Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.
Bouddha le Bienheureux a mené sa longue vie d'ascète vagabond dans l'austère simplicité de sa robe monastique.
Il existe de nombreuses variantes de statues de Bouddha, selon les régions et les époques d'origine. Ces variations sont probablement dues à l'adaptation facile du bouddhisme par les habitants de divers endroits. L'une de ces variantes est la représentation de Bouddha couronné et couvert de bijoux, d'or et de pierres précieuses comme un roi, généralement connue sous le nom de Bouddha Jambupati ou de style Jambupati. Cette parure est-celle déplacée sur la personne du grand ascète ? Les données de la tradition ne sont-elles pas bouleversées ? La réponse est dans ce sutta : Bouddha a porté au moins une fois le costume de roi des rois, il n'y a donc pas faute à le représenter sous cet aspect somptueux.
Le plus ancien manuscrit connu de ce sutta, sur feuille de palmier, provient de la Bibliothèque nationale de Paris, et pourrait remonter au règne du roi Narai. L'histoire est autrement plus ancienne et remonte même probablement à l'époque du vivant de Bouddha et à l'histoire d'une querelle entre deux royaumes bouddhistes du nord des Indes appartenant aux seize royaumes plus ou moins historiques, leur existence est bien connue
...et la personne au moins de l'un de ces roitelets, Bimbisara, est historiquement connue. Nous avons de lui une représentation lorsqu'il quitte sa capitale avec son escorte pour aller rendre visite à Bouddha.
Jambupati, roi de la ville de Panchala (เมืองปัญจาลนคร), était un des plus puissants souverains de la région d'Uttarapanchala (อุตตรปัญจาละ). Il possédait plusieurs objets magique (ของวิเศ), notamment des chaussures royales (ฉลองพระบาท) qui lui permettaient de voler dans les airs, des épées et un arc et des flèches ( พระขรร – ลูกศร) qui obéissaient à ses ordres en allant les exécuter au loin. Il avait aussi le pouvoir de se transformer en n'importe quelle autre créature. Il avait une reine nommée Kanchanadevi (นางกาญจนเทวี) et un fils appelé Sirikutaraja Kumara (ศิริคุตราช กุมาร). Une nuit qu'il était assis sur la terrasse de son palais, contemplant la pleine lune dans le ciel étoilé, ce spectacle fit naître en son cœur la fantaisie de parcourir les royaumes avoisinant. Il vola de ville en ville jusqu'au palais de Bimbisara (พระเจ้าพิมพิสาร) souverain de Magadha (มคธ), dans la ville de Rachakharue ou Rajagrha (ราชคฤห์).
Il fut étonné par sa splendeur. Désireux de connaître le monarque qui l'habitait, il se posa sur une terrasse mais en frappant pour qu'on lui ouvrit, il se blessa au genoux. Irrité, il jeta avec une force terrible son sabre sur la toiture mais le choc fut amorti par les créatures célestes (เทวาดา) qui le protégeaient et ne réussit même pas à trouver la tranquillité du palais.
De rage, il retourna dans son pays et prit son arc et ses flèches en donnant l'ordre qu'une flèche aille frapper le roi Bimbisara, qui son sabre lui coupe la tête et la lui ramène. La flèche atteignit le palais Elle se dirigea alors vers le Jetavana (เชตวัน), le temple où résidait Bouddha.
En effet le roi Bimbisara avait été troublé dans son sommai et, inquiet, à son réveil, était allé saluer le seigneur Bouddha pour lui demander conseil. La flèche ne put pénétrer dans le Jetavana. Bouddha avait créé une autre flèche magique qui était allé à la rencontre de la première, l'avait mise en fuite et contrainte de rentrer dans son carquois.
Jambupati eut alors recours à un autre maléfice recours aux manœuvres magiques : il se changea en deux serpents à cent têtes, crachant des flammes et de la fumée.
Mais, en approchant du Jetavana, ils rencontrent un Garuda (ครุฑ) effrayant avec mille têtes et cent mille ailes qui mit les serpents en fuite ce qui infligea une grande humiliation à Jambupati
Toutefois Bouddha omniscient connaissait l'avenir et savait que ce monarque prétentieux et colérique était néanmoins destiné à devenir arahan (อรหันต์) c'est à dire proche de la sainteté.
Il décida de la convertir. Il rencontra alors le Dieu Indra (พระอินทร์ ) et lui demanda de sommer Jambupati de venir, sous peine de la vie, rendre hommage au Roi des rois (ราชาธิราช- Rajâthiràt).
