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Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.

15. Le muang selon Michel Bruneau ?

MichelBruneauNota. Nous avons trouvé un article de Michel Bruneau in   Évolution de la formation sociale et transformation de l’organisation de l’espace dans le Nord de la Thaïlande (1850-1977) , après l’écriture de notre article sur le Muang. Il nous a paru intéressant de vous communiquer un extrait de son article :   

 Cahiers de géographie du Québec, vol. 22, n° 56, 1978, p. 217-263.

 

Pour citer cet article, utiliser l'adresse suivante : http://id.erudit.org/iderudit/021394ar 

 

  Mode de production «asiatique», formations sociales siamoise et lao.


Vers 1850, la formation sociale siamoise est caractérisée par l'existence de classes; l'aristocratie des Chao et Naï est la classe dominante qui, incarnant l'Etat sous le roi, s'approprie le surproduit des communautés rurales et contrôle étroitement le commerce. Elle vit dans les villes (Muang) et dans la capitale. Sa fonction est d'encadrer la population pour constituer une armée en temps de guerre et organiser les corvées auxquelles sont soumis tous les paysans.


Ceux-ci se divisent en Phraï ou hommes libres soumis à la corvée et attachés à un patron (Naï ou Chao) auquel ils doivent cadeaux et prestations en échange de sa protection, et en That ou esclaves, à la disposition de leur maître (Naï ou Chao) mais pouvant avoir leurs propres terres et même racheter leur liberté. Les Phrai, soumis à une sorte de servage, ont la liberté de changer de patron. Il n'y a pas de propriété privée de la terre mais seulement une possession toujours révocable. Les moines boudhistes constituent un ordre à part non soumis aux corvées mais confiné dans des fonctions uniquement religieuses, tout homme pouvant devenir bonze puis retrouver, quand il le désire, sa condition antérieure.

 

moine bouddhiste


Les royaumes de Sukhothai puis d'Ayuthaya ayant subi une forte influence Khmer (surtout le second), ont conservé une certaine divinisation du souverain et la tradition de grands travaux pour l'irrigation, le drainage et les transports par voie d'eau grâce aux corvées.

Le mode de production dominant est donc bien le mode de production «asiatique» à grands travaux, les communautés rurales, villageoises, conservant des survivances (liens de parenté, entraide collective) du mode de production tribal antérieur.

 

Dans les principautés du Nord, on retrouve la même répartition de la population en classes. Cependant, la formation sociale lao a des souverains (Chao Muang) moins puissants que le roi du Siam et ne nécessite pas un système de corvées aussi strict, car les grands travaux y sont moins importants, en dehors du défrichement et de l'occupation de nouveaux territoires. Le mode de production «asiatique» sans grands travaux domine dans les plaines alors que les ethnies montagnardes conservent un mode de production tribal centré sur des communautés villageoises sans état.

 

Au système d'autorité par emboîtement (le roi, les Chao, les Naï et leurs clientèles de Phraï et de That) correspond un système religieux prébouddhiste qui s'est conservé dans le bouddhisme Théravada, religion officielle de ces royaumes.

Des génies (Phi) ont une assise territoriale et répondent à l'ordre social, caractérisé par une pyramide de clientèles.

 

A la capitale (Muang principal) et au roi ou prince correspond le Phi Muang, génie du Muang, et le Lak Muang, poteau de bois symbolisant le pouvoir dynastique.

 

Chaque province ou district (Muang) a son Phi Muang et son Lak Muang en parallèle avec l'autorité locale (Naï ou Chao).

 

Chaque village (Ban) a son esprit (Phi Ban) symbolisant la communauté dirigée par son chef (Puyaiban).

L'ensemble des maisonnées du Muang doit participer chaque année aux offrandes pour la fête du Lak Muang, concrétisant ainsi l'unité territoriale sous l'autorité du Chao Muang résidant dans la capitale (Muang).  


Le culte des Phi est repris en compte par le bouddhisme et les pagodes les plus importantes sont dans la ville principale à proximité du Lak Muang. Les superstructures idéologiques (culte des Phi) et juridico-politiques (appareil d'Etat) sont étroitement liées et assurent la reproduction du mode de production «asiatique» dominant. L'infrastructure économique reposant sur les communautés rurales est en dernière analyse déterminante à cause du surproduit qui permet l'existence de l'aristocratie et des moines bouddhistes. Lorsque le surproduit n'est pas important, on reste dans un mode de production tribal. L'appropriation totale du surproduit par l'aristocratie et les bonzes ainsi que le contrôle étroit du commerce ne permettent pas le développement d'une classe bourgeoise.


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