Bhumibol Adulyadej est né le 5 décembre 1927 dans le Massachusetts aux États-Unis. Il devient roi le 9 juin 1946, après l'assassinat de son frère Rama VIII et est couronné le 5 mai 1950. Il décède le 13 octobre 2016, après 70 ans de règne.
Autant dire que les récits possibles sur ce long règne peuvent être différents et variés, et forcément partiels, en considérant que la loi de lèse-majesté veille. (Cf. (1)) Toutefois l'étude de Marie-Sybille de Vienne « Thaïlande, une royauté bouddhique aux XXe et XXIe siècles, que nous vous avons présenté en deux articles, nous apprend beaucoup sur ce règne. (2
Le premier, en étudiant plus particulièrement l'évolution du pouvoir royal et du roi Rama IX durant son long règne du 9 juin 1946 à son décès survenu le 13 octobre 2016 qu'elle a abordé en plusieurs étapes chronologiques, en distinguant la restauration royale et l'urbanisation (1946-1988) ; La fusion royauté-démocratie (1988-2006) et la liquéfaction institutionnelle (2006-2016) ; en notant les différentes interventions du roi dans le champ politique aux moments clés de ses « événements sanglants » (1973, 1976, 1992, 2010), ses crises institutionnelles, et ses multiples coups d'État, en sachant qu' il était impossible de rendre compte de toutes les analyses copieusement annotées du livre. (A 297.)
Puis, dans un second article l'explication du « système royal », qui est un appareil de pouvoir parallèle qui s'articule à travers trois séries d'instruments politiques, économiques et symboliques, à savoir le Conseil Privé du Roi et ses réseaux, la parami et les finances royales et la symbolique royale et la reconnaissance du plus grand nombre. (A 298) (2) ) En sachant que Rama IX a connu 26 premiers ministres et 40 gouvernements et près de 30 coup d'États (armés, silencieux et judiciaires) et rébellions, et 16 constitutions provisoires et définitives. (3)
La vie de Rama IX avant son couronnement.
Après la mort prématurée du père, Mahidol Adulyadej, Prince de Songkla, à 37 ans, la princesse mère a 29 ans et a la charge de 3 jeunes enfants (six ans, quatre ans et un an et neuf mois) (4) .La princesse Galyani Vadhana suit les cours de l'école Rajini. le Prince Ananda fut d’abord scolarisé en 1930 à l’école maternelle Mater Dei tenue par les religieuses catholiques Ursulines, puis en 1932 à l’école Debsirin tandis que le prince Bhumibol resta à l'école maternelle Mater Dei. Mais après la révolution du 24 Juin 1932, qui met fin à la monarchie absolue, la situation est tendue pour les membres de la famille royale qui doivent quitter leurs postes gouvernementaux, et beaucoup décident de quitter le pays pour vivre à l'étranger.
Une sorte de conseil de famille présidé par la Reine Sri Savarindira, sa belle-mère, sa fille, la princesse Valaya Alongkorn, son fils adoptif et le Prince Rangsit, l’ami très cher du prince défunt, se réunit et conseille à la jeune princesse de s'installer avec ses jeunes enfants à Lausanne. En avril 1933, la famille s’envole vers la Suisse avec un entourage restreint. (5)
Après l'abdication du roi Rama VI le 2 mars 1935, l'Assemblée nationale vota pour le nouveau roi, le jeune Prince Ananda Mahidol, alors âgé de 9 ans et étudiant en Suisse et pour le Régent Pridi. Le jeune roi va rester à Lausanne durant trois ans, sous la tutelle de sa mère. Ce n’est qu’au dernier trimestre de 1938, il a 13 ans, que sa famille fait un court séjour de deux mois en Thaïlande avant de retourner en Suisse pour poursuivre ses études. Ils reviennent en Thaïlande à la fin de la seconde guerre mondiale en décembre 1945, Rama VIII avec un diplôme de droit. 6 mois plus tard, il sera assassiné dans sa chambre, le 9 juin 1946 au matin.
(Cf. Notre article « La vie en Suisse des deux futurs rois thaïlandais Rama VIII et Rama IX » (4)
Son frère Bhumibol Adulyadej devient le nouveau roi Rama IX, le Prince Rangsit est nommé Régent.
Rama IX qui n'a que 18 ans a décidé de retourner en Suisse, pour poursuivre ses études. Il choisit alors d'étudier le droit et les sciences politiques pour se préparer aux taches royales qui l'attendent. Il va y poursuivre également, avec un certain succès et talent la pratique de la photographie et du saxophone.
Lors d'un de ses séjours à Paris en 1947, il rencontre Mon Rajawongse Sirikit Kitiyakara, la fille de l'ambassadeur thaï en France, qui n'a que 15 ans. Le 4 octobre 1948, le roi a un terrible accident de voiture, qui lui blesse le dos, paralyse la moitié du visage, et le prive désormais de la vue à l'œil droit.
Pendant son hospitalisation, Sirikit vient le visiter très souvent et demande à sa mère si elle peut poursuivre ses études à Lausanne, ce qu'elle fera à l'internat Riante Rive. Ils se fiancent le 19 juillet 1949. Ils reviennent en Thaïlande en 1950. Ils se marient le 28 avril 1950. Après avoir présidé la crémation de son frère Rama VIII, Rama IX est couronné le 5 mai 1950.
Que d'événements avaient eu lieu depuis la mort de son frère et son séjour en Suisse.
Le gouvernement Pridi, les coups d'État militaire du Contre-amiral Thamrongnawasawat le 23/08/1946, puis celui d'Aphaiwong le 08/11/194, contraint de donner sa démission au prince Rangsit, président du Conseil suprême d’Etat (L’ancien Conseil de Régence), qui le 8 avril 1948, n’avait d’autre choix que de demander au maréchal Phibun de former le nouveau gouvernement. En 1949, au nom du roi, le Prince Rangsit signait la nouvelle constitution.
Une nouvelle page de l’histoire de la Thaïlande allait s’ouvrir dominée par un régime autoritaire dirigé par le maréchal Phibun pendant 9 ans et 5 mois dans un monde d’après-guerre qu’on appellera « la guerre froide » ; une période de tensions et de confrontations idéologiques et politiques entre les deux super puissances, les États-Unis et l’URSS et leurs alliés, pendant laquelle le maréchal Phibun va promouvoir une politique pro-américaine et anti-communiste qui aura des conséquences très importantes dans son action extérieure et intérieure et changera profondément la société thaïlandaise. (Cf. Notre article 213 de « Notre histoire »)
Marie-Sybille de Vienne, nous l'avons dit, va aborder le règne de Rama IX en plusieurs étapes chronologiques en distinguant la restauration royale et l'urbanisation (1946-1988) ; La fusion royauté-démocratie (1988-2006) et la liquéfaction institutionnelle (2006-2016).
