Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : Le blog des Grande-et-petites-histoires-de-la-thaïlande.over-blog.com
  • : Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.
  • Contact

Compteur de visite

Rechercher Dans Ce Blog

Pourquoi ce blog ?

  Il était une fois Alain, Bernard …ils prirent leur retraite en Isan, se marièrent avec une Isan, se rencontrèrent, discutèrent, décidèrent un  jour de créer un BLOG, ce blog : alainbernardenthailande.com

Ils voulaient partager, échanger, raconter ce qu’ils avaient appris sur la Thaïlande, son histoire, sa culture, comprendre son « actualité ». Ils n’étaient pas historiens, n’en savaient peut-être pas plus que vous, mais ils voulaient proposer un chemin possible. Ils ont pensé commencer par l’histoire des relations franco-thaïes depuis Louis XIV,et ensuite ils ont proposé leur vision de l'Isan ..........

(suite cliquez)   POURQUOI CE BLOG ?

Pour nous contacter . alainbernardenthailande@gmail.com

Merci d’être venu consulter ce blog. Si vous avez besoin de renseignements ou des informations à nous communiquer vous pouvez nous joindre sur alainbenardenthailande@gmail.com

8 août 2018 3 08 /08 /août /2018 22:26

 

La lecture de multiples ouvrages sur le Siam, son histoire, sa géographie et ses mœurs peut nous intéresser, parfois nous passionner, parfois nous irriter mais rarement nous faire sourire. La lecture du roman d’Albert Robida (1) « Voyages très extraordinaires de Saturnin Farandoul à la recherche l'éléphant blanc » y est parvenu. Nous sommes en 1879, La France et le Siam se sont retrouvés sous le second Empire avoir des rapports (presque) harmonieux après les rapports pathologiques terminés en 1688. Il règne une incontestable vague de « siamomanie » qui fait naitre une vague de souvenirs de voyages qui ne donnent pas toujours dans la littérature humoristique !

L’ouvrage de Robida abondamment illustré est  le quatrième d’une série de cinq mais il nous faut  avant de passer à la lecture des aventures ou plutôt des mésaventures de Farandoul et de l’éléphant blanc les survoler au moins en style presque télégraphique.  Nous allons trouver successivement  « le Roi des Singes »,

 

 

« le Tour du Monde en plus de 80 jours »,
 

 

« les Quatre Reines »,

 

 

notre « Recherche de l'Éléphant blanc » et « Son Excellence Monsieur le Gouverneur du Pôle Nord ».

 

 

Nous nous promenons dans des mondes fantastiques et délirants. Farandoul, ses deux amis Tournesol le Marseillais et Mandibule le Provençal accompagnés de quinze marins ont visité les cinq continents, les îles du Pacifique, le Pôle Nord, le fond des mers, le sein des nuages, les espaces interplanétaires jusqu’à la planète Saturne.

 

Jeté dès son plus jeune âge au milieu d'aventures inouïes Farandoul fut naufragé à quatre mois et demi, recueilli par une honnête famille de singes habitant une île de la Polynésie qui le soigne comme un fils ce qui inspirera peut-être Edgar Rice Burroughs, le créateur de Tarzan.

 

 

A onze ans, il est recueilli par le capitaine Lastic et devient son fils adoptif. Devenu capitaine à son tour, poussé par son amour des aventures, il quitte bientôt l'île des singes,  rencontre d'honnêtes marins dont il partage les dangers et les fatigues. Attaqués par d'affreux pirates malais, Farandoul sauve ses compagnons par son intrépidité et sa sagacité.

 

 

Il tombe éperdument amoureux de la belle Mysora, fille d’un rajah à laquelle il donne des rendez-vous en scaphandre, à vingt-trois mètres au-dessous des flots.

 

 

Interviennent alors une baleine et le savant Croknuff, directeur de l'aquarium de Melbourne, archétype de l’un de ces multiples savants fous que l’on retrouve chez Jules Verne et tombé amoureux de Mysora.

 

 

Il délivre Mysora retenue captive quatre ans dans cet aquarium avec l'aide d'une armée de singes, et du capitaine Némo rencontré au passage, ayant dû déclarer pour cela la guerre à l'Australie. A la tête de son armée de quadrumanes, il vole à la conquête de l'Australie sur les bimanes anglais.

