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  • : Le blog des Grande-et-petites-histoires-de-la-thaïlande.over-blog.com
  • : Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.
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Pourquoi ce blog ?

  Il était une fois Alain, Bernard …ils prirent leur retraite en Isan, se marièrent avec une Isan, se rencontrèrent, discutèrent, décidèrent un  jour de créer un BLOG, ce blog : alainbernardenthailande.com

Ils voulaient partager, échanger, raconter ce qu’ils avaient appris sur la Thaïlande, son histoire, sa culture, comprendre son « actualité ». Ils n’étaient pas historiens, n’en savaient peut-être pas plus que vous, mais ils voulaient proposer un chemin possible. Ils ont pensé commencer par l’histoire des relations franco-thaïes depuis Louis XIV,et ensuite ils ont proposé leur vision de l'Isan ..........

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Merci d’être venu consulter ce blog. Si vous avez besoin de renseignements ou des informations à nous communiquer vous pouvez nous joindre sur alainbenardenthailande@gmail.com

18 juillet 2011 1 18 /07 /juillet /2011 03:01

SANY0756 L’ école à Ban Pangkhan, village d’Isan. 

Après notre article sur « L’éducation en Isan», il nous a paru intéressant de connaître les sentiments de Jeff, notre ami blogueur, http://isan-farang.eklablog.com/, sur les  deux écoles de son village de Pangkhan en Isan.


Ce matin, avec le fiston Tangmoo, nous sommes partis à l’école. Nous y allons tous les deux en vélo. Elle n'est pas loin, juste à l’entrée du village lorsque l'on arrive de Sélaphum, à l' opposé du temple. Tangmoo a quitté la maternelle depuis le mois d'avril de cette année ; adieu la maternelle qui se trouvait juste à côté de notre maison !

SANY0758Il se retrouve désormais au premier échelon du premier cycle de l’école primaire. Si on cherche une équivalence avec l’école française, il est au niveau de la fin de grande section maternelle et au  début du cours préparatoire. Tangmoo n'est pas dépaysé, toutes ses copines et ses potes ont suivi. Seul son 'instit' n'a pas suivi, mais son nouvel instituteur est tout simplement le père de son ancien instituteur de maternelle. Alors !

Serait-ce héréditaire, comme la royauté? Franchement je ne sais pas, mais à première vue, je trouvais le fils plus prompt à enseigner que son vieux père...Je dis ça, mais comment se fait-il que je puisse juger l’enseignement prodigué sur les bancs de l’école de Ban Pangkhan?

Ce matin la mousson nous a rattrapés. Il s'est mis à pleuvoir des trombes d'eau, à peine avais-je laissé le fiston dans la cour de son école. J'ai dû  rebrousser chemin, abandonner ma ballade quotidienne dans les rizières et me mettre à l'abri. A mon retour précipité, il n'y avait toujours pas d'enseignants, comme d'habitude, (ma mauvaise langue toujours bien aiguisée !). Eh ! Ce n'est pas parce que l'on est instituteur que l'on doit être à l'heure en Thaïlande, évidemment ! La fonction ne devrait-elle pas s'honorer du devoir de ponctualité, du moins d'exemple, oserai-je dire.

Je me suis donc mis à l'abri avec les enfants, livrés à eux-mêmes, enfin presque, car les plus âgés, ceux des classes de sixième (l’équivalent du CM2), s'occupent des plus petits, et ce que j'ai pu voir m'a paru intéressant. Au village, c'est une grande famille et ce sont aussi d'autres valeurs qui valent la peine d’être préservées.

L’année dernière à la maternelle, les enseignants, lorsqu'ils arrivaient, ouvraient les grilles de l’école et alors seulement les enfants franchissaient les portes (enfin presque car la clôture de l’école était plus que poreuse, mais cela est une autre histoire), et pouvaient commencer à s'amuser sous leur regard , pas forcément très assidu ,mais sous leur regard tout de même.