En effet, le rôle du roi Rama IX et du pouvoir royal ne seront pas les mêmes selon les périodes en fonction des événements historiques, politiques et économiques et de ses relations avec les différents gouvernements, les pouvoirs militaires, et les différents réseaux militaro-politico-affairistes, les coups d'État, les crises institutionnelles, les manifestations violentes (1973, 1976, 1992, 2010). Un pouvoir qui s'exercera en son nom après 2009, avec son hospitalisation presque permanente jusqu'à son décès en 2016.
En 1948, le pays est donc de nouveau sous le pouvoir du maréchal Phibun (08/04/1948-16/09/1957) et le roi devra attendre la chute de Phibun et surtout la prise de pouvoir par le maréchal Sarit (1959-1963) pour profiter de la mise en place d'une stratégie qui va lui redonner sa légitimité et sa préséance sur la Nation.
La Constitution de 1959 va conférer au roi le titre de chef des armées et rappeler que sa personne est « sacrée et inviolable ». Sarit va aider le roi à réactiver les grands rituels royaux, à lui donner le pouvoir de nommer le Patriarche suprême, à mettre en valeur les activités du roi et les multiples cérémonies auxquelles il participe. Tous ses faits et gestes seront mis en scène dans les médias quotidiennement, qui n'oublieront pas de montrer ses compétences et son savoir, qui en font un roi moderne et attentif à ses sujets. (Cf. (5) Sarit. Les miltaires dans le jeu politique). La Couronne, poursuit-elle, va étendre ses réseaux de clientèle au-delà de sa parentèle. « La royauté adopte ainsi la structure qui demeurera la sienne pendant le demi-siècle qui suivra, celle d'une royauté bouddhiste dotée d'une solide assise patrimoniale, à même d'intégrer les élites entrepreneuriales à deux niveaux : par le truchement moderne du capital, avec des partenariats entre le Bureau des propriétés de la Couronne (CDP) et les firmes sino-thaïes, et le truchement du mérite, via les kathin royaux ».
Marie-Sybille de Vienne nous rappellera les « deux phénomènes qui vont modifier les équilibres de la société thaïlandaise » : la guerre du Vietnam (Avec la guérilla communiste) et l'aide financière américaine (6) et le développement économique avec l'essor du salariat et l'émergence d'une classe moyenne provoquant des tensions internes que le roi essayera d'apaiser en tentant de se positionner au-dessus de la mêlée des appareils politico-militaires et en dénonçant l'égoïsme et le profit et en prônant dans les années 90, une philosophie de la modération. (Cf. (7))
Mais en 1973, lors des événements sanglants d'octobre, le roi sera contraint d'intervenir en nommant un civil à la tête du gouvernement, Sanya Thammasak, recteur de Thammasat et président de son Conseil privé et en désignant une convention nationale chargée de choisir en son sein une assemblée constituante. De même lors des « événements de 1976 » le roi va de nouveau intervenir en renvoyant le général Praphas à Taïwan (Le maréchal Thanom eut l'intelligence de prendre l'habit monastique) et en avalisant un coup d’État, proclamant la loi martiale et nommant comme 1er ministre, le juriste Thanin Kraivachen. (Pour en savoir plus sur les événements de 1973 et de 1976. Cf. Nos articles. (8))
Elle ne peut que constater un « Virage à 180 degrés et (l') essor parlementaire (1980-1988) ». En effet, la Couronne (La reine agit aussi) s'est introduite dans le jeu politique en apportant son soutien à différentes factions et est en mesure de superviser l'appareil militaire, mais elle doit aussi montrer qu'elle est au-dessus de la mêlée. (Cf. Le rôle joué par le Conseil national de sécurité (NCS) en 1980 avec le bureau de l'identité nationale)). Mais l'instabilité parlementaire persiste et le roi devra encore intervenir pour soutenir le général Prem (03/03/80-04/08/88), lors de la tentative de coup d’État des « Jeunes Turcs » (Classe 7) le 31 mars 1981 et encore lors d'un autre coup d'État des Jeunes Turcs en septembre 1985. Certes le général Prem avec les différents partis qui le soutiennent, gagnera les élections anticipées de 1986, mais devra renoncer après les élections anticipées de juillet 1988 n'ayant plus le soutien du Parlement. Sa nomination au Conseil Privé du Roi ne laisse aucun doute sur sa relation établie avec le roi. (Le nouveau roi Rama X réinstallera Prem en ses fonctions de Président du Conseil privé le 6 décembre 2016. Il a alors 96 ans !)
La décennie 80, est malgré tout une période d'apaisement (La guérilla communiste a disparu) mais l'armée est divisée en factions et le haut commandement est fauteur de troubles. Cette situation va donner une aura plus large au roi qui incarne alors la pérennité de l'entité politique thaïlandaise et l'institution royale.
On entre alors dans une autre période qu’elle intitule « La fusion royauté-démocratie (1988-2006) », avec la crise économique de 1997, qui loin de déstabiliser le pays, débouchera sur la Constitution de 1997 marquant « un tournant radical dans l'histoire des institutions ».
On ne peut reprendre ici toute l'analyse de cette période qu’elle réalise en 16 pages serrées, mais seulement noter ce qu'elle nous apprend sur le roi et l'institution royale. Ainsi, après le nouveau coup d'État militaire du 23 février 1991, « - sur requête - du Roi, la junte nomme le président de la Fédération des Industries de Thaïlande, Amand Panyarachun, à la tête du gouvernement intérimaire ». Le roi va devoir encore intervenir après la nomination du général Suchinda, qui va provoquer des manifestations à Bangkok le 20 avril pour aboutir aux émeutes sanglantes du 17 au 20 mai 1992 qui feront plusieurs centaines de morts. « Le 20 mai au soir, en présence de la télévision et de deux membres de son Conseil Privé, son Président, Sanya Thamassak et le général Prem, le Roi, chef des forces armées, convoque les généraux Chamlong et Suchinda et leur demande de calmer le jeu. Il s'ensuit l'arrêt des manifestations, la démission de Suchinda -assortie d'une amnistie- l'abrogation des clauses organisant la tutelle de l'armée sur le Parlement, la dissolution du Samakkhitham (coalition politique) et la nomination d’Anand Panyarachun au poste de premier ministre. » Une fois de plus, le roi avait dû intervenir et se trouver en position d'arbitre.
