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  • : Le blog des Grande-et-petites-histoires-de-la-thaïlande.over-blog.com
  • : Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.
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  Il était une fois Alain, Bernard …ils prirent leur retraite en Isan, se marièrent avec une Isan, se rencontrèrent, discutèrent, décidèrent un  jour de créer un BLOG, ce blog : alainbernardenthailande.com

Ils voulaient partager, échanger, raconter ce qu’ils avaient appris sur la Thaïlande, son histoire, sa culture, comprendre son « actualité ». Ils n’étaient pas historiens, n’en savaient peut-être pas plus que vous, mais ils voulaient proposer un chemin possible. Ils ont pensé commencer par l’histoire des relations franco-thaïes depuis Louis XIV,et ensuite ils ont proposé leur vision de l'Isan ..........

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26 novembre 2018 1 26 /11 /novembre /2018 03:01

 

Lors de notre article sur le voyage privé du Roi Chulalongkorn en Europe en 1907, nous avons parlé de sa visite au Salon des artistes français qui, depuis 1881 se tient tous les ans au Grand Palais (1). Il y rencontra deux artistes, Henri-Léon Jacquet et Lucien-Hector Jonas qui étaient déjà présent pour le premier aux salons de 1903, 1904, 1905 et 1906 et l’autre aux salons de 1905 et 1906. Un catalogue illustré révèle un véritable monde  (2)

 

 

En 1903, au milieu de 1786 participants Jacquet expose le « portrait de Mademoiselle R.S. », toile reproduite au catalogue.

 

En 1904, il y eut 1863 exposants. Jacquet y expose « deux intransigeants », toile reproduite au catalogue.

 

En 1905, il y eut 1954 exposants uniquement pour les peintres, nous ne parlons pas des sculpteurs. Jacquet y est admis avec le portrait intitulé « Au soleil »

 

et Jonas avec une toile intitulée « consolation », tous deux sont également reproduits dans le catalogue, ce qui est une espèce de consécration. Jonas reçoit une troisième médaille après avoir obtenu un second prix de Rome.

 

 

En 1906, il y eut 1734 exposants. Jacquet expose « Le parrain à la chandelle : baptême dans le Boulonnais »

 

 

et Jonas un triptyque intitulé « les mineurs ».

 

 

En 1907, c’est la visite du Roi Chulalongkorn. Il y a 1659 exposants pour la peinture et 102 pour la sculpture. Jacquet expose « procession des matelottes du Courgain »

 

et Jonas « Les rouffions, scène de grève (Anzin) », deux toiles qui retinrent l’attention du monarque.

 

 

Avant de dire quelques mots de ces artistes, dans ce monde de l’art qui n’est pas notre spécialité, il faut se poser la question de savoir comment un amateur peut s’y retrouver ? Nous bénéficions de l’œuvre d’un éminent critique d’art de l’époque. Véritable polygraphe, Émile Langlade s'est lancé en 1929 dans la rédaction des « Artistes de mon temps, » vaste recueil de biographies artistiques d’autant plus précieux qu'il évoque nombre de peintres dits « secondaires » ou oubliés dont l'œuvre, pour une part notable d’entre eux demeure en partie à découvrir. Nous y avons puisé de précieux renseignements (3).

 

 

Au milieu de ces milliers d’artistes exposants dont la plupart sont tombés dans un éternel oubli peut-être immérité, Langlade en dégage quelques dizaines, dont Jonas (mais pas Jacquet ) qu’il ne fait que citer. Tous n’ont pas exposé au Salon, soit qu’ils n’étaient pas été admis soit qu’ils n’avaient pas concouru.

 

Se pose enfin la question de savoir quelle est la différence réelle entre ce qu’il est convenu d’appeler un « grand maître » le plus souvent par les galeristes d’avant- garde et les « petits maitres » dont les œuvres méritent d’être ramenées à la lumière ? Il s’agit le plus souvent de deux ou trois zéros de plus dans les adjudications publiques dont l’artiste profite rarement puisqu’elles se déroulent après sa mort. Van Gogh a vendu un seul tableau de son vivant et a fini dans la misère. N’épiloguons pas.

 

 

Quelles sont les deux toiles qui ont retenu l’attention du roi Chulalongkorn ?

 

Lucien-Hector Jonas

 

 

Jonas était un homme du nord, né à Anzin en 1880. Quoique d’une famille aisée – son père est distillateur – il n’a pas oublié le noir pays des mines et deviendra le peintre de la mine. Sa toile intitulée « les Rouffions » lui valut sa 2e médaille, une bourse de voyage pour Bangkok et fut acheté par le Roi de Siam. Cette œuvre, brossée avec énergie, est le premier de ses tableaux qui a conquis le grand public. Il reçoit également les éloges de la critique artistique. Nous vous donnons quelques extraits car nous avons cherché à comprendre ce qui pouvait avoir retenu l’attention du roi (4).