 

 

Il explore les deux Amériques, puis l'Afrique. Après avoir été roi des singes et dictateur des bimanes, évêque mormon, peintre sur sauvages,

 A  262 - VOYAGES TRÈS EXTRAORDINAIRES DE SATURNIN FARANDOUL À LA RECHERCHE L'ÉLÉPHANT BLANC

grand cacique général en chef, dieu chez les nègres, Farandoul devient, en Asie mikado au Japon après avoir été presque colonel des amazones du roi de Siam ; il est avec ses amis condamné à mort un peu partout en Asie et  même jusque dans la planète Saturne où il affronte les Saturniens.

 

 

Jamais, on le voit, héros de roman n'a eu une existence mieux remplie. Par un hasard fatal, il se heurte toujours à l'un des héros de Jules Verne, les mythiques personnages de Jules Verne qu’il encanaille. Tous ces ouvrages sont remarquablement enluminés et illustrés par Robida lui-même (2).

 

 

Nous allons retrouver nos aventuriers sur les côtes africaines avec l'intention de prendre passage sur le premier paquebot venu à destination d'un rivage quelconque de la merveilleuse Asie. C’est un numéro du Times parcouru par Farandoul d’un œil distrait qui les a décidés, un entrefilet en première page :

 

DISPARITION MYSTÉRIEUSE DE L'ÉLÉPHANT BLANC DU ROI DE SIAM.

 

En conséquence, la gazette officielle de Bangkok a publié un décret royal  promettant une récompense de 20 millions de ticaux, ou 60 millions de francs, ou 2 millions 400,000 livres sterling à qui ramènerait l'éléphant blanc au palais de Bangkok à l’instigation de  S. Ex. Nao-ching„ mandarin de la police, désespéré de l'insuccès des  recherches. La récompense est belle; mais nous devons dire que, selon nous, les recherches rencontreront bien des difficultés dans ce mystérieux monde asiatique, si même elles aboutissent jamais.

« Correspondance spéciale de Bangkok. »

 

La décision est prise par les 18 et en avant ! 

Tournesol électrisé ajoute et bagasse  !  (2)

 

 

LES AVENTURES AU SIAM ET PREMIÈRES CONDAMNATIONS A MORT

 

Embarqués à Port Saïd avec leurs derniers sous  sur un navire anglais en première classe, ils débarquent après quelques semaines à Bangkok.

 

L'agitation extraordinaire causée par la disparition de l'éléphant blanc était loin d'être calmée. Talapoins et talapouines chargés des choses du culte se frappaient la poitrine et poussaient le désespoir jusqu'à négliger de recueillir les offrandes des fidèles !

 

Il faut courir au palais de son Excellence Nao-ching, mandarin de la police. On le retrouve en train de faire la sieste au bord de son bassin. Son extrême réticence à renseigner nos amis laisse planer un doute, il veut retrouver l'éléphant lui-même et palper les 60 millions !

 

 

Il faut donc aller voir le roi. Le palais est gardé par les amazones habillées d'un caleçon court, d'une veste et d'un képi rouge. Les marins, veulent entrer à force ouverte mais arrive la colonelle des amazones accompagnée de mandarins qui promirent une audience pour le mois suivant. Farandoul  qui s’est muni d’un interprète,

 

 

gardé par une escorte de douze amazones, passe ainsi six heures dans le palais à courir inutilement de mandarins en mandarins dans une ambiance hostile. Pendant ce temps, Mandibul, Tournesol et les marins plaisantaient avec les amazones. La colonelle a sympathisé avec Farandoul  et réussit tout de même à l’introduire avec ses amis auprès du roi.

 

 

Tous réunis militairement, ils pénètrent dans le palais sur les pas de la colonelle. En attendant le passage du roi, au milieu des amazones, Tournesol et quelques matelots, natifs des contrées brûlantes du Midi, sentaient un certain trouble monter à leur tête. Arrive alors Nao-ching qui les introduit par une porte. C’était un piège tendu par l’infernal mandarin qui les a ainsi introduit dans le harem royal. Le crime est irrémissible, c’est la mort. Arrive alors le roi, et derrière lui une foule de gardes et de grands dignitaires, parmi lesquels Nao-ching,  la figure illuminée d'un infernal sourire. Le scandale causé par l’intrusion des étrangers dans le harem est immense.