(Cf. Notre article sur ces journées sanglantes, qui note aussi les interventions de la princesse Siiridhorn à la télévision le 20 mai au matin, qui sera rediffusé pendant toute la journée et celle le soir, de son frère, le prince héritier. (8) )
Elle évoque ensuite « le dysfonctionnement des institutions qu'attestent quatre changements de gouvernement en cinq ans (1992-1996) », la crise économique de 1997, qui fait vaciller le gouvernement, à tel point que « le Président du Conseil Privé du roi, le général Prem envisage un temps la formation d'un gouvernement d' « unité » ». Mais finalement les réformateurs prennent le dessus et une nouvelle Constitution est votée le 27 septembre 1997.
On avait pu remarquer que face à la crise, le roi avait eu l'occasion lors de deux discours prononcés le 4 décembre 1997 lors de son anniversaire (le 5 décembre) 1997 et 1998, de dénoncer « les dérives de la croissance à tout va », et de prôner une « économie suffisante ». (Cf. La note (7))
Mais en 1998, la naissance du Parti de Thaksin, le Thai Rak Thai fondé sur trois réseaux extérieurs au Palais vont lui permettre de devenir premier ministre en 2001 (1er mandat 2001-2005), de diriger le pays d'une main de fer, avec un volontarisme et un interventionnisme hors du commun. « Cela va se traduire par sa volonté de diriger et de contrôler toutes les institutions du royaume et de «vider de sa substance les garde-fous institutionnels » (commission électorale et anti-corruption, Cour constitutionnelle…), et d’éliminer toute forme d’opposition (parlementaire, militaire, médiatique, syndicale et associative) ». (In Notre article (10))
Mais son action va soulever des réserves et des tensions, surtout avec le nombre d'affaires de corruption, des manipulations de promotions militaires, que la presse relaye avec des critiques publiques des Conseillers privés du roi. « Rien d'étonnant donc que le Roi exprime publiquement des réserves en présence du gouvernement dès fin 2003, à l'occasion de son discours d'anniversaire ». On peut constater que le fossé s’étend entre le Palais et le 1er ministre Thaksin courant 2004.
Et cela ne va pas s'arranger, tant les tensions vont s'aggraver, avec les nominations au sein de l'appareil militaire, la situation dans le Sud et la loi d'urgence, avec un lynchage médiatique de Thaksin encouragé par son ex-allié Sondhi et sa rupture avec le Prince héritier. Sa légitimité est remise question et le Roi, de nouveau, lors de son discours d'anniversaire de 2005, « reproche publiquement à Thaksin de n’écouter aucune critique. »
La vente de l'entreprise familiale de Thaksin Shin corp à un fonds souverain de Singapour sans payer d'impôt le 23 janvier 2006 va provoquer une énorme manifestation de 200 000 personnes portant du jaune à Bangkok ; dès lors, les événements vont s'enchaîner : Thaksin dissout l'Assemblée le 24 février 2006 ; Une manifestation de 150 000 personnes, venant surtout de Province a lieu en sa faveur à Bangkok début mars, ses opposants avec 60 000 personnes lui répondent le 5 mars ; les Démocrates boycottent les élections le 2 avril 2006 ; l'Assemblée ne peut pas siéger faute de sièges vacants, la crise institutionnelle amène Thaksin a démissionné le 4 avril, après un entretien avec le Roi. Après le second tour du 22 avril, l'Assemblée ne peut toujours pas siéger. Le roi estime que l'article 7 de la Constitution ne lui permet pas de trancher ; Le Roi se tourne vers la Cour Suprême et la Cour Administrative : « après le discours du roi aux deux Cours, puis concertation entre elles, la Cour Administrative annule le 3e tour des législatives, la Cour constitutionnelle (la troisième instance) invalide alors l'ensemble des élections le 9 mai. » Marie-Sybille de Vienne, note, que bien que Thaksin reprenne la tête du gouvernement le 19 mai 2006, désormais ses relations avec la Couronne sont détériorées ; son comportement lors de la réception donnée par le Roi à l'occasion du 60e anniversaire de son accession au trône peut faire croire qu'il souhaite se « substituer » au Roi. La crise demeure. On peut remarquer les manœuvres du général Prem contre le gouvernement. Bref, le 19 septembre 2006, « les militaires s'emparent du pouvoir et forment un Conseil national de sécurité (CNS) ». Le Roi va entériner le nouveau coup d'État.
Ensuite, en 8 pages, elle va évoquer ce qu'elle appelle la liquéfaction institutionnelle (2006-2016). Nous passerons vite sur cette période, tant les événements sont nombreux, avec la nouvelle constitution approuvée par référendum le 19 août 2007 ; les nouvelles élections en décembre qui voient le retour des partisans de Thaksin, l'éviction du 1er ministre Samak par la Cour constitutionnelle, son remplacement par Somchai, le beau-frère de Thaksin ; la condamnation de Thaksin, La contestation et les manifestations violentes du PAD (Gilets jaunes), qui débouchent de nouveau sur l'instauration de l'état d'urgence, la dissolution du PPP et de ses alliés, l'accord entre les militaires et le parti démocrate qui font d'Abhisit le nouveau 1er ministre. Nous n'allons pas reprendre ici la politique menée par le nouveau gouvernement, qui ne réussira pas à apaiser le conflit entre les jaunes et les rouges, surtout avec la partialité trop visible de l'institution judiciaire ; La manifestation d'avril 2009, « marche de 20 000 chemises rouges sur le Grand Palais pour demander l'amnistie de Thaksin. Le 22 août, le Roi dénonce les « propagateurs de la désunion » ; quelques semaines plus tard, il fait de l'hôpital Siriraj sa résidence ».
Le 26 février 2010, la Cour Suprême saisit la plus-value de Shin Corp, qui entraîne les « événements de mars-mai 2010 » à Bangkok, avec principalement la manifestation de 100 000 personnes le 14 mars ; l'état d'urgence proclamée le 7 avril, l'assaut de l'armée le 13 mai qui fait 91 morts et plus de 2000 blessés. (Sur ces manifestations, Cf. L'excellente étude d'Eugénie Mérieau, « Les Chemises rouges de Thaïlande» (11))
Ensuite, ce sera la dissolution de l'Assemblée en novembre 2010, les élections de juillet 2011 qui porte au pouvoir la sœur de Thaksin, Yingluck.