 

Jusqu’à sa mort en 1947, il vola de succès en succès (5).

 

 

Henri-Léon Jacquet

 

Quoiqu’admis plusieurs années de suite au Salon, c’est Émile Langlade qui nous apprend incidemment que « la Procession de matelottes au Courgain », avec sa Vierge dorée, ses bannières  et ses petites filles couronnées de roses artificielles, aurait également été achetée par le Roi de Siam. C’est un sujet que Jacquet semble avoir traité à plusieurs reprises ? Elle a en tous cas fait l’objet d’une diffusion par carte postale  même si Jacquet n’a pas connu le succès de Jonas. Nous savons peu de choses sur lui. Né en 1856, il reste néanmoins la « mémoire » de Courgain, un quartier de Calais proche du port.Quoiqu’admis plusieurs années de suite au Salon, c’est Émile Langlade qui nous apprend incidemment que « la Procession de matelottes au Courgain », avec sa Vierge dorée, ses bannières  et ses petites filles couronnées de roses artificielles, aurait également été achetée par le Roi de Siam. C’est un sujet que Jacquet semble avoir traité à plusieurs reprises ? Elle a en tous cas fait l’objet d’une diffusion par carte postale  même si Jacquet n’a pas connu le succès de Jonas. Nous savons peu de choses sur lui. Né en 1856, il reste néanmoins la « mémoire » de Courgain, un quartier de Calais proche du port.

 

 

Nous pensions avoir eu avions eu un aperçu des goûts du souverain en matière d’art ? Il s’était adressé au peintre provençal Marius Fouque pour lui commander une copie du tableau de G.L. Gérôme représentant la réception de l’Ambassade siamoise à Fontainebleau en 1861 (6). Lors de sa visite de 1907, il avait posé chez le très classique Carolus Duran, portraitiste de toutes les notabilités de la IIIe république qui ne donnait pas dans la fantaisie. Les peintres italiens qui participèrent à l’embellissement de sa ville et de ses palais ne donnaient pas non plus dans l’avant-garde  (7).

 

 

Or, voilà deux sujets choisis, l’un représentant une manifestation sous drapeaux rouges au son de l’Internationale 

 

 

et l’autre une procession religieuse sous la protection de la Vierge au son de cantiques très catholiques qui paraissent bien étrangers à un monarque oriental.

 

 

Il n’y a selon nous une explication et une seule. Voulant faire connaître à ses proches ses impressions sur son voyage en France, il était deux événements qu’il ne pouvait aller photographier malgré sa dilection pour cet art, une manifestation de « rouges » et une manifestation religieuse. Ce sont en quelque sorte les diapositives des souvenirs de vacances avant la lettre. Ce ne sont donc pas des « achats de fantaisie » comme le pense Langlade. Il en est d’ailleurs une forte présomption : le catalogue de l’exposition donne quelques centaines de reproductions des toiles exposées, essentiellement des portraits, des paysages ou des nus très académiques. Ce sont les deux seules toiles réalistes représentant des scènes du quotidien, de véritables photographies de reportage.

 

 

Par ailleurs, quelles que soient leurs qualités, rigueur et équilibre dans la construction, nuances délicates, trait précis et détails soignés, on imagine mal un amateur en décorant son salon alors qu’elles convenaient parfaitement à la décoration d’une Bourse du travail ou d’une salle du catéchisme.

 

Nous ignorons totalement ce qu’elles sont devenues et si elles se trouvent toujours dans quelque coin retirés du Palais royal ?

 

 

Nos deux artistes ne sont pas inconnus des salles de vente : Jonas dont la production fut abondante, de quelques centaines d’euros (affiches ou lithogravures) à quelques milliers pour les toiles,

 

« Rue de Dinan » 3.000 euros  :

 

 

les toiles de Jacquet qui fut moins productif et aurait terminé sa carrière comme professeur, également. Ce sont des prix de toiles de « petits maîtres ».

« Odalisque » 2.600 euros :

 

 

NOTES

 

 

(1)  Voir notre article 151. « Introduction aux lettres du Roi Chulalongkorn envoyées d'Europe en 1907 In « Klaï Ban (Loin Du Foyer) » :

http://www.alainbernardenthailande.com/article-151-introduction-aux-lettres-du-roi-chulalongkorn-envoyees-d-europe-en-1907-in-klai-ban-loin-du-f-124500150.html

 

(2) « Catalogue illustré du salon – société des artistes français » pour les années 1903, 1904, 1905, 1906 et 1907 publié sous la direction de Ludovic Baschet, lui-même éditeur d’art et propriétaire du très célèbre magasine « L’illustration ».

(3) « Artistes de mon  temps » fut publié à Arras en quatre volumes.