 

 

L’interprète explique alors à Sa Majesté qu’il s’agit d’une erreur dont la faute est celle du ministre de la police.  En conséquence, sa Majesté dans son immense bonté consent à ne pas faire périr les intrus immédiatement mais leur accorde la grande faveur d’être jugé selon les lois. Ah ! grand merci de la faveur... enchanté dit Farandoul à l’interprète mais explique au roi le but de notre visite, dis-lui que nous venions lui proposer de nous mettre à la recherche de l'éléphant blanc ?  Ces paroles furent accueillies avec un redoublement  de cris. Farandoul  décide alors de sa barricader dans le harem, qu'ils viennent nous prendre ! Nous sommes entrés dans les appartements des femmes du roi, eh bien, restons-y  ! la place est bonne, nous nous défendrons à outrance.  Curieusement, ni les gardes ni les amazones ne passent à l’attaque ? La raison en est simple explique l’interprète : Les prescriptions de la religion sont formelles ! Le roi est une émanation de Bouddha, ses 800 femmes participent à sa sainteté et sont considérées comme une parcelle de la divinité, émanation de l'émanation suprême ! Tout être humain qui pénètre dans les appartements est criminel de lèse-divinité et doit périr dans les tourments. Voilà pourquoi personne n'ose venir nous arrêter.

 

Nos amis s’installent, il y a des vivres, quand il y a à manger pour huit cent, il y a bien pour huit cent vingt. Les épouses ne sont pas effarouchées et Farandoul peut s’inviter à leur table. Il faut toutefois respecter la hiérarchie, les marins restent assis par terre. Farandoul et Mandibul furent seuls admis à la table des cinquante épouses de première classe, le reste des marins partagea le repas des épouses des rangs inférieurs.

 

 

Dans l'après-midi un grand bruit annonce l’ouverture d’une cérémonie, le procès mené par les bonzes de la grande pagode de Wat-chan. Nos amis sont sommés de se livrer au tribunal, mais sur leur refus, on se contenta de leur présence aux fenêtres du sérail pour ouvrir les débats. Farandoul explique leur entière bonne foi et Nao-ching rétorque en soulignant l'horreur du crime commis contre les lois religieuses. Après une courte délibération entre les bonzes et les ministres, l’assemblée condamna les coupables à avoir la tête tranchée par le sabre, pour ce crime atroce, inouï et à jamais exécrable d'avoir pénétré dans les appartements sacrés de la première épouse de première classe Lang-lo-chang. Il fallut ensuite statuer sur le crime d'avoir pénétré dans les appartements sacrés de la seconde épouse de première classe Kaïlaa…. Restons-en là, en deux heures, les marins furent encore condamnés à avoir la tête tranchée pour avoir pénétré dans les appartements sacrés de la quatrième, de la cinquième, de la sixième et de la septième épouse de première classe. Nous arrivons à un total de huit cent condamnations à la décollation au terme d’un procès qui durera en définitive plusieurs jours.

 

 

Tournesol indigné s’impatiente à tel point que, se considérant outragé, le Tribunal des bonzes prononce une  nouvelle condamnation pour lui, ce sera le pal.

 

L'interprète lui ayant expliqué la chose, Tournesol s'en alla tout fier de cette flatteuse distinction.  

 

 

Mais tout se passe bien au sein du harem puisque parmi les gardes nul n’ose pénétrer dans les appartements pour appréhender les condamnés, ce serait commettre un crime de lèse-majesté et encourir la mort !

 

Farandoul résuma la situation  Nous sommes condamnés à subir huit cents fois la décollation, plus quelques bagatelles pour l'un de nous, c'est très bien. Mais l'exécution de vos sentences va rencontrer quelques difficultés : 1° vous ne pouvez venir nous appréhender au corps sous peine d'encourir les mêmes châtiments et 2° nous n'avons pas du tout l'intention de nous livrer nous-mêmes!   Nous allons donc nous installer dans les appartements sacrés, y organiser notre vie le plus agréablement possible; les distractions ne nous manqueront pas; pendant ce temps, votre éléphant blanc que nous voulions retrouver aura tout le temps de disparaître à jamais, et votre monarque sera plus gêné que nous ! J’ai dit.