SANY1694Les classes par contre sont bien équipées, peut-être un peu moins qu'en France mais il y a une salle pour toutes les classes avec ordinateurs, télévision pédagogique par satellite, possibilité aussi de passer des films, etc...

Pour les plus petits il y a des jouets.

Un réfectoire est aussi à la disposition des écoliers qui sont nourris gratuitement par les autorités de la province. On est alors sûr qu'ils ont au moins un repas chaud et complet tous les jours mais en « échange »le vendredi il faudra mettre l'uniforme au couleur de la province, ici celle de Roi-Et, le mauve est de rigueur.

SANY1119Le mercredi, la tenue de sport, maillot jaune et bas de survêtement noir ( le sport n'est pas leur fort, mais chaque école a un terrain de foot, un terrain de volley et de basket mais surtout un terrain de « tako »,grand comme un terrain de badminton. (C'est une sorte de foot-volley qui se joue à trois contre trois à l'aide d'un petit ballon creux et fabriqué en écorce de bambou). On continue dans la panoplie des uniformes, avec le lundi mardi et jeudi, le short bleu et chemise blanche.

Je posais, un jour,  une question à un professeur pour comprendre quel était l’intérêt des uniformes puisqu'aucune tradition colonialiste voire très « british » n'avait perturbé l’histoire de la Thaïlande. La réponse fut très vague. En fait cela semblait être une question qui ne travaillait que l'esprit d'un farang qui trouvait que les sommes allouées pour ces uniformes devaient être un sacrifice pour de nombreuses familles en ISAN. Souvent cela représente plus d'un mois de revenu pour équiper un seul enfant, quand on sait que ces familles ont souvent beaucoup plus d'enfants que les autres !

Heureusement la solidarité villageoise fait que les uniformes encore en état sont redistribués aux plus démunies.

La conversation fut la même en ce qui concerne la coupe de cheveux mais peut-être que l'explication était plus simple. Le pou, vil et vicieux ne devrait sûrement pas gagner la partie dans les écoles thaïlandaises. Donc « boule à zéro » pour les garçons et « petit carré »propret pour les filles. Malgré tout, Tangmoo avait réussi à garder sa coupe « rock'n'roll »jusqu'à la semaine dernière mais son vieux prof ' se montra intransigeant : « A la tondeuse comme tout le monde», ordonna t-il.


Pour terminer avec certains clichés que je pensais d'un autre temps, mon fils est gaucher et...Non non, le fait d’être gaucher n'est plus considéré comme une tare ,même en Thaïlande. Tangmoo a essayé d’écrire de la main droite comme la majorité de ses camarades (je pensais que le vieux prof l'avait obligé à écrire avec sa main droite et avant de « gueuler » (il est vraiment c...ce farang) l'instit' m'a dit que le fiston voulut écrire de cette main tout simplement par mimétisme) . Tangmoo l'a tenté mais il y a des choses qui sont tout bonnement impossibles. Il est et restera gaucher au-dessus comme en-dessous des hanches, comme son père et sa mère.

Bon, il était 8 heures… les couleurs montent au ciel, même les plus petits tentent d'entonner l'hymne mais ils ne le chantent pas à huit heures comme (presque) partout en Thaïlande, comme ils devraient le faire mais le chantent lorsque tout le monde est là, c'est-à-dire ? C'est-à-dire que c'est très fluctuant, en fait lorsque tous les instituteurs sont enfin là. Dirons-nous entre huit et neuf heures. Les instits' n’étaient donc toujours pas arrivés, il pleuvait toujours alors une grande conversation a pu commencer avec les « jeunes étudiants ». Je leur posais des questions.

L'avantage est que mon fils parle français et a pu intervenir lorsque je ne comprenais pas ce que certains voulaient me dire. Encore une différence du farang noï (noï=petit) et ce matin-là, il s'en est fait une fierté.


