Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.
La « révolte des saints » (1)
Vers le nord, les « provinces intérieures » s’arrêtaient àNakhonratchasima, fondée par le Roi Naraï au XVIIème siècle. Au-delà, c’étaient des « provinces extérieures » comprenant en particulier la région de Suwannaphum - Roiet et du Nord-Est de la Thaïlande, sous contrôle siamois depuis la seconde moitié du dix-huitième siècle.
Les territoires tributaires les plus éloignés étaient Vientiane vers le nord et la province de Champassak (aujourd’hui Bassac) à l’extrême sud-est du Laos.
Devenus états tributaires au XVIIIème siècle, le contrôle siamois s’était accru après la destruction de Vientiane en 1827.
Jusqu'à l'arrivée des Français et de leurs « empiétement » comme disent les sources thaïes, à la fin des années 1880 et au début des années 1890, le pouvoir siamois s’était renforcé élargi tout au long de la région du Mékong inférieur sur la rive gauche du fleuve. Ce sont des « chaos mueang » qui administrent sous contrôle siamois l’actuelle province d’Attopeu
située à l’est de Champassak, à la frontière du Cambodge et du Vietnam, celle de Stung Treng
aujourd’hui au Cambodge, à la frontière sud des deux précédentes, celle d’Ubon et celle de Saravane
au nord des deux précédentes.
Le roi Chulaongkorn étend son pouvoir jusqu’aux limites de la chaine annamitique, le plateau de Kontum.
Il occupe le plateau des Bolovens dont nous allons reparler situé sur la province de Champassak et celle d’Attopeu. Cette vaste zone comprenant tout le sud du Laos actuel ainsi qu’Ubon, est essentiellement peuplée de « minorités ethniques », essentiellement des tribus kha, Alak, Loven sur le plateau des Bolovens et deSedang sur la chaine annamitique (plateau de Kontum) (2). La plupart de ces populations sont animistes mais les Sedangs sont christianisés, les missionnaires ont pénétré chez eux bien avant les Siamois, les Annamites et les Français.
Il est difficile de parler de « siamisation » de ces régions, même si le Siam pense qu’elles sont sous sa suzeraineté. Il en est de même des souverains annamites dont les prétentions seront reprises par la France. Ces populations payent plus ou moins régulièrement tribut à Bangkok par l’intermédiaire de leurs roitelets héréditaires. Mais elles jouent un rôle économique d’importance dans le commerce des esclaves, les plus fortes d’entre elles, les Sedangs alimentent le marché aux esclaves de Phnom-Penh, Bangkok et Bassac (3).
Jusqu’en 1880, ces régions sont sous contrôle au moins nominatif du Siam mais arrivent les Français en 1880. Après le traité de 1883 avec le Vietnam, la France souhaite renforcer ses frontières annamites avec le Siam. La seconde mission Pavie en 1889-1890 s’efforce d’éliminer les postes Siamois avancés dans les montagnes vers l’est, les incidents seront nombreux.
La troisième mission aboutit à l’occupation pure et simple du Laos en 1892-93.
En 1893, c’est l’incident de Paknam,
avec le traité de 1893 qui cède à la France la rive gauche du Mékong et interdit au Siam d’entretenir des forces armées à moins de 25 kilomètres de la rive droite. Par ailleurs, le traité franco-britannique de 1896 règle avec plus ou moins de précisions la question de la division du bassin du sud du Mékong mais n’interdit nullement à la France d’y faire progresser ses forces armées comme il en était pour le bassin de la Maenam.
Les relations entre le Siam et la France tournent à l’aigre, avec cette interdiction faite aux Siamois. Il leur est impossible d’y maintenir l’ordre. Cette rive droite devient alors un refuge et un havre de paix pour toutes sortes de bandes armées de bandits et de pirates venus de la rive gauche. Lorsque la France demande aux Siamois de rétablir l’ordre chez eux, le Siam répond à juste titre qu’il ne peut intervenir militairement dans cette zone. La situation s’envenime lorsque la France prétend étendre sa juridiction sur les provinces de Sayaboury
et Champassak sur la rive ouest du Mékong, au motif qu'elles étaient partie intégrante du royaume de Luangprabang.