Mais l'instabilité demeure à Bangkok, et « le couple royal quitte l'hôpital Siriraj pour sa résidence à Hua Hin ». Une nouvelle crise contraint Yingluck à dissoudre le Parlement et à annoncer des élections pour février 2014. On assiste à un remake des élections de 2006 (Refus du Parti Démocrate de participer, seuil des députés pas atteint, partielles annulées par la Commission électorale). « L'échec du programme d'achat gouvernemental de riz fournit alors le prétexte idéal pour la mise en examen de Yingluck fin février. Un mois plus tard, la Cour Constitutionnelle invalide les sélections. La destitution de Yingluck le 7 mai ouvre ensuite la voie à un nouveau coup d'État militaire soigneusement préparé. » Des manifestations font 28 morts. Le 20 mai 2014 le général Prayut Chan-Ocha, commandant en chef de l'armée royale thaïlandaise instaure la loi martiale ; le 22 mai , il dirige un coup d'État. La Constitution est suspendue. La junte avec à sa tête le général Prayut Chan-Ocha, prend le contrôle du pays. Le Roi approuve la nouvelle constitution provisoire en juillet 2014.
(Toutefois, Mlle Marie-Sybille de Vienne, émet un doute sur la pleine approbation du roi (p. 99), « si tant qu'il est été physiquement en état de s'y opposer. En effet, depuis septembre 2009 et jusqu'à son décès le
13 octobre 2016, le Roi Rama IX fut hospitalisé presque en permanence et ne prononça plus son « discours » lors de son anniversaire.)
En septembre 2014 la junte désigne une assemblée législative qui nomme le général Prayut Chan-Ocha 1er ministre. Le 7 août 2016 la nouvelle constitution est approuvée par référendum.
Le système royal du pouvoir en Thaïlande, d'après l'étude de Marie-Sybille de Vienne, « Thaïlande, une royauté bouddhique aux XXe et XXIe siècles. ». (53 p.)
Le « système royal», nous l'avons dit, est un appareil de pouvoir parallèle qui s'articule à travers trois séries d'instruments politiques, économiques et symboliques, à savoir le Conseil Privé du Roi et ses réseaux, la parami et les finances royales et la symbolique royale et la reconnaissance du plus grand nombre. En sachant que ce pouvoir royal est difficile à mesurer dans la mesure où certains revenus ne peuvent qu'être estimés et les réseaux multiples reconstitués tant ils s'imbriquent à travers l'histoire royale, politique, économique et l'histoire des « grandes familles d'influence» avec leur alliances et mariages.
Le Conseil Privé.
Le Conseil privé est chargé d'instruire les dossiers présentés au souverain, de formuler un avis sur la législation en attente de promulgation, les recours en grâce, les pétitions et les nominations, ou souvent d'assurer en son nom les projets sous patronage royal, sans connaître réellement ses pouvoirs politiques et économiques effectifs.
Marie-Sybille de Vienne note l'évolution de la composition de Conseil Privé du roi Rama IX en six étapes (1952-1963, 1964-1971, 1971-1977, 1977-1997, 1998-2007, 2007-2016) qui montre la variation sociologique entre la parentèle royale, les civils (magistrats, diplomates, médecins, technocrates), et les militaires. Ainsi par exemple en 1977-1997 on assiste au doublement du poids des militaires (de 15% à 33%) alors même que la parentèle royale se maintient autour de 25%. Cette sociologie suggère les différentes luttes entre les différentes institutions et acteurs du Pouvoir, selon les périodes.
On peut donner l'exemple du général Prem, qui à partir de 1988, a eu une grande influence auprès du roi dans les nominations et promotions au sommet des appareils de l'État y compris militaires ; qu'il a joué un rôle important auprès du roi lors des émeutes sanglantes de 1992, pour calmer le jeu et obtenir la démission du général Suchinda ou bien encore lors de la crise économique et politique de 1997, et ses manœuvres contre le gouvernement Thaksin. (Cf. A 297.)
Parami et finances royales.
(« Parami » désigne la pratique d'une vertu qui, menée vers sa perfection, permet d’accéder à l’éveil, c’est-à-dire au nirvana ou à l’état de bodhisattva puis de Bouddha.)
Il est utile de rappeler que nous avions déjà dans un article précédent tenter de faire le point sur les finances royales avec surtout le « Bureau des propriétés de la couronne » (BPC), distinguant ses actifs immobiliers, ses revenus mobiliers, dont nous avions donné la valeur, en considérant les données disponibles. (Cf. A 236 (12))
L'institution royale dispose donc de trois instruments pour agir économiquement et socialement : le Bureau des Propriétés de la Couronne (Crown Property Bureau, i.e. CPB) ; les « projets royaux » et les fondations caritatives.
Le CPB ?
Le CPB est un holding composé de la Siam Cement (Le plus important conglomérat industriel de l'Asie du Sud-Est
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de la Siam commercial Bank (L'une des cinq premières banques du royaume), la Deves Insurance, la CPB Equity et de la CBP Property.
Marie-Sybille de Vienne donne une estimation des revenus du CPB en millions de baths (courants). Ainsi pour 2015 : la Siam commercial Bank : 4 831,8 ; Siam Cement : 5 351 ; Deves insurance : 98 ; CPB Equity 1 776 ; CPB Property : 3 200, soit un total de 15 257.
En 2015, la CPB comptait 1200 salariés et dépensait 1,669 milliards en frais de personnel et 2 milliards en frais de fonctionnement, soit environ un total de 3,6 milliards. 52 % des dépenses, soit 4,2 milliards sont consacrées aux « œuvres royales, qui sont diverses : jeunesse (jardins d'enfants, sport, bourses), culturelles (art dramatique, et danse traditionnelle siamoise), restauration de temples, propagation du bouddhisme, préservation de l'environnement rural, petite participation à des projets royaux.
La CPB se retrouverait donc avec un profit de 7,5 milliards de baths en 2015, dont 60 % seraient redistribué aux « actionnaires » royaux :
3,6 milliards de baths au Bureau de la Maison Royale (train de vie de la famille royale, listes civiles, activités publiques, cérémonies - funérailles de personnalité par ex., entretien des palais provinciaux et 0,9 milliards pour le Cabinet privé du Roi (l'État aurait donné 759 millions de baths).