 

La situation est donc inextricable. Les marins préféreraient rester toute leur vie dans les appartements sacrés au milieu des huit cent épouses. L'horizon politique est sombre. Le roi, après huit jours de réflexion, ne vit plus qu'un moyen pour terrasser l'hydre de l'anarchie, reconquérir la tranquillité de son intérieur et surtout retrouver ses huit cent épouses, négocier avec les marins, leur offrir leur grâce et les lancer à la poursuite de l'éléphant sacré. Il ne demandait toutefois qu’une chose, c’est que, une fois grâce rendue pour les huit décollations, le supplice du pal fut maintenu, la population ayant grande hâte d’y assister.  Tournesol n’est évidemment pas d’accord mais il finit par obtenir sa grâce.

 

Le roi conduisit alors Farandoul au temple de l'éléphant blanc, lui remit une photographie grandeur naturelle de l'animal sacré pour servir aux constatations d'identité et maintient le chiffre de la récompense. Les marins doivent à regret faire  leurs adieux aux huit cents épouses sacrées bien que Tournesol prétendait y reste seul. Mais surgit un nouveau rebondissement, une révolte populaire vient d’éclater susciter par l’infâme Nao-ching et conduite par les amazones qui réclament l’exécution du jugement, le peuple furieux d’être privé de spectacle de huit cent décapitations et surtout d’un empalement.

 

 

Farandoul organise la défense du palais avec ses marins mais trouve un stratagème en accord avec le roi qui souhaite éviter un affrontement armé : Dans les écuries royales et sous les yeux du monarque, il fit tout simplement de la peinture : Des pots de blanc de céruse étaient disposés sur le sol. Lui-même et quatre marins armés de gigantesques pinceaux s'escrimèrent à couvrir de peinture un éléphant de grande taille en train de manger du sucre dans la main du roi. La tête seule restait, c'était le plus difficile. Farandoul s'en chargea, et pendant que l'on achevait les jambes, il badigeonna le crâne et la trompe de l'intelligent animal avec un art infini et un souci des nuances à rendre jaloux un miniaturiste. Pour remédier à l'odeur de peinture, Farandoul fit brûler une grande quantité d'encens dans des cassolettes disposées devant l'éléphant. Tout était prêt. Au vu de l’éléphant sacré, la révolte s’apaisa et  une longue file de population s'en vint présenter ses hommages à l'animal.

 

 

Farandoul et ses marins vont-ils enfin pouvoir quitter le palais ?

 

Catastrophe ! Le ténébreux Nao-ching et la colonelle des amazones s’étaient aperçus de la supercherie en caressant la croupe de l’éléphant et retirant leur main pleine de peinture.

 

Farandoul, Mandibul, Tournesol et les marins sont jetés dans une salle de police qui leur fait regretter les appartements sacrés. Mais un miracle survint. La colonelle avait un cœur de femme et était tombée en amour pour Mandibule. Nos amis sont à nouveau délivrés. Mandibule en effet, une fois ses liens détachés par la colonelle et lui-même ayant détaché  ceux de ses amis, s’empresse avec ingratitude de ficeler celle-ci à son tour. Galant homme tout de même, il dépose un baiser sur son front. Il revêt ensuite son uniforme, trouve la réserve du régiment et s’empresse de faire revêtir ses amis et l’interprète toujours fidèle des uniformes d’amazones.

 

 

Pour assurer leur fuite, ils choisissent dans les écuries royales six éléphants parmi les plus beaux et pour éviter que les gardes ne retrouvent leur trace et partent à leur poursuite, ils s’empressent de les enivrer au lait de coco fermenté.

 

 

La troupe, trois sur chaque animal, peut partir en direction du nord-ouest. L’intention de Farandoul est de se diriger vers Ayuthaya, remonter  le grand fleuve le Mae-Nam, la mère des eaux, jusqu'à Bank-Ta, où l'on pourrait passer à gué pour se diriger ensuite vers la Birmanie. Quelques mots saisis par l'interprète dans une conversation entre le mandarin de la police et la colonelle des amazones et rapportés à Farandoul lui avaient fait comprendre que l’animal sacré avait été volé par des pirates, vendu à l'empereur des Birmans et se trouverait à Amarapoura, la capitale située sur l'Irawady, le grand fleuve, à deux cent cinquante lieues de Bangkok. Il s’agirait alors  de chercher dans les temples, d'y découvrir l'éléphant et de l'enlever pour le ramener à son légitime propriétaire.