Les problèmes de maintien de l'ordre dans la zone 25 km comprenant Sayaboury et Champassak seront constants jusqu'au traité de 1904 qui cède ces territoires contestés à la France.
Indépendamment de cette ambiance délétère sur les deux rives du Mékong, le politique intérieure siamois va mettre le feu aux poudres, l’enfer étant, comme chacun sait, pavé de bonnes intentions.
Côté français, la question est simple, l’esclavage est aboli dans nos colonies depuis 1848. Côté siamois, en 1874, intervient le décret du Roi Chulalongkorn sur l'élimination progressive de l'esclavage : toute personne née dans l'esclavage après 1868-1869 deviendra libre lorsqu’elle aura atteint l'âge de vingt et un ans. Le cours des esclaves sur le marché s’écroule d’autant que le ministre de l’intérieur publie en 1884 un décret interdisant la capture et la vente des esclaves Kha.
La traite est interrompue sur la rive droite avant même l’installation des Français sur la rive gauche.
Sur le plan fiscal, l’arrivée progressive des fonctionnaires du gouvernement central sur la rive droite devient de plus en plus pesante à partir de 1899. Les populations locales n’ont pas gagné au change. Les revenus tirés du commerce des esclaves disparait et celui du négoce de l’opium dont le gouvernement s’est réservé le monopole disparait aussi. Des féodaux cupides mais qui connaissaient peut-être les frontières à ne pas dépasser, sont remplacés par des fonctionnaires corrompus.
Du côté français, ce n’est pas mieux, la trilogie « liberté-égalité-fraternité » n’est pas applicable dans les colonies. Les impôts auraient triplé, l’esclavage est remplacé par le système des corvées. La Laos est considéré comme territoire insignifiant dont la gestion relève directement de Saigon. Sur les deux rives du Mékong, le système traditionnel est détruit de fond en comble.
La révolte (Prakotkanpibun ปรากฏการณ์ผีบุญ ou encore การขบถผู้มีบุญ kankhabotphoumibun « La révolte des saints »)
va éclater, les Siamois en attribuent la responsabilité à la politique française et les Français à la politique siamoise. Elle va partir de la région d’Ubon et faire tache d’huile.
En mars 1901, sur le plateau des Bolovens, le commissaire du gouvernement à Saravane, un certain Remy, est cerné avec une quinzaine de ses miliciens par 1.500 khas armés de fusils à pierre et ne dut son salut qu’à une « énergique résistance » (dixit Le Boulanger). Quelques jours plus tard, tout le plateau est soulevé. Le meneur est un « phoumiboun » ผู้มีบุญ, c’est-à-dire une « personne ayant des mérites », tout simplement un « saint », dénommé องค์แก้ว Ongkhaeo (aussi nommé Bac My, ce qui semble son nom vietnamien ?) qui a incontestablement des pouvoirs charismatiques.
Né dans une tribu Alak du Champassak,
il est fils d’un chef de village qui se targuait lui aussi de bénéficier de pouvoir surnaturels. Pour ses partisans sur les deux rives du Mékong, bouddhistes ou animistes, c’est un thévada (เทวาดา) une « créature céleste ».
Après son échec devant Remy, il se dispose à traverser le Mékong et attaquer Ubon. Frayeur des Siamois, mais il ne donne pas suite dans l’immédiat.
Par contre, au Laos français, d’autres saints, d’autres phou mi boun se déchainent.
En Avril 1901, un Français nommé Ménard est tué par des tribus Kha lors d’un voyage de de Saravane à Bassac. Des troubles éclatent sur le plateau de Kontum suscités cette fois par des Sedangs qui s’emparent d’un poste militaire français et assassinent un dénommé Robert, chef du poste.
La rébellion franchit alors le Mékong.
En mars 1902, des incidents sanglants éclatent à Kemmarat (เขมราฐ)
dans le nord de la province d’Ubon. Ongkhaeo et ses hommes brulent la ville et assassinent deux fonctionnaires siamois. Le gouverneur de la ville appelle au secours. Khorat enverra 400 soldats, 200 viendront de Surin, une centaine de Sisaket, une centaine d’Ubon et autant de Yasothon.