Indra, prit l'apparence d'un héraut, se rendit à la capitale de l'Uttarapanchala, entra au palais et, sans saluer le roi, lui notifia fièrement son message. À Jambupati qui s'étonnait de ce sans-gêne, il expliqua qu'un serviteur du Roi des Rois ne saurait se prosterner d’avant un roitelet aussi insignifiant que lui. Jambupati courroucé tira contre l'impertinent messager sa fameuse flèche, qui fut aussitôt mise en fuite par une arme plus puissante : poursuivie sans merci, la flèche s'enfonce dans- les forêts, dans la terre, la mer, le ciel, revient finalement vers son maître et mit le feu à la ville. Toute la cour s'enfuit. Le roi déconcerté demande au héraut divin d'éteindre l'incendie. Indra y consentit. Mais à peine sauvé du péril, le monarque entêté refusa encore d'aller rendre hommage au Roi des rois. Aussitôt il fut garrotté et tiré brutalement à bas de son trône par une force invincible : après avoir été traîné sur une distance de 36 brasses, il demande grâce et s'engage à partir le lendemain. Pendant ce temps, Bouddha avait convoqué les créatures célestes, Deva
Naga
Garuda, (เทวา- นาค- ครุฑ)
et leur donna l'ordre de construire instantanément une cité opulente et un palais splendide. Lui-même a pris la forme de Mahbrahma (มหาพรหม) – le Dieu suprême - et ses disciples celle de grands mandarins
. Jambupati, pour sa part, voulut donner au Roi des rois une haute idée de sa puissance, partit à la tête ses rois vassaux, de 100.000 mandarins et d'une armée innombrable. La route miraculeusement raccourcie par Bouddha lui permet de faire le trajet en un jour.
II arrive aux portes de la cité magique, où un gardien l'invita en termes impérieux à descendre de son éléphant : Jambupati offusqué veut faire tuer l'insolent. Mais celui ci, sans s'émouvoir, saisit par la queue et lance au loin l'éléphant, d'où le roi se trouva descendu en un clin d'œil. Il pénétra dans la ville dont les magnificences l'éblouirent. Il franchit des remparts d'or, de rubis et de saphir. Il traverse des marchés où des dieux ciselaient l'or et l'argent, où des déesses vendaient des 'fleurs, des fruits, des parfums et des gemmes. Dans des jardins, où les santals (จันทน์) en fleur
étaient animés par le plumage éclatant des perroquets, les Kinnarï (กินรี) faisaient entendre une musique céleste
et les Naghi (นาคี), sous la forme de femmes divinement belles, puisaient l'eau limpide des bassins.
Sur des places pavées de cuivre, cent mille guerriers s'exercent au maniement des armes. Une large avenue au sol de cristal s'offrait aux yeux de Jambupati, qui prit le cristal pour de l'eau et, craignant de se mouiller, retroussa prudemment son langouti, à la grande joie des assistants. L'avenue de cristal le conduisit à l'escalier du palais : il en monta les degrés et se trouve en présence d'une personne qu'il prit pour le Roi des rois mais ce n'était que le chef des portiers ! Jambupati pénètre dans le palais. Il vit 16.000 rois venus rendre hommage au grand roi, des officiers si majestueux qu'il les prit l'un après l'autre pour le Roi des rois. Enfin il aperçut celui-ci sur son trône, beau comme un dieu, vêtu d'habits lumineux.
D'abord écrasé par cette splendeur, l'incorrigible fat se demande si, après tout, ce roi au gracieux visage et à la voix harmonieuse était plus fort que lui : un défi aussitôt accepté lui en fournit la preuve immédiate : la flèche connut encore une fois la défaite. Alors le Roi des rois commença une longue exhortation : il parla du péché et.de l'enfer. Jambupati se déclara sceptique : il croirait à l'enfer s'il le voyait. Aussitôt s'ouvrit à ses pieds un gouffre d'où jaillirent les flammes infernales.
Le spectacle était si terrible que Jambupati ne résista plus ; il ôta sa couronne et se prosterna aux pieds du Roi des rois. Celui-ci, continuant son homélie, prêcha sur la douleur, l'impermanence du corps, la vanité des richesses. Après avoir montré l'enfer à Jambupati, il lui fit voir le ciel : s'il voulait parvenir au nirvana (นิพพาน), qu'il devienne moine (ภิกษุ)
rien ne vaut l'état religieux. A la fin de ce discours, Bouddha reprit sa forme naturelle. Jambupati demanda l'ordination, donna tous ses biens au Sangha (พระสงฆ์) et retourna chez lui pour conseiller à ses femmes et ses enfants de l'imiter. Il devient thera chao (เถรเจ้า), un moine ayant pratiqué les vertus pendant 10 ans.
puis il atteint le Nirvana