 

Pendant la nuit l’infâme mandarin de la police avait vaqué aux préparatifs de l'exécution, la foule entourant plus spécialement le pal destiné à Tournesol. On trouve la colonelle ficelée, on s’aperçoit de l’évasion. Les gardes se précipitent pour partir à la recherche des fugitifs mais tout le parc des éléphants est plongé dans un état d'ivresse indescriptible. Il fallut trois jours pour dessouler les animaux, toute poursuite est inutile. La colonelle paya pour eux et fut cassée. Seul, le mandarin de la police était parti derrière eux avec quelques hommes sur des éléphants à lui. 

 

                                                                                         

La suite de ce quatrième volume va se poursuivre sur ce rythme effréné. Nous ne citerons que les épisodes les plus marquants avant que – heureuse fin – nos amis retrouvent l’animal sacré presqu’intact et le coupable du forfait.

EN BIRMANIE, AUX INDES  ET AU TIBET

 

L’éléphant a quitté la Birmanie pour les Indes et se trouverait dans la ville fictive de Kifir. Pourquoi de tout ce récit de voyage Robida masque-t-il le nom de cette seule ville ? C’était pour voiler un lourd secret et éviter des morts cruelles : En effet le Rajah de l’état Nana-Sirkar était mort depuis douze ans. Son premier ministre souhaitait conserver son pouvoir et surtout ses quarante épouses ...

 

 

... avaient un intérêt sérieux à le conserver en bonne santé, il s'agissait pour elles d'éviter le saty, c'est-à-dire d'être brûlées avec lui le jour de ses funérailles, l’usage  de brûler les veuves s'étant conservé à Kifir

 

 

Ses tendres épouses l’avaient tout simplement fait empailler. Il avait fallu l'œil perçant de Farandoul pour découvrir la fraude, il y avait intérêt lui aussi ce qui réduisait à néant la condamnation à mort que le Rajah était censé avoir prononcé à son encontre et à celui de ses amis pour être entré sans autorisation dans ses états : encore une douceur asiatique, être écorchés vivants avec une sage lenteur, de façon telle que le supplice dure jusqu'à la fin des fêtes, c'est-à-dire pendant trois jours.

 

 

Au Tibet, nos amis vont toutefois être victime d’un nouvel incident fruit de leur méconnaissance des coutumes locales : Ignorant que dans ce pays contrairement à celui des Turcs, les femmes peuvent avoir autant de maris qu’elles le désirent, la fille d’un chef de village séduite par leur prestance demande la main de Farandoul, de ses amis et même de l’interprète. Devant un refus humiliant pour les Tibétains, il faut prendre la fuite en direction de la Chine.

 

 

EN CHINE

 

Nos amis doivent voyager en brouette à voile, seul moyen de locomotion,  pour suivre l’éléphant à la trace jusqu’à Nankin où l’animal sacré a été signalé.

 

 

Une première fois, ils manquent de peu l’éléphant que les voleurs avaient cette fois-ci recouvert d’une couche de vermillon. L’armée chinoise est chargée d’arrêter les barbares mais ne peut s’y opposer, armée seulement de fusils à rouet.

 

 

L’animal est signalé dans une superbe pagode flanquée d'une haute tour de douze à quinze étages. Les marins s’en approchent, la nuit. Ils enfoncent la porte à l’aide d’un lourd bélier. La tour entière, la fameuse tour de porcelaine tout d’une pièce s’écroule sur le dos des envahisseurs et sur l’éléphant sacré.  

 

 

Les Chinois retrouvent nos amis sous les décombres, ils sont naturellement emprisonnés, cangue au cou et chaine au pied. Le procès est expédié, les coupables étaient condamnés à subir, sous trois jours, le terrible supplice des quatre-vingt-dix-huit mille morceaux réservé jadis aux criminels de lèse-majesté qui n'avait pas été appliqué depuis huit cents ans.

 

 

Farandoul reçoit avec un vif intérêt la visite du bourreau primé sur concours pour avoir retrouvé la tradition exacte du curieux supplice.

 

 

Cette machine fonctionne à la main. Farandoul qui l’a trouvé sympathique lui donne son avis « C'est parfait,, je ne vois qu'une petite amélioration, à votre place je la ferais marcher par la vapeur »... « J'y ai déjà songé vaguement »  répondit le bourreau « mais vous savez, en Chine, on n'aime pas les novateurs, je me ferais des ennemis... cependant j'y songerai, et je ne désespère pas, avec le temps, de faire triompher votre idée ».