Tout d'abord les enfants apprennent à parler le thaï car ils pratiquent tous l’Isan, leur langue maternelle, puis apprennent à l’écrire. Les lettres de l'alphabet thaï sont très compliquées. On compte tout de même 44 consonnes et 32 voyelles. Pas mal non ? On apprend souvent par le système de répétition orale et en faisant des lignes et des lignes de lettres et ça rentre au bout d'un moment.

Désormais quasiment tous parlent et comprennent le thaï. Les anciens ont encore besoin des crieurs, tradition qui perdure par les hauts-parleurs des villages et petites villes, car ils sont encore très souvent analphabètes malgré tout. Ils apprennent à compter et là c'est comme partout, bien que le programme mathématique soit le même qu'en Europe, il y en a qui ont la fibre et d'autres, beaucoup d'autres, l'ont moins.

Pour les petits, ils apprennent le B. A. BA. en anglais et plus ils grandiront, plus cette langue étrangère deviendra quelque chose d'abstrait qu'ils sauront peut-être lire et écrire, mais rarement parler.

Les enfants apprennent aussi toutes les bienséances : le respect dû aux anciens et aux adultes et donc aux autorités. On pourrait appeler ça du civisme, mais on pourrait dire aussi qu'on les habitue à être asservi?

Vaste question ?

 

SANY0752La grande fille de ma femme (TAN, que je considère comme ma fille puisque je m 'en occupe depuis qu'elle a l'âge de trois ans) continue sa scolarité.

Elle a seize ans aujourd'hui et rentre dans le dernier cycle d'enseignement basique c'est-à-dire la route vers le bac, et à la vue de ce qu’elle apprend cela me rappelle largement ce que j'ai pu apprendre à son âge dans mon lycée, en France(j'ai aussi la mémoire qui flanche, d'où le terme « je pense »). Pour les sciences, elle m'a dit qu'ils avaient des classes laboratoires et aussi des ordinateurs. L’Histoire est à l'image des politiques du pays. Très subjective mais cela s'améliore. La géo, ça va mieux aussi. Je me souviens de profs d'histoire-géo ne sachant pas où se trouvait l'Afrique et ne connaissant qu'essentiellement Louis XIV parce que le premier ambassadeur thaïlandais rejoignant l'Europe, le fut à la cour du Roi Soleil. Cette anecdote date de moins de dix ans, eh eh !

Aujourd’hui, les profs qui avaient un diplôme de complaisance ont disparu avec indemnités et ceci depuis le premier mandat de Taksin Shinawatra, entre 2000 et 2004  ;ceux qui continuent d'enseigner, ont pendant cette même période et durant deux ans de suite, suivi une remise à niveau draconienne avec un examen à la clé ! Ceux qui ont échoué à ce diplôme intermédiaire, ont raccroché la charrette des premiers qui furent limogés. Taksin pensait, et je pense à juste titre, que l'enrichissement du pays passait par un enseignement de qualité, une élévation du niveau général d'éducation, pour transformer une économie de type « chinoise » pour aller vers une économie de type « singapourienne ». Une classe ouvrière et paysanne pauvre serait à terme remplacée  par une classe moyenne, un peu comme cela est arrivé en Malaisie.

Désormais, le niveau paraît correct, par contre on ne pousse pas les élèves, loin de là. Si on veut réussir dans un lycée de district il faut bosser et ne pas succomber à la facilité et se laisser distraire par l'argent facilement acquis. Mais si un Thaïlandais est déterminé, on peut lui faire confiance, il réussira. Par contre ne rien faire et on se retrouve vite être une future main d’œuvre malléable sans diplôme pour les usines de Bangkok ou les bars de Pattaya. Mais n'est-ce pas la même histoire partout sur la planète ? Motivé, motivé...