Ongkhaeo et ses hommes sont installés dans un village des environs, un millier de partisans organisés en unités de combat armés. Les troupes gouvernementales sont taillées en pièce, le prestige de Ongkhaeo monte en flèche, il recrute 1.500 nouveaux partisans et se dispose alors à attaquer Ubon. Le gouverneur réagit avec vigueur, il envoie une unité d’artillerie tendre une embuscade aux assaillants qui perdent 300 hommes dans la bataille, 400 sont fait prisonniers mais Ongkhaeo a réussi à prendre la fuite avec dix fidèles, déguisés en paysan.
La préoccupation majeure du roi était évidemment le problème des relations avec les Français et le déploiement de soldats thaïs dans la zone des vingt-cinq kilomètres le long du Mékong. L'ambassadeur français accepta alors de participer indirectement à l’extermination des rebelles, mais le vice-consul d’Ubon insista pour que les soldats thaïlandais à l’intérieur de la zone, soient accompagnés par un militaire français. Le roi remercia alors officiellement le ministère français des Affaires étrangères en insistant par contre sur le fait que ses forces étaient suffisantes et qu’il était hors de question les troupes françaises traversent le Mékong.
La révolte est éradiquée dans le nord-est, et des actions en justice sont engagées contre les dirigeants du mouvement des saints qui ont été capturés (et évidemment exécutés). Il n’en sera pas de même sur l’autre rive du Mékong !
Côté siamois, vers la fin d’avril 1902, Ongkeo remonte au nord avec ses hommes jusqu’à Mukdahan, traverse le Mékong à la hauteur de Savannakhet, et ils attaquent la garnison française en chantant et jouant du khène, convaincus que les munitions de la milice française se transformerait en fleurs de frangipanier. Ils laissent cent cinquante morts sur le terrain, mais Ongkeo une fois encore est passé au travers des fleurs de frangipanier !
Nous le retrouverons quelques années plus tard, le 30 novembre 1905, dans les montagnes de Phouluong au nord-est du Plateau des Bolovens, il attaque une garnison française, la massacre mais est capturé. Seul son fidèle lieutenant Ongkhomadam, a réussi à s'échapper. Ongkeo fait alors sa soumission à la France puis se réfugie au Siam. Mais il y acquiert des armes (la complicité au moins tacite du gouvernement siamois semble évidente ?) et revient attaquer les français dans les Bolovens.
Des négociations sont toutefois organisées par le gouverneur lao du Champassak avec les autorités françaises représentée par le commissaire français de Saravanne, Jean-Jacques Dauplay. La rencontre est organisée dans un sala, le fonctionnaire a caché un revolver dans son casque colonial et abat sournoisement Ongkeo. Il l’aurait ensuite fait décapiter en affirmant « le spectacle de Bac My gardant sa tête sur ses épaules aurait constitué un exemple déplorable pour les indigènes, voilà la preuve tangible que l’on ne peut s’attaquer impunément à la domination française ».
L’affaire fit quelque bruit à l’époque, la presse s’indigna de ce qui était un assassinat pur et simple mais la hiérarchie couvrit son sbire, fallait-il s’en étonner ? Une légende (?) veut toutefois que Ongkeo ait survécu à la tentative d'assassinat et se soit réfugié en Isan ? En tous cas, un stupa a été élevé sur le lieu présumé de sa mort au nord-est de la ville de Saravane, près de l’hôpital, dédié au « premier révolutionnaire lao ayant combattu pour l’indépendance contre le colonialisme français » la stèle situe sa mort à la fin des années 60 ou au début des années 70 ?
Mais les Français n’en ont pas fini, loin de là, avec le mouvement : Ongkhomadam continuera la résistance dans les Bolovens jusqu’à sa mort dans un combat contre les français en Janvier 1936. L'héritage spirituel de cette rébellion est toujours vivace au Laos.
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Des mouvements similaires eurent lieu à la même époque, révolte des Shans dans la province de Phrae (ขบถเงี้ยวเมืองแพร่ khabotgniaophrae « révolte des Shans ») où elle fut conduite non pas par un « saint homme » mais par le « chao muang » détrôné et son épouse
et dans les provinces malaises musulmanes du sud (กบฏพระยาแขกเจ็ดหัวเมือง khabotphrayakhèkdjéthuamuang « révolte des Rajahs des sept provinces »). L’étendard de la révolte y fut brandi par Tengku Abdul Kadir Kamaruddin (pour les thaïs พระยาวิชิตภักดี Phrayawichitphakdi ou encore พระยาปัตตานี Phrayapattani) dernier Rajah de Pattani, mort en exil en Malaisie en 1933.