 

 

Nos amis vont évidemment réussir à s’évader après avoir abruti leurs gardiens en leur faisant consommer l’ « opium du condamné » équivalent en quelque sorte de notre cigarette et du verre de rhum, trouvé les clefs des cangues et ensuite attachant les gardiens entre eux avec leur natte.

 

L’éléphant serait parti vers la Japon, en route pour le Japon après évidemment d’innombrables péripéties sur terre et sur mer.

 

LE JAPON

 

Farandoul a acquis la certitude que les pirates avaient dû débarquer dans les États du prince Miko, un des plus puissants daïmios feudataires de l'empire du Japon, prince à peu près indépendant et très hostile aux Européens. Cap sur Yokohama. Leur premier soin de nos amis en débarquant, fut d'endosser des armures japonaises. Croisant un cortège, Farandoul est ébloui par la charmante apparition d’une Japonaise de dix-huit ans…Il fait route avec elle main dans la main, formalité considérée comme un véritable mariage. Erreur fatale, c’était la fiancée du prince Kaïdo. Nos amis sont emprisonnés. Après d’autres invraisemblables péripéties, les voilà condamnés à périr dans la graisse bouillante.  Périr dans la friture, soit pensent Tournesol et Mandibul, nos deux méridionaux mais au moins dans l’huile ! En Provence, on cuisine à l’huile. Ils échappent toutefois à la cuisson dans la graisse ou dans l’huile car le prince Kaïdo pardonne et fait de Farandoul son premier ministre. Il lui apprend que l'éléphant blanc se trouve dans le temple des trente-trois mille trois cent trente-trois génies.

 

Mais d’autres péripéties, nous vous en épargnons le détail, conduisent toutefois à nouveau nos amis en prison. La peine de mort est demandée et naturellement prononcée. Compte tenu de ses services antérieurs, il est décidé que Farandoul doit périr en vrai chevalier, en courageux guerrier et d’une main ferme s’ouvrir le ventre, deux incisions en croix, vlic et vlic et c'est fini I On lui fait même l’honneur de lui remettre à cette fin un superbe sabre à lame trempée et damasquinée pourvue d'une poignée splendide enrichie de diamants. Mais le sabre va permettre à Farandoul suivi de ses amis de se frayer un chemin parmi les ennemis. Le temple aux trente-trois mille trois cent trente-trois génies n’était pas loin. Et ils s’y emparent de l’éléphant. Bravo ! Les millions du roi de Siam sont gagnés ! Pas encore ! Encore une fois nous retrouvons les mêmes pirates qui ont eu le temps de charger  l’éléphant sur l’un de leurs bateaux. Debout sur le tillac leur chef nargue Farandoul « Je vais toucher les millions du roi de Siam, adieu et merci pour nous avoir amené l'éléphant vous-mêmes »

 

 

RETOUR IMPRUDENT EN CHINE EN PASSANT PAR LA CORÉE À LA POURSUITE DES PIRATES

 

Une tempête va envoyer les deux vaisseaux, celui des pirates et celui de nos amis, se briser sur les côtes de Corée. L’éléphant  en a profité pour prendre la fuite ! On sait toutefois que, nouvelle ruse des pirates, ceux-ci l’avaient peint en gris ! On poursuit les pirates jusqu’en Chine. Nos amis avaient oublié qu’ils y avaient un casier judiciaire chargé. Ils sont reconnus et enfermés en cage avant d’être expédiés à Pékin en hommage à l’Empereur. Farandoul, les forces décuplées par la rage, réussit à s’en extraire. Il libère ses amis, ils assomment les gardiens qui somnolaient,  endossent leurs uniformes et s’emparent de leurs armes. Et, divine surprise, une foin traversée la Grande Muraille, ils trouvent les pirates qui, affamés, se disputaient pour savoir s’ils n’allaient pas manger l’animal sacré ! Affaiblis par la famine, ils ne résistent pas à l’assaut de nos amis et rendent les armes. On reconnait leur chef, c’était, nous nous en doutions, l’infâme Nao-ching : « J'avoue tout ! Mes appointements étaient si rarement payés et la vie est si chère ! J'ai trente-quatre femmes à nourrir, messieurs, ne perdez pas un père de famille !... je suis bien coupable, je l'avoue. C'est moi qui ai volé l'éléphant de Sa Majesté le roi de Siam, c'est moi qui l'ai vendu à l'empereur des Birmans, puis au radjah de Kifir, puis aux bonzes chinois, puis au prince de Miko ! Mais je me repentais, messieurs! Le remords m'avait saisi et je le reconduisais à Siam... »  

 

Entretemps, l’éléphant, animal intelligent, galopait en liberté vers le désert de Gobi, loin des voleurs et loin de ceux qui s'étaient donné tant de peine pour le retrouver !

