaulcon au port de Mergui piratait pour son propre compte. (Cf. in A99, 100, 101).
- Lorsque les Anglais ouvrent à nouveau leur comptoir d’Ayutthaya en 1661, le roi Naraï espère en obtenir une alliance qui contrebalance la puissance hollandaise. Espoir déçu, les Anglais n’entendent nullement jouer le moindre rôle sur la scène politique siamoise, ils se contentent des petits profits qu’ils retirent du commerce. Conseillé par Phaulkon, c’est vers la France que regarde désormais le souverain siamois.
10. Les Français.
Nous avons déjà consacré de nombreux articles à ces relations franco-thaïes, à travers de nombreux témoignages très différents.
- 5 articles sur l’arrivée des missionnaires et les jésuites français au Siam, avec aussi l’ouverture commerciale et le premier comptoir au Siam en 1680 (article 4 de nos relations franco-thaïes). D’autres sont consacrées aux deux ambassades de Louis XIV, vues par l’abbé de Choisy, le chevalier de Forbin, de La Loubère, par une historienne thaïe, et par le romancier Morgan Sportès « Pour la plus grande gloire de Dieu » (A89) … avec des portraits de certains protagonistes majeurs.
Nous nous relirons, et proposerons ce qui nous semble le plus essentiel.
- Mais nous aurons aussi la possibilité d’être plus complet pour les missionnaires avec la thèse de doctorat la plus pertinente sur le sujet de M. Alain Forest « Les Missionnaires français au Tonkin et au Siam (XVIIe-XVIIIe siècle), Analyse comparée d’un relatif succès et d’un total échec », l’Harmattan,1998.
- Mais nous profiterons aussi du travail colossal de M. Forest qui nous propose aussi sa vision de l’histoire du Siam (2ème partie-Aspects de l’histoire du Siam) dont une étude sur le commerce du Siam, que l’on peut considérer comme un « scoop historique » concernant les activités commerciales, dont il nous donne quelques données chiffrées, qui relativisent quelque peu les envolées lyriques sur ce commerce international siamois.
Quelques repères :
- La 1ére implantation chrétienne serait de 1555 avec quelques Portugais, mais les premiers missionnaires français arrivent en 1662. (Pierre Lambert de la Motte).
- Rejoint par François Pallu en 1664, qui fonde la première mission,
Les ambassades siamoises.
- La 1ère ambassade fut en fait envoyée par le Roi du Siam Naraï, le 21 décembre 1680. (1 octobre 1681. Le "Soleil d'Orient", transportant une ambassade siamoise vers la France, arrive à l'Ile Bourbon.(France)1681 déc Le "Soleil d'Orient", transportant une ambassade siamoise vers la France, ayant quitté l'Ile Bourbon, fait naufrage. Madagascar)
- Quatre ans plus tard, sans nouvelle de ses envoyés, le roi avait envoyé une nouvelle délégation avec Khun Pichaï Walit et Khun Pichit Maïtri et deux missionnaires M. Pascot, et Benigne Vachet, avec une triple mission :
« s'informer des Siamois partis en 1680 ; prier Messieurs les ministres de congratuler Sa Majesté, de la part du roi de Siam, sur la naissance de M. le duc de Bourgogne ; engager les mêmes ministres à s'appliquer de découvrir les voies les plus courtes et les plus solides pour lier une ferme amitié et correspondance entre les deux Couronnes ». (et également « faire travailler à quelques ouvrages de curiosité que le roi de Siam souhaite du royaume de France ») » Site Mémoire du Siam.
- 18 juin 1686. L'ambassade de Chaumont est de retour en France, à Brest, avec 3 ambassadeurs de Siam. menée par Opra Wisuthra Sunthon, dit Kosapan, Oluang Kalaya Rajamaïtri et Ocun Sri Wisang Waja , arrivée le 18 juin 1686. Séjourne en France entre juin 1686 et mars 1687 (2 août 1686. Les ambassadeurs de Siam arrivent à Paris. 14 janv 1687. Les 3 ambassadeurs du Siam ont audience de congé avec le roi Louis XIV. Kosapan prononce une harangue.)
- 1 mars 1687. Les 3 ambassadeurs du Siam repartent pour le Siam avec l'ambassade Céberet-La Loubère : 6 navires de guerre et 630 soldats.
Les Français.
- 1662, 1er contact entre la Cour et Mgr Pierre Lambert de la Motte accompagné de deux missionnaires, qui autorise l’installation des missionnaires et la liberté de culte.
- Le 18 octobre 1673. Mgr Pallu remet une lettre du pape Clément IX et de Louis XIV, au roi Naraï.
- Et bien sûr les deux ambassades françaises de 1685 et de 1687, avec la révolution de 1688 de Pitratcha, « l’expulsion »des Français et la suspension des relations diplomatiques pendant près de deux siècles.
Nous avons là un itinéraire, quelques repères, que nous compléterons au fil de nos lectures, nos modestes recherches, nos petites trouvailles, dues le plus souvent aux hasards, à notre curiosité, et à nos interrogations de récents historiens amateurs. Parfois nous avançons vraiment en terrain inconnu ou inaccessibles (comme les sources chinoises si importantes pour cette Région) et d’autres fois nous nous contentons de « profiter » d’un livre majeur (ou d’un article sur le sujet traité), comme par exemple la thèse de M. Alain Forest sur « Les Missionnaires français au Tonkin et au Siam (XVIIe-XVIIIe siècle ».
Et comme disait Lao Tseu «Un voyage de mille milles commence par le premier pas».
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*Cf. l’excellent site « Mémoires du Siam ». Pour notre sujet : Repères historiques. Les Compagnies des Indes : Les Portugais. Les Hollandais. Les Anglais. Les Français.
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