Un mouvement surgi actuellement dans la province de Chiangmaï revendique l’indépendance au moins culturelle de l’ancien Lanna ; il n’est probablement que folklorique. Trouve-t-il son inspiration dans la révolte des saints de Phrae ? Mais, semble-t-il, l’anniversaire de la révolte est célébré de façon plus ou moins discrète par les descendants du dernier souverain de Phrae ?
La douloureuse question des provinces musulmanes du sud et du terrorisme sanglant qui y règne depuis lors, est toujours d’actualité.
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Les causes de cette révolte sont évidemment multiples sans qu’il soit possible de leur attribuer un ordre de priorité.
Pour Paul le Boulanger, elle tient essentiellement au fait de l’abolition de l’esclavage au Siam et à la disparition d’un trafic fructueux ? Il a le mérite de souligner, ce que ne font pas Dauplay et Bourolle, le rôle charismatique des chefs de la révolte.
Pour J.J. Dauplay, commissaire français de Saravane de 1905 à 1921, assassin mais lucide, elle aurait eu pour cause des réformes politiques et administratives appliquées trop rigoureusement et imposées trop rapidement sur les deux rives du fleuve. Ce sont à quelque chose près les conclusions de Bourotte ; et celles de Murdoch sans leur conférer un ordre de priorité.
Tous s’accordent à constater que la révolte a éclaté sur les deux rives du fleuve dans la région la plus pauvre du Siam. Aucune possibilité de travail rémunéré, aucun profit à tirer du travail de la terre, corruption de l’administration centrale (côté siamois) ou coloniale (côté français) pire que celle des féodaux, comment s’étonner que les populations aient vu dans le retour au système féodal traditionnel une panacée universelle ?
Aucun n’insiste assez sur l’aspect fiscal qui semble pourtant déterminant : le budget siamois n’est connu officiellement que depuis 1901. De 1899 (chiffres officieux) à 1909 (chiffres officiels), les rentrées fiscales globales ont été doublées, mais le montant des seules impositions recouvrées sur la population a sur la même période été multipliée par 5,7 avec deux augmentations brutales sur le budget, la première en 1903-1904 et une pire encore sur le budget 1908 – 1909 : De 1899 à 1903 – 1904, + 120 %, de 1903-1904 à 1908 – 1909, + 160 %, sur l’ensemble de la période, + 480 % (4).
Des deux côtés du Mékong, des changements politiques de grande envergure ont été mis en place dont le résultat fut tout simplement de disloquer les modèles économiques et les structures traditionnelles de la région du Mékong inférieur.
Dans la sphère politique, le pouvoir traditionnellement occupé par les élites locales avait été accaparé par des « étrangers », étrangers de Bangkok ou « étrangers » français. Les uns et les autres ont imposé le contrôle du gouvernement central, l’augmentation fulgurante des impôts, la modification du commerce traditionnel. Les dirigeants locaux ont perdu tout contrôle sur la fiscalité et la main-d’œuvre, et sans ce contrôle, leurs positions traditionnelles n'étaient plus viables. Ces dirigeants locaux ont été déplacés et remplacés par les bureaucrates du gouvernement, et les bases de leur pouvoir traditionnel ont été érodées alors qu’ils avaient probablement conservé leur charisme traditionnel et leur légitimité sociale aux yeux de la population locale. Ceux qui n'avaient pas pu devenir des fonctionnaires du gouvernement étaient furent mûrs pour conduire la rébellion. L'augmentation des taxes, un système bureaucratique mal compris, et la confusion sur qui était en situation d'autorité ont conduit beaucoup de membres de la population locale à soutenir le soulèvement.
La rébellion a été de courte durée au Siam. Elle n’a duré que quelques mois, marquant le succès de la politique administrative du roi. Il fallut trente ans aux Français pour la réduire.
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Ces mouvements centrifuges, à la périphérie du royaume, menaçaient évidemment le pouvoir central. C’est dans ce contexte que commença à s’élaborer en réponse l’idéologie officielle de légitimation de la monarchie absolue fondée sur les dogmes de la continuité historique et de l'intégrité culturelle qui se cristallisera sous le roi Rama VI, véritable architecte du nationalisme thaï, résumé dans le slogan « la Nation, la religion, le roi ».