 

DANS LE DÉSERT DE GOBI ET SUR LES RIVES DU LAC BAÏKAL

 

Les chemins sont difficiles, rien à manger que des plantes de rochers ou quelques maigres ours de Mongolie. L’éléphant conduit ses poursuivants jusqu’aux frontières de la Sibérie. Il s’amaigrit de jour en jour. Le froid devient sibérien. Nos amis parviennent à le cerner et le capturer au lasso. Réfugiés dans une Isba, ils y trouvent un grand gaillard à tournure d'officier russe, aux grandes moustaches et à la barbe longue. Cet homme se nommait Michel Strogoff, il fuyait devant les hordes tartares et cherchait à gagner Irkoutsk menacé par elles. On fraternise et on partage le peu de viande d’ours qui restait.

 

 

On va enfin passer une nuit de bon sommeil. Mais un bruit réveille Farandoul,  l'éléphant, monté par une espèce d'ombre, s'enfonçait dans le brouillard. Mandibul trouve à la place que Strogoff avait occupé un papier contenant ces simples mots :

 

« Je mets en réquisition l'éléphant blanc pour le « SERVICE DU CZAR.   « Michel STROGOFF, Courrier impérial. »

 

Dans la neige toutefois, les traces de l’éléphant sont faciles à suivre. Nous n’échapperons évidemment pas à une poursuite par des loups affamés. Sur les bords du lac Baïkal se distinguait une masse blanche acculée aux rochers. C'était l'éléphant toujours monté par Michel Strogoff, d’une immobilité effrayante. Le groupe était gelé.

 

 

La trompe du pauvre animal était déjà tombée sur le sol. On put descendre Strogoff de la monture sans le casser. Mais l’éléphant n’était pas tout à fait gelé, un immense feu le ranime. On fait chauffer des couvertures, on le ranime, on lui fait avaler une grande marmite de thé vert ramené de Chine par l’un des matelots. Il est presque sur pied, toussant un peu et surpris de la disparition de sa trompe.

 

 

Strogoff de son côté, à moitié rôti par le feu, était revenu à lui et eut sa part des marmites de thé offertes à sa victime. Dur comme un Sibérien, il n’a pas trop souffert mais pour lui éviter le sort de la trompe, on lui met des attelles, le cerclant comme un tonneau. Il peut poursuivre sa route vers Irkoutsk. Le rhume du pauvre éléphant était d'une gravité qui frisait la fluxion de poitrine fut soigné par Mandibule qui possédait quelques connaissances en botanique et, parti à la recherche de certaines plantes, pu lui confectionner quelques seaux de tisane. Il ne souffrait plus moralement que de la perte de sa trompe.

 

LE RETOUR TRIOMPHAL

 

Le retour va enfin pouvoir se dérouler paisiblement. La troupe atteint Hing-hing, pointe septentrionale de la Corée sur la mer du Japon.  Elle réussit à affréter une jonque capable de porter le précieux éléphant qui sera tout de même victime du mal de mer.

 

 

Mais il retrouve le soleil, son pays natal et une foule immense qui l’attendait.

 

Dans le groupe des autorités qui s'avançait pour recevoir nos amis, Farandoul aperçut au premier rang la figure bien connue maintenant de l'auteur de tous les maux du pauvre éléphant, du malfaisant qui l'avait enlevé de Bangkok et promené de ville en ville par toute l'Asie, Nao-ching. Il avait eu l’audace en les quittant de revenir prévenir sa Majesté Siamoise du prochain retour de l’éléphant. Robida connaissait peut-être un peu les Siamois puisque le ministre ne craint pas de demander  à Farandoul de lui réserver « une petite commission de cinq pour cent ». Mandibule se réconcilie avec la colonelle.

 

Des fenêtres du harem tombe une pluie de roses. Il ne restait plus à nos amis qu'à rendre une visite au mandarin des finances. On toucha les soixante millions de récompense en bon or européen chez le mandarin des finances sans verser sa « petite commission » à celui de la police et l’on se décide à s’embarquer rapidement en route pour Calcutta de peur que les Siamois ne se ravisent et de là, la France et Paris, en réalité pour de nouvelles et burlesques aventures.