La Couronne thaïlandaise disposait donc d'un budget de quelque 8,5 milliards de baths à la fin de 2015 provenant à hauteur de 48 % des finances publiques et de 52 % des propriétés de la Couronne ; auquel on peut rajouter le revenu des actifs personnels des membres de la famille royale
Projets royaux de développement et fondations.
Outre la CPB qui en 2015 par exemple, a consacré 52 % de ses dépenses soit 4,2 milliards aux diverses «œuvres royales», il existe aussi des projets royaux de développement, financés en quasi-totalité par les dépenses publiques qui sont coordonnées par le bureau du « Government House » et depuis 1993, administrées par l' « Office of the Royal Development Projects Board » (ORDPB) qui est rattaché au cabinet du 1er ministre. Toutefois, il faut noter qu'en 2015, ces dépenses ne représentaient que 2,5 milliards de baths, soit 0,09 % des dépenses publiques. Ces projets visent à promouvoir l'image du souverain et de l'institution royale, en tant qu'opérateur du progrès social.
Le nombre de projets «d'initiative royale» a évolué au fil des années, pour osciller entre 200 et 250 par an. Ils s'inscrivent dans la volonté royale de développer le monde rural (« hydraulique, environnement et agriculture représentant les trois quarts des projets à fin 2012 »)
Il est important de connaître la nature de ces projets ruraux qui procèdent d'une conception royale du développement connue sous le nom : «d'économie suffisante», un «modèle» auquel le roi Rama IX était très attaché et qu'il a promu dans nombre de ses « discours ». « Conceptualisé, dit Marie-Sybille de Vienne, officiellement en 1998 à l'occasion de la crise financière (…) « l'économie suffisante » propose une amélioration progressive et raisonnable du niveau de vie des petits producteurs ruraux, en minorant les contraintes de l'endettement, du crédit à la consommation, du marché de la concurrence, une vision karmique de l'existence ... ». (13)
Les fondations royales.
Marie-Sybille de Vienne signale l'existence d'une vingtaine de fondations de 1er rang, dont la plus ancienne est la fondation Ananda Mahidol créée en 1959 sous l'impulsion de la Princesse mère qui en 1969 va en créer une autre sous son propre nom. (Consacrée à la médecine et à la santé publique. 51 000 volontaires médicaux en 2014 sont chargés d'apporter les premiers soins dans les villages reculés. Décédée en 1995) ; d'autres encore à l'initiative de la princesse Galliani (sœur de Rama IX, décédée en janvier 2008).
Mais il faut attendre 1969 pour que la Royal Project Foundation soit créé officiellement par le roi Rama IX, qui est une organisation à but non lucratif, qui se donne comme objectifs d'améliorer la qualité de vie des tribus du nord en développant des cultures de substitution pour réduire voire d'éliminer la culture de l'opium, préserver et faire revivre les forêts et les ressources en eau. (38 programmes étaient en cours en 2014).
En fait, nombre de projets royaux, initiés par la Couronne sont relayés ensuite par des ONG, ainsi l'ONG Chaipattana (Victoire de Développement) créé en juin 1988 qui « une fois éradiquée la culture du pavot, s'est réorientée vers des domaines qui relèvent de l' « économie suffisante » avec 4 centres agronomiques et une série de projets agricoles. Les fondations -dites royales- sont multiples et couvrent bien des secteurs comme la santé des vétérans de l'armée et de la police, la commercialisation des produits agro-artisanaux, le relogement des plus défavorisés des bidonvilles du centre de Bangkok installés sur les terrains de la Couronne, des projets hydrologiques, etc. D'autres ONG bénéficient du patronage de la famille royale, comme la Croix rouge thaïlandaise et beaucoup d'autres (Marie-Sybille de Vienne en cite une douzaine) qui bénéficient ainsi de nombreuses donations des principales entreprises thaïlandaises et de dons privés. Si les dernières fondations royales créées « confirment que l'assistance aux plus démunis, physiquement ou socialement, n'est plus le seul objectif de la charité », mais il s'agit toujours de préserver l'image de la Couronne.
Les réseaux de l'économie royale.
Le sommet du maillage royal peut être appréhendé par les conseils d'administration, d'une part par les cinq composantes du CPB (Siam Cement, Siam Commercial Bank, Deves Insurance, CPB Equity, CPB Properties) du volet économique de la royauté et par ceux des principales fondations royales du volet social (qui sert à son prestige) (Une quinzaine) soit 21 organismes, gérés par quelque 138 administrateurs.
Ces administrateurs « dont 26 (soit un sur cinq) siègent dans plusieurs conseils » constituent ainsi le point focal du « système royal », surtout que 6 d'entre eux appartenaient au Conseil Privé du roi Rama IX. (Ainsi par exemple le directeur général de la CPB était présent dans quatre des fondations lancées par le roi, et il présidait également le conseil d'administration du NIDA (L'ENA thaï)))
On imagine l'importance de ce réseau de pouvoir et d'influence qui se structure au niveau du CPB et de 19 « entreprises » (Et organismes et une institution) composées par les grandes agences d'État, les grandes firmes appartenant en tout ou partie à l'État thaïlandais, les organismes en charge des politiques publiques et quelques firmes privées à capitaux majoritairement nationaux, dont certaines entretiennent des liens entre elles. (« Auxquels, il faudrait rajouter les interconnections des réseaux familiaux et les lignages (royaux, militaires, civiles, politiques)).