L’école est gratuite mais elle coûte chère tout de même. Les uniformes, les livres, les outils pour le jardinage entre autre. Travailler la terre est d'ailleurs une chose que je trouve très bien. Ils apprennent à planter, faire pousser, récolter. Ils sont tous enfants ou petits-enfants de paysans et ces travaux liés à leurs racines me paraissent primordiaux, juste pour ne pas oublier d’où ils viennent et pouvoir être fier d’être ISAN, belles provinces du nord-est où pour réussir dans les études il faut en avoir vraiment envie et ne pas attendre des profs, voire même de votre entourage, en général, qu'ils vous poussent à étudier. On peut très vite finir à la ferme pour les garçons ou au bordel très jeunes pour les filles et rapporter de l'argent rapidement à la famille. Les mentalités changent, les paysans s'enrichissent aussi et peuvent pour nombre d'entre eux se permettre de payer des études à leurs enfants. Trois de mes voisins ont des enfants professeurs ou ingénieurs. Bien-sûr, tous ne peuvent pas, d'autres ne veulent pas.

On peut même décourager certains étudiants de continuer à apprendre. Les autorités s'en occupent ou délaissent l'affaire pour garder sous le coude de la main d’œuvre ouvrière servile et respectueuse des aînées. En voici d 'ailleurs deux exemples que j'ai pu vivre de très près.


Ma grande fille voulait gagner l’école de la grande ville, mais il fallait payer (que l'on soit bon ou mauvais d'ailleurs) juste pour sortir major de promotion scolaire. Un peu de magie et le mauvais pour qui l'on paye se retrouve premier. Seulement les dix premiers du collège de Ban Kwao peuvent se rendre gratuitement et officiellement dans le lycée de Sélaphum à la fin du cycle obligatoire scolaire, l’équivalent de la troisième en France. Sur près de 1000 élèves, pas facile. Finalité, même si l'on est bon, on doit payer ! Pourtant,  c'est l’école publique mais certains administrateurs font payer certaines prestations qui se trouvent ne pas être légales, être totalement illicites . Le programme reste le même et les enseignants sont (j'en connais certains) comme ceux de la petite ville à côté de chez nous.


Ces écoles sont « réputées » bien-sûr, parce qu'elles sont surtout payantes et offrent plutôt un statut aux parents qu'un véritable enseignement de qualité. La plupart des parents, je ne parle pas des hautes classes, pensent-ils, crédules, que si l'on paye, c'est forcément bien. Ces écoles sont à peu de chose près les mêmes que les « communales ».

J’ai alors dit à TAN : « Si tu veux, tu peux » et je peux vous dire qu'elle est motivée pour réussir. Je lui paye des cours de soutien pour certaines matières si nécessaire mais jamais je ne contribuerais à un système corrompu. Sa mère, ma femme, aurait été tentée de succomber, mais elle a finalement accepté mon refus de jouer le jeu des corrompus. 


Il y eu aussi un fait divers retentissant, il y a quelques semaines. Cela a défrayé la chronique des journaux thaïlandais. On a retrouvé plus de deux milles fœtus dans un temple de Bangkok, dans une chambre froide en attente de la crémation rédemptrice ;le four était en panne. Cela a mis à la lumière cet état de fait. L’avortement est interdit au pays du sourire sauf cas exceptionnels (viol, malformation). Plus de 100 000 jeunes filles ( je crois) accouchent avant l'âge de seize ans et la double peine peut alors tomber. Une fille enceinte doit quitter l’école, elle doit même stopper définitivement sa scolarité, dans le public comme le privé d’ailleurs. Donc cela procurera de la future main d’œuvre non diplômée pour les usines voire les bordels .Les enfants, cela coûte cher et les pères sont souvent inexistants. Il ne restera plus alors pour la brillante élève que l'avortement. Chez les bouddhistes, toutes les vies sont sacrées, c'est donc un douloureux cas de conscience !


Pour conclure, je pense que vivre au village est une chance, et rien n’empêche de s'ouvrir sur le monde autrement. Tangmoo a gôuté aussi à l’école française pendant deux mois, il m'a alors dit: « papa, moi j'aime l’école de Ban Pangkhan, tous les jours j'apprends ko kaï et kho khwaï, etc...Je suis libre d'aller où je veux dans le village avec mes copains ».

 

Jeff de Ban Pangkhan, village d’Isan, à 30km de Roï- Et. 

 

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