 

 

Nous sommes bien évidemment dans le domaine rocambolesque de la plus totale fantaisie. Nous n’avons relaté qu’une infime partie des aventures ou plutôt, des mésaventures de Farandoul et de ses amis en dehors du Siam. La série est à la limite de l’image d’Epinal et surtout de la bande dessinée qui la première fois en France fera la joie des enfants sages que les parents ont abonné à l’un des premiers périodiques à leur intention « le petit français illustré », inaugurée par le dessinateur Christophe, son précurseur en France avec son immortel Sapeur Camember  à partir de 1890 avec un humour souvent aussi grinçant que celui de Robida.

 

Nous ne sommes pas éloignés non plus du roman picaresque inauguré en France par le Gil Blas de Lesage au XVIIIe siècle, oublié des romanciers les siècles suivants

 

 

mais nous le retrouvons,  sous une autre forme bien sûr plus adaptée aux patronages, Bibi Fricotin dont les interminables aventures débuteront en 1924

 

 

1924 suivi naturellement de Tintin dont le premier album est de 1929.

 

 

La série n’a fait à notre connaissance l’objet en Italie que d’un film muet Le Avventure Straordinarissime Di Saturnino Farandola, réalisé en 1913 par Marcel Fabre et produit à Turin par Ambrosio Film.

 

Il est disponible sur Youtube et doit évidemment être regardé comme un film muet.

 

 

 

NOTES

 

(1) Qui est Albert Rovida ? Né le 14 mai 1848 à Compiègne, il y passera son enfance et son adolescence, avant de gagner Paris à l'âge de dix-huit ans.  A l'issue de sa scolarité où il a manifesta  très tôt sa passion pour le dessin,  il se retrouvera petit commis d’architecte, c’est là qu’il a dû assimiler les notions qui lui serviront dans ses dessins futurs de ses « vieilles villes » et de leurs monuments. Une belle calligraphie lui procure à seize ans un emploi de clerc ou saute-ruisseau chez un notaire Maître Rouart où il passe son temps à dessiner. Peu intéressé par les tâches de gratte-papier, il met à profit ses moments de loisirs pour dessiner. Il y écrit un irrévérencieux « Le Manuel du parfait notaire »  qui ne sera édité qu’en 1998. 

 

 

Sans rancune, son tabellion de patron lui conseille une autre voie et le présente au  Vicomte de Noé, alias Cham, dessinateur très en vogue de l’époque, sinon le seul, du moins l’un des rares à avoir pris la liberté de caricaturer un royal visiteur,

 

reproduisant  un portrait de Rama V par le peintre arlésien Marius Fouque.

 

Il entame alors une longue carrière de dessinateur et écrivain satirique tout en se lançant dans le roman d’anticipation. Les fameux Voyages extraordinaires de Jules Verne seront pour lui une source d'inspiration (« Le vingtième siècle » est publié en 1883, « La vie électrique » en 1892). Son imagination est aussi féconde – sinon plus – que celle de Jules Verne. Grâce au dessin faisant parfaitement corps avec son texte, « pour servir à l’intelligence du texte » dit-il. Il ne se perd pas en fastidieuses explications ou descriptions qui ne constituent pas toujours le meilleur de l’œuvre de Jules Verne qui, n’ayant jamais quitté sa table de travail, les puisait dans des atlas ou des descriptions de voyageurs. Les « Voyages très extraordinaires de Saturnin Farandoul dans les cinq ou six parties du monde et dans tous les pays connus et même inconnus de M. Jules Verne - Voyages extraordinaires  sont en quelque sorte une cible, une gaillarde surenchère. Il meurt à Neuilly en 1926.   

 

(2) La série n’a jamais été rééditée. Seul « à la recherche de l’éléphant blanc » est numérisé sur le site Gallica de la Bibliothèque nationale. Les quatre autres le sont sur le site californien archives.org

 

(3) Ce juron provençal  actuellement tombé en désuétude  peut – et doit – se traduire tout simplement par oh putain !

 

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

B
très drôles et farfelues ces histoires !! à connaître ....
Répondre
G
De temps en te,ps un peu de fantaisie !
B
très drôles et passionnantes que ces histoires farfelues ! à connaître....
Répondre
B
voilà un roman d'aventures qui me plaît beaucoup !! Merci pour votre travail de recherches !
Répondre