« Symbolique royale et reconnaissance du plus grand nombre. »
Nous avons vu que le Roi avec son Conseil Privé composé d'hommes influents joue un rôle important au niveau politique et dans la gouvernance du royaume, que l'institution royale dispose de trois instruments et des fonds importants pour agir économiquement et socialement : le Bureau des Propriétés de la Couronne (Crown Property Bureau) (CPB) les « projets royaux » et les fondations caritatives, animés par des réseaux d'hommes influents agissant dans tous « les secteurs clés de la société civile, de la banque à la santé en passant par l'éducation et les infrastructures », avec en plus une sur médiatisation des réalisations royales. Mais pour toucher le plus grand nombre, Marie-Sybille de Vienne nous dit que la Couronne va se servir d'un autre relais d'ordre symbolique qui va s'exercer à trois niveaux : « propitiatoire et civil à l'échelle nationale, bouddhique et caritatif à l'échelle communautaire ; prophylactique et magique à l'échelle individuelle. »
« Propitier le royaume. »
« Le calendrier royal prévoit deux grands rites séculaires dont l'objet est de « propitier » les deux piliers (traditionnels et modernes) de la Couronne siamoise, l'agriculture et la fonction publique : le labourage du premier sillon et l'anniversaire du souverain. », en se rappelant que depuis 1960, l'anniversaire du roi Rama IX est devenu une fête nationale, identifiant ainsi le roi à Nation. (Elle a été maintenue par Rama X) Il est précédé d'une grande parade et ensuite d'un serment d'allégeance effectué par l'ensemble des responsables des institutions et des corps d'État, plaçant ainsi le roi au centre de l'appareil d'État. Après la parade, le Prince héritier, au nom de la famille royale, effectue un autre rituel d'offrande au souverain, devant les dirigeants des corps constitués (premier ministre, président de l'Assemblée Nationale et Président de la Cour Suprême) et le Commandant des suprême des forces armées). Et puis les délégations des différents corps d'armée effectuent publiquement le serment d'allégeance. Les prestations de serment sont également effectuées à l'intérieur des administrations centrales et en Province devant le portrait du Roi. Le discours du roi clôture la cérémonie.
Structurer les communautés : le jeu du kathin royal.
Marie-Sybille de Vienne expose donc, ce qu'elle considère comme la seconde catégorie des grands rites royaux : le kathin (kathina), offrande de nouvelles robes aux moines, qui met « en exergue la dimension bouddhique du monarque cakravartin l'instrument de l'intégration des élites entrepreneuriales modernes à la société thaïe, en leur permettant d'acquérir des mérites par le truchement de la parami royale », qui a été instauré par le gouvernement Sarit par décret en 1960, distinguant trois degrés de kathin royaux. En simplifiant : Par le Roi dans 9 monastères, les membres de la famille royale dans 7 autres monastères, au nom du Roi dans des monastères de seconde et troisième catégorie. Une occasion pour tous ceux qui le souhaitent d'apporter une contribution au monastère, dans un rituel où est mis en scène le Traibhum, texte fondateur de la cosmologie siamoise. Un kathin royal qui « par-delà la dimension cosmologique met en branle une dynamique socio-économique de première importance autour des monastères ».
Le kathin royal s'inscrit dans le contexte bouddhique. (Cf. Le Asahara Bucha, (Le 1er sermon de Bouddha, l'une des fêtes bouddhistes les plus importantes); suivie par le Khao Phansa (Le carême bouddhiste de 3 mois pour les moines ; mais à l'occasion duquel de nombreux jeunes civils se font moines et que les Thaïlandais tentent de prendre de bonnes résolutions, ou d'autres fêtes religieuses). Sans oublier les fêtes civiles qui « ont (aussi) pour objectifs de légitimer la dynastie Chakri avec son fondateur Rama I, le roi Chulalongkoron (Rama V), le père de la nation, et feu le roi actuel, Rama IX, dont on fêtait le 5 mai le couronnement, le 5 décembre son anniversaire, sans oublier la reine dont on fête également l’anniversaire le 12 août.
Le troisième pouvoir symbolique de la Royauté s'exercerait par le succès des amulettes royales, leur fabrication et leur vente.
On apprendra alors les principales étapes et émissions de la fabrique royale des amulettes : Le banc d'essai en 1962 par Sarit, 1963, 1964-1965, l'engagement personnel du roi Bhumibol en 1965 à l'approche de ses 40 ans, en 1971 pour son jubilé d'argent (25 ans de règne), en 1975 pour la médaille du 4e cycle du Roi, puis le 6e cycle, etc, pour honorer ceci, construire et restaurer cela. La liste est longue. Les sanctuaires royaux y allèrent de leur émission de médailles pour constater : « Au total, début 2015, les amulettes directement liées à la royauté représentaient près de 10% des amulettes (hors dispositifs protecteurs, de type takrut, phisman, etc.) circulant en Thaïlande. (On ne peut que vous conseiller la lecture de 6 articles consacrés aux amulettes du blog ami « MerveilleuseChiang-Mai»( 14)
L'étude de Marie-Sybille de Vienne nous a aidés à mieux comprendre le rôle du roi Rama IX et du pouvoir royal dans les différentes périodes de l'histoire de son pays, ainsi que les instruments du « Système royal » qui ont assuré sa légitimité et son prestige et celui de la famille royale, faisant de lui le protecteur de la Nation et du Bouddhisme. (15)
Rama IX décède le 13 octobre 2016, après 70 ans de règne, adoré par ses sujets.
NOTES ET RÉFÉRENCES.
(1) Deux autres sources sur le roi sont connues :
le premier, hagiographique, « Le roi Bhumibol, Force de la nation », publié par le Comité de l'Identité nationale, pour rendre hommage au 60e anniversaire de son accession au trône « dans le but de faire mieux connaître au public la vie, la personnalité du roi Bhumibol Adulyadej et son œuvre au service du peuple et du développement » .
Le second est interdit dans le pays, « The king never smiles », une biographie du roi écrite par Paul M. Handley, qu'-évidemment- nous n'avons pas pu lire.
(2) A 297. THAÏLANDE, UNE ROYAUTÉ BOUDDHIQUE AUX XXe ET XXIe SIÈCLES.
Un livre de Marie-Sybille de Vienne (1). Les Indes Savantes, 2008.
4e de couverture : Professeur des universités et chercheur au Centre Asie du Sud-Est (CNRS/EHESS/INALCO).
A 298. « LE SYSTÈME ROYAL » DU POUVOIR EN THAÏLANDE.
http://www.alainbernardenthailande.com/2019/02/a-298.le-systeme-royal-du-pouvoir-en-thailande.html
(3) 214 – COMBIEN DE COUPS D’ÉTAT, DE RÉBELLIONS, DE RÉVOLTES ET DE SOULÈVEMENTS EN THAÏLANDE DEPUIS LE DÉBUT DU SIÈCLE DERNIER ?
https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_Premiers_ministres_de_Tha%C3%AFlande
(4) Nous avons déjà appris dans l'article précédent consacré à son frère Rama VIII que son père, Mahidol Adulyadej, Prince de Songkla ou Mahidol Adulyadej « le Prince père », est le 69e enfant du roi Chulalongkorn et le 7e enfant de la reine Savang Vadhana.