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Nos remerciements, une fois encore, à notre ami doctorant Rippawat Chiraphong pour les précieux renseignements qu’il a bien voulu nous donner.
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Notes.
(1) Prakotkanpibun (ปรากฏการณ์ผีบุญ), c’est littéralement « la révolte des saints ». Les sources françaises ne sont pas nombreuses :
Paul Doumer qui fut résident général en Indochine y fait allusion (« L’Indochine française – souvenirs », à Paris, 1905).
Paul Le Boulanger lui consacre un chapitre (« Histoire du Laos français », à Paris, 1930).
J.J. Dauplay qui joua un rôle majeur se donne le beau rôle dans « Les terres rouges du plateau des Bolovens », à Saigon, 1929.
Bernard Bourotte est l’auteur d’un précieux « Essai d'histoire des populations montagnards du Sud Indochinois jusqu'a 1945 », publié dans le « Bulletin de la Société des études indochinoises » en 1955.
Nous avons aussi quelques articles dans « La quinzaine coloniale », tome XV du 10 janvier 1904, tome XVI de janvier 1905 et dans la « Gazette coloniale » du 15 octobre 1936.
Nous avons consulté le très intéressant article de John B. Murdoch « The holy’sman rebellion » publié en 1970 dans le journal de la Siam Society et celui de Geoffrey G. Gunn « A Scandal in Colonial Laos : The Death of Bac My and the Wounding of Kommadan Revisited » publié dans le même journal en 1985. Le premier est beaucoup plus complet que ce que le titre laisse entendre. Le second est fondé sur de solides recherches dans les archives de la France d’outre-mer à Aix-en-Provence.
(2) Sur cette mosaïque ethnique, voir l’article de A. Lavallée. (Année 1901). « Notes éthnographiques sur diverses tribus du Sud-Est de l'Indo-Chine » publié dans le Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient en 1901.
(3) On peut sans exagération affirmer que ces tribus vivaient dans ce que le droit international de l’époque appelait des « territoires sans maîtres » (voir « L’occupation des territoires sans maîtres » par Charles Salomon, à Paris, 1889). Ces territoires ont été explorés par Henri Maître entre 1909 et 1911, ils étaient alors toujours « sans maître » : voir « Mission Henri Maître (1909-1911), Indo-Chine sud-centrale. Les Jungles Moï, exploration et histoitre. » , par Henri Maître, à Paris en 1912.
Un aventurier français dont nous vous conterons un jour l’histoire, Marie-Charles David de Mayrena, réussit en 1889 avec l’appui des missionnaires, à se faire proclamer « Marie Ier, roi des Sedangs » par les populations. Son royaume éphémère succomba devant la pusillanimité de la France qui ne voulut pas lui accorder son protectorat, probablement pour ne pas irriter plus avant les Siamois qui avaient des prétentions sur cet « Hinterland » qui finira par être rattaché au Laos français au bénéfice des prétentions à la souveraineté annamite qui ne pesaient pas plus lourd que les prétentions siamoises.
(4) Les chiffres proviennent de la partie administrative de « l’Almanach de Gotha » à partir de l’année 1899, pour les années antérieures, il ne s’agit que d’estimations difficiles à utiliser puisque données tantôt en dollars tantôt en livres sterlings. Les ressources annuelles sont les suivantes :
1899 et 1900 = 30.500.000 ticals (estimation), dont 1.500.000 ticals proviennent de l’impôt « des indigènes ».
1901 – 1902 = 36.166.739 ticals, dont impôt 1.500.000 ticals toujours.
1902 – 1903 = 39.493.000 ticals, la part des impôts ne varie pas,
1903 – 1904 = 45.540.000 ticals, dont impôt 3.386.000 ticals !
1904 – 1905 = 47.500.000 ticals, la part des impôts reste stable,
1905 – 1906 = 53.619.569 ticals, la part des impôts reste stable,
1906 – 1907 = 55.470.020 ticals, la part des impôts reste stable,
1907 – 1908 = 50.261.170 ticals, la part des impôts reste stable,
1908 – 1909 = 59.200.717 ticals, dont 8.647.056 ticals proviennent de l’impôt !