(4) « La revue intellectuelle des faits et des œuvres – revue des rationalistes  » 1906- 1907, pp 632-633 : 

 

« Les Rouffions de Jonas présentent de belles qualités de composition et d'exécution picturale mais un peu crue. Les Rouffions sont les renégats de la grève que poursuivent les mineurs d'Anzin. L'homme à la face d'épouvante, et la femme à l'air de bête résignée, sont meurtris, sanglants, les habits en lambeaux arrachés par des mains vengeresses, les torses sont nus, de chair laborieuse. La foule clame l’internationale. Une femme au premier plan, un gamin sur les bras, deux mômes à ses trousses, brandit un drapeau rouge. C'est le choc de basses mentalités ; mais, celle de la foule a plus d'excuses qu'on ne croie, car, le rouffion est généralement, un être vil, par ignorance ou bas égoïsme, quelque peu Judas. Allez, il y a du plomb dans les deux plateaux de la balance. Ce n'est pas le, drame du bien et du mal, qui se déroule sur ce champ de grève, c'est l'épopée de l'ignorance commune. Des deux côtés, en rentrant à la maison, les enfants crieront qu'ils ont faim. Le rouffion répondra : « Quand il n'y aura plus de grève » ; le gréviste, dira : « quand il n'y aura plus de rouffions. » Mais tous les ouvriers ne sont pas nécessairement des justiciers féroces ou des mouchards et dans la toile de Jonas même, regardez bien, il y a, à l'insu de l'artiste peut-être, autre chose que de la vengeance ».

 

« Le petit journal  - supplément illustré » du 15 septembre 1907 :

« Les « Roufions »  ?... Qu'est-ce que les Roufions ? « Roufion » est un vieux mot que le patois de nos régions septentrionales a dû garder du temps de l’occupation espagnole. Vous savez ce qu'est un « ruffian » dans la Péninsule ?... C’est un paresseux, un parasite, un homme qui vit aux dépens d’autrui. C'est le sens même du mot « roufion » dans le patois du Nord. « Roufion » est synonyme de « fainéant », et, comme il est constant que les grévistes appellent « fainéant » - par antiphrase, sans doute - l’ouvrier qui continue à travailler, voilà comment s'explique le titre de ce tableau.  C'est une scène de grève de mineurs, malheureusement trop fréquente dans les milieux houillers où quelque conflit a éclaté entre le capital et le travail. Un ouvrier est descendu à la mine, malgré l’ordre du syndicat ; sa femme est allée l'attendre à la sortie du puits. Une bande de grévistes chantant l'Internationale, drapeau rouge en tête, les surprennent et les coups pleuvent sur les « roufions », sur les « fainéants », sur les « faux frères » qui ont commis le crime de vouloir gagner quand même le pain de leur famille...Cette toile qui fit sensation au dernier Salon des Artistes français, non seulement pour sa conception hardie, mais pour le réalisme vigoureux de son exécution, est d' un jeune peintre du plus bel avenir. M.  Lucien Jonas, qui est originaire d' Anzin, le pays des houillères, n'a que vingt-sept ans. Elle valut à son auteur une seconde médaille et une bourse de voyage. Ajoutons qu’elle fut achetée par S. M. Chulalongkorn, roi de Siam, pour son palais de Bangkok ».

 

(5) Il devint le peintre de la guerre de 14 dessinant inlassablement pour la revue « L’illustration » dont les lithographies en couleur tout au long de la guerre, scènes de guerre, portraits de nos héros, ornaient les murs de toutes les maisons françaises ainsi que de nombreuses affiches de propagandes.

 

 

Il dessina encore des billets de banque ce qui lui valut après la légion d’honneur l’ordre de la francisque pendant la deuxième guerre mondiale pour le billet de 100 francs représentant Descartes.

 

 

Resté « peintre de la mine », il dessine encore le billet de 10 francs après la guerre représentant un mineur.

 

 

Son tableau primé a été reproduit sur carte postale surabondamment diffusée dans le monde de la mine. Un de ses tableaux représentant un mineur agenouillé portant une barrette et une lampe, a été choisi pour illustrer le timbre commémoratif intitulé Hommage aux mineurs - Courrières 1906-2006,

 

 

pour le centenaire de la catastrophe minière de Courrières.

 

 

(6) Voir notre article A 158 « Marius Fouque, Un Arlésien "peintre officiel" du Roi Rama V » :

http://www.alainbernardenthailande.com/article-a158-marius-fouque-un-arlesien-peintre-officiel-du-roi-rama-v-124191766.html

 

(7) Voir notre article A 245 « LES PEINTRES ET LES SCULPTEURS ITALIENS AU SIAM SOUS RAMA V ET RAMA VI » :

http://www.alainbernardenthailande.com/2017/10/a-244-les-peintres-et-les-sculpteurs-italiens-au-siam-sous-rama-v-et-rama-vi.html

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