A 13 ans, il est envoyé en Angleterre en 1905 où il passe un an et demi dans la très distinguée Harrow Schooll, puis ensuite en Allemagne pour rejoindre la non moins prestigieuse Académie militaire supérieure des Cadets, à Grosz-Lichterfelde. Son demi-frère, le roi Vajiravudh (Rama V), dirige sa carrière vers la marine, à l'Académie navale impériale allemande de Flensburg-Mürwik, en sort lieutenant et est admis en 1912 dans la marine royale thaïe. Il dut revenir en Thaïlande en 1914 au début de la première guerre mondiale et fut affecté à un poste d'enseignant à l'Académie de la Marine royale. En conflit avec des officiers supérieurs, le prince préféra alors démissionner 9 mois après, pour commencer une nouvelle carrière. Nous le retrouvons alors à Cambridge dans le Massachusetts pour étudier la santé publique dans la prestigieuse université d’Harvard. Il y rencontre une jeune infirmière thaïlandaise de 18 ans, Sangwal Talabhat, qu'il épouse en 1919, lors de son retour en Thaïlande pour assister aux funérailles de la reine Saovabha, la mère de Rama VI. Ils retournent ensuite à Harvard, et obtient son diplôme en 1921.
Après un passage en Angleterre, leur premier enfant, la princesse Galyani Vadhana, naquit à Londres le 6 mai 1923. Il retourna en Thaïlande la même année pour occuper un poste de directeur général du Département de l'Université au ministère de l'Éducation. En dehors de ses fonctions administratives, il enseignait également son art au Collège médical royal. En 1925, il se rend à Heidelberg, en Allemagne pour subir un traitement des reins avant de retourner à Harvard pour continuer à étudier la médecine. C’est à Heidelberg que naquit son premier fils, Ananda, le futur roi Rama VIII, le 20 septembre 1925. Son plus jeune fils, Bhumibol Adulyadej, naquit dans le Massachusetts le 5 décembre 1927. Muni de tous ses diplômes, il retourne en Thaïlande en décembre 1928. Malheureusement, souffrant d’un abcès du foie, il meurt le 24 septembre 1929. Il n’était âgé que de 37 ans.
217 – LA VIE EN SUISSE DES DEUX FUTURS ROIS THAÏLANDAIS, RAMA VIII ET RAMA IX.
Cf. Aussi « Le roi Bhumibol et la famille royale de Thaïlande à Lausanne » publié en 2015, Slatkine – ISBN 978 2 8321 0662 4.
(5) 223. LES MILITAIRES, L’OLIGARCHIE DOMINANTE À LA MORT DU MARÉCHAL SARIT EN 1963 ?
A83. Les militaires thaïlandais, maîtres du jeu politique?
(6) 226. LA THAÏLANDE ENTRE EN GUERRE OUVERTE AU VIETNAM AUX CȎTÉS DES ÉTATS-UNIS.
225. L’aide américaine à la Thaïlande dans les années 1960-1970.
http://www.alainbernardenthailande.com/2016/04/225-l-aide-americaine-a-la-thailande-dans-les-annees-1960-1970.html
(7) A 292 - « IDÉES REÇUES SUR LA THAÏLANDE», SELON Mlle EUGÉNIE MÉRIEAU. 8 4.5- ÉCONOMIE. (Suite et fin)
« LA THAÏLANDE S'EST SORTIE DE LA CRISE DE 1997 GRÂCE AU MODÈLE ÉCONOMIQUE DU ROI RAMA IX. ».
Cf. Le discours du roi Bhumibol Adulyaded, prononcé le 4 décembre 1997 à l'occasion de son anniversaire (Le 5), dont Mlle Mérieau donne un extrait, qui prônait la mise en action d'une « économie de la modération » pour faire face à la grave crise économique et financière de 1997.
“Le 26 mai 2006, « Le Secrétaire général a remis au roi Bhumibol Adulyadej le prix décerné par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) afin de saluer son action exceptionnelle dans le domaine du développement humain, de la réduction de la pauvreté et de la conservation de l'environnement en Thaïlande. C'est la première fois qu'une telle récompense a été décernée. ». En 2007, la philosophie royale est « constitutionnalisée » ; En 2017, elle est justiciable, par la Cour constitutionnelle ; Les projets royaux de développement rural devinrent des « fondations royales » à l'instar de la Fondation pour les projets royaux fondés en 1969 et, précise Eugénie Mériau, « Il doit également être noté que les fondations royales et projets royaux sont protégés de facto par la loi de lèse-majesté et par conséquents non sujets critiques ».
« Un modèle de ferme familiale - Pour le monarque, le progrès ne devait pas se mesurer en chiffres de croissance, mais par la capacité de se suffire à soi-même et de contrôler sa destinée économique.
En 1996, le roi Bhumibol a créé un modèle de ferme familiale fonctionnant sur le principe de suffisance économique : un terrain de 2,4 hectares (la moyenne des propriétés en Thaïlande) divisé en un étang pour la pisciculture, un rectangle de rizières et un espace pour des arbres fruitiers et pour les légumes.
Le souverain a précisé que ce type de ferme auto-suffisante ne devait pas être une fin en soi, qu’il devait y avoir un développement graduel, notamment par des échanges commerciaux.
C’est l’idée d’une voie moyenne, d’un équilibre harmonieux entre les ambitions et les moyens dont on dispose, qui sort tout droit du bouddhisme Theravada. »
(8) 228. COMPRENDRE LA RÉVOLTE POPULAIRE DU 14 OCTOBRE 1973 EN THAÏLANDE QUI MIT FIN À LA DICTATURE DU MARÉCHAL THANOM.
229-1 - LES ÉVÉNEMENTS POLITIQUES DE 1973 A 1976 : DU 14 OCTOBRE 1973 AU 6 OCTOBRE 1976, TROIS ANS DE CHAOS : PREMIER ÉPISODE.
http://www.alainbernardenthailande.com/2016/05/229-1-les-evenements-politiques-de-1973-a-1976-du-14-octobre-1973-au-6-octobre-1976-trois-ans-de-chaos-premier-episode.html
229 – 2. (SUITE)
229-3. (SUITE ET FIN )
ww.alainbernardenthailande.com/2016/04/229-3-les-evenements-politiques-du-14-octobre-1973-au-6-octobre-1976-trois-ans-de-chaos-suite-et-fin.html
(9) 237- DU 24 FÉVRIER 1991 AU 22 SEPTEMBRE 1992 : 19 MOIS, TROIS GOUVERNEMENTS, DEUX ELECTIONS GÉNÉRALES ET UN MASSACRE.
(10) 245. LES DEUX GOUVERNEMENTS DU LIEUTENANT-COLONEL THAKSIN SHINAWATRA DU 17 FÉVRIER 2001 AU COUP D’ÉTAT DU 19 SEPTEMBRE 2006.
Extrait : « Ainsi Thaksin est devenu le 1er ministre. Il est bien décidé à diriger le pays comme il a dirigé jusque-là ses entreprises. Il déclarera d’ailleurs que le juste rôle d’un premier ministre est de gérer la plus grande entreprise nationale : la Thailand Company. « La politique n’est que l’enveloppe que l’on voit. La gestion est la clé pour arriver à faire avancer la Thaïlande en tant qu’organisation.».
Il va pour ce faire montrer un volontarisme et un interventionnisme hors du commun, dans un style autoritaire parfois brutal mû, nous dit Nicolas Revise avec « une ambition unique : s’emparer de l’Etat pour assurer une croissance économique favorable aux milieux d’affaires et au marché domestique » ; sans oublier … ses propres affaires, et une certaine conception de la démocratie qu’il explicite : « J’ai pris la décision d’entrer en politique […] conformément à la théorie du contrat social que j’ai étudiée. Lorsque les individus vivent ensemble dans un Etat, ils doivent accepter de sacrifier une partie de leur liberté afin que l’Etat établisse des règles pour que tous puissent vivre ensemble dans une société juste. C’est le vrai noyau du système de représentation politique ». Cela va se traduire effectivement pour Thaksin par sa volonté de diriger et de contrôler toutes les institutions du royaume et de « vider de sa substance les garde-fous institutionnels » (commission électorale et anti-corruption, Cour constitutionnelle…), et d’éliminer toute forme d’opposition (parlementaire, militaire, médiatique, syndicale et associative). »
(11) Eugénie Mérieau, Les Chemises rouges de Thaïlande, Carnet de l’Irasec / Occasional Paper n° 23. ISBN 978-616-7571-16-4, juillet 2013.
Notre lecture sur « De 2006 aux manifestations de Phan Fa/Ratchaprasong du « 3 avril 2010-19 mai 2010, in A124. Les chemises rouges de Thaïlande. 1 http://www.alainbernardenthailande.com/article-a123-les-chemises-rouges-de-thailande-1-119487000.html
(12) Nous avions dans notre article « A 266 - LE ROI DE THAÏLANDE EST-IL BIEN L’HOMME LE PLUS RICHE DU MONDE » :
http://www.alainbernardenthailande.com/2017/08/a-266-le-roi-de-thailande-est-il-l-homme-le-plus-riche-du-monde.html
réagit contre le magazine Forbes qui avait fait la confusion entre les richesses personnelles du monarque et celles du BPC « Bureau des propriétés de la couronne » (Crown property bureau - สำนักงาน ทรัพย์สินส่วนระมหาษัตริย์ - Samnakngan Sapsinsuanphra Mahakasat).
Nous avions alors fait le point sur Le « Bureau des propriétés de la couronne » (BPC) et son histoire, avec les actifs immobiliers (avec les 24 sites des palais et résidences, les immeubles de bureaux, les 15 sites de bâtiments commerciaux) puis les revenus mobiliers (Avec les dividendes de trois sociétés de premier plan, 21,47 % de la Siam Commercial Bank pour une valeur estimée de 1,1 milliard de dollars, 30,76 % de The Siam Cement Group (énorme conglomérat fondé par Rama VI) pour une valeur estimée de 1,9 milliards de dollars et 98,54 % de The Deves Insurance, l’une des plus importantes compagnies d’assurances du pays pour une valeur estimée de 600 millions de dollars. Le total des dividendes perçus en 2010 a été de 200 millions de dollars (environ 6 milliards de baths). Ces revenus sont évidemment sinusoïdaux en fonction de la loi du marché. Lors de la crise de 1997, ils ont été nuls et le Bureau a dû se séparer de quelques actifs immobiliers pour ne pas se trouver en difficultés. Ce sont des sociétés commerciales qui publient leurs bilans, et ils sont donc disponibles sur Internet, et donc loin de l’opacité déclarée par certains.
Nous avions noté, entre autres, que le Bureau emploie plus de 1.000 personnes dont la plupart (au moins 90 %) se consacre à la gestion du parc immobilier et que les dépenses de personnel représentent 14,20% du budget 2015 (rapport 2016) et que les dépenses de la « liste civile » destinée à financer les interventions de tous les membres de la famille royale sont prélevées sur les recettes du Bureau et se seraient élevées pour l’année 2015 à la somme de 170 millions de dollars, avec donc le mérite de ne pas être financée par le contribuable. C’est toutefois un domaine sur lequel plane une certaine discrétion puisque, si nous connaissons le détail de activités du Bureau, celui-ci ne dévoile sauf au Roi ni le détail de ses comptes ni ses bilans ni sa comptabilité. De même que nous ne connaissons rien de la fortune personnelle de feu le roi Rama IX et celle de son fils Rama X, actuellement régnant, en rappelant que si le Bureau est propriétaire d’un patrimoine « considérable », il n’est pas la propriété du Roi qui n’en gère que les revenus.
(13) « Le roi Bhumibol Adulyadej n’est pas l’homme qui a inventé la philosophie de l’économie suffisante (…) Ce concept inspiré du bouddhisme qui prône la modération et l’autonomie économique est apparu formellement pour la première fois dans les décrets nationalistes (Rattaniyom) du régime militaire du maréchal Phibunsongkhram à la veille de la seconde guerre mondiale. A une époque où l’économie thaïlandaise restait majoritairement agricole et où la pagode était le centre de la vie sociale, il reflétait simplement la réalité quotidienne de la plus grande partie des Thaïlandais ».
(14) Blog « MerveilleuseChiang-Mai » : https://www.merveilleusechiang-mai.com/marche-aux-amulettes-le-3605362136343604-3614361936323648358836193639365636293591
https://www.merveilleusechiang-mai.com/amulette-jatukham-rammathep-l-1
https://www.merveilleusechiang-mai.com/amulette-jatukham-rammathep-l-2
https://www.merveilleusechiang-mai.com/amulettes-et-bouddhisme-13
https://www.merveilleusechiang-mai.com/amulettes-et-bouddhisme-23
https://www.merveilleusechiang-mai.com/amulettes-et-bouddhisme-33
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