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Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.

INSOLITE - THONG-IN (ทองอิน), UN SHERLOCK HOLMES SIAMOIS

 

Il est né au début du siècle dernier, il s'appelle Thong-In Ratananet (นายทองอิน รัตนะเนตร์), le contexte imposant de traduire son nom de famille par  « qui a le regard perçant ». Il est né sous la plume du Prince héritier Vajiravudh (วชิราวุธ) qui monta sur le trône en 1910 à la morts de son père Rama V, sous le nom de Rama VI. Il est assurément un Sherlock Holmes Conan Dolye siamois, l'esprit aussi perspicace que l'Anglais.

 

 

Le roi est né le 1er janvier 1881. De la volonté de son père, le roi Rama V, il marque un événement dans l’histoire du Siam : pour la première fois, un futur roi allait étudier à l’étranger après avoir reçu une solide éducation de base au Palais royal. Le jeune  prince Vajiravudh partit en Angleterre en 1891, il avait à peine 10 ans. Ses études le conduiront alors en particulier à la Christ Church d’Oxford et au Collège Militaire Royal de Sandhurst. Il étudia en Angleterre  la littérature, la poésie, l'architecture, la musique, la danse, l'histoire, le droit et bien sûr l'art militaire en sus d'engagements officiels, il représente par exemple le Siam au couronnement du roi Édouard VII en mai 1902. Nous avons consacré un article à cet épisode anglais de sa vie (1).

 

 

C'est un homme de lettres, dès son plus jeune âge, il aime écrire, il écrit, il traduit, il adapte, traducteur, romancier, dramaturge  et également polémiste, nous avons consacré un article à cet aspect du personnage qui le caractérisa tout au long de sa vie et de son règne qui se termina par son décès en 1925 (2). Il le rendit sympathique jusque dans la presse communiste française ! 

 

 

Notons toutefois que ce scribouillard de la Pravda locale a voulu en 1922 faire un mot, mais il tombe à plat car il ne connaît rien du Siam et de l’activité débordante d'un roi dans la force de l'âge et de toutes ses réalisations – hors littérature – pour conduire son  pays au rang d'une grande puissance asiatique à la suite de son père

 

 

Il est mort prématurément en 1925 mais la direction qu'il voulut donner à son pays n'alla certainement dans le sens que ce qu'on pouvait souhaiter à Moscou ! Ne revenons pas sur les nombreux articles que nous lui avons consacré (3). Il continua inlassablement la politique de réformes entreprise par son père et son grand-père. Ne citons qu'un détail du quotidien. C'est à lui que 70 millions de Thaïs doivent d'avoir un état civil !

 

 

Dans le cadre de ses activités littéraires, nous lui devons les aventures de Thong-In (นิทานทองอิน – Les aventures de Thong-In), Thong-In (ทองอิน) étant le Sherlock Holmes du Siam. Il est accompagné de son alter ego, son poisson-pilote, son compagnon ou son faire-valoir, appelez-le comme il vous plaira, « son » Docteur Watson, M. Wat (พ่่อวัด) qui n'est qu'à moitié Watson, un avocat, qui est le narrateur de chaque histoire (« élémentaire mon cher Wat »)

 

 

On trouve encore dans quelques épisodes, l'éternel ennemi de Sherlock Holmes, l’infâme professeur James Moriarty en la personne de « Aï-Man à la main de fer » (Aï-Man Mulek- อ้ายมั่ันมั่ือเหล็็ก้).

 

 

Ce sont quinze nouvelles dont aucune ne dépasse 20 pages, une forme littéraire qu'utilisait volontiers Conan Doyle. 11 nouvelles dans un premier volume en 1912, suite et fin en 1921. 

La dernière édition du vivant du roi est cette compilation de 1921 dans laquelle il a parfois modifié le texte d'origine.

Il y eut de nombreuses éditions de ces nouvelles qui sont toutes signées d'un double pseudonyme dont s'affublait le prince, « Nai Kaeo » et « Nai Khwan » (นายแก้้ว – นายขวัญ), parfois  Ramjitti  (รามจิตติ).

 

 

 

Les premières parurent dans une revue littéraire crée par le prince intitulée Tawipannya (ทวีปััญญา). La revue, un épais volume d'environ 350 pages  qui avait débuté en 1904 et dont le prince était rédacteur en chef, cessa ses activités en 1907 mais les aventures de Thong-In continuèrent.

 

 

Les éditions et rééditions continuèrent, encore aujourd'hui mais Il n'y eut aucune traduction ni en anglais ni à fortiori en français. Elles ne sont pas d'accès facile mais à tout le moins les  11 premières nouvelles sont toutefois d’accès aisé sur le site de la Bibliothèque nationale :

https://vajirayana.org/นิทานทองอิน/

 

 

Une intéressante étude sur l'œuvre du « Conan Doyle siamois » sous la plume de Tony Waters, professeur à Leuphana Universität à Lüneburg (en Saxe) a été publié dans la livraison de juin 2024, n° 112, du Journal de la Siam society sous le titre « The “Consulting Detective” Nithan Thong-in » by King Vajiravudh. L’auteur en justifie avec la raison la publication en se proposant de donner un bref aperçu sur chacune des nouvelles dans l’ordre chronologique de leur publication, méthode que nous allons suivre même si nos commentaires sont divergents et si nous concluons de façon différente.  

 

 

« Le deuxième fantôme de Phra Khanong » (นากพระโขนงที่่สอง).

 

La première de ces nouvelles a été publiée dans le premier numéro de la revue du Prince et s’intitule « Le deuxième fantôme de Phra Khanong » (นากพระโขนงที่่สอง).

 

 

Le professeur Tony Waters ne semble pas s’étonner que cette première histoire soit une histoire de fantômes. Nak en effet est un fantôme de légende, mais spécifique à un secteur de Bangkok, Prakhanong (เขตพระโขนง). Le colonel à la retraite Choti (พ่ันโชติ) est perturbé par l’intervention de l’esprit de sa défunte épouse, Mme Nak (นางนาก้) et des apparitions du fantôme Nak. Il lui est impossible de trouver une nouvelle épouse. Le commissaire de police de Bangkok, un anglais, ricane de ces fariboles. Thong intervient alors assisté de  Wat comme médium et découvre qu’il s’agit d‘une mise en scène élaborée par le fils du colonel assisté d’un comparse. L’affaire est réglée et le colonel peut alors convoler. Tony Waters note que nous retrouvons l’intervention d’un médium dans une procédure policière dans un roman d’Agatha Christie de 1932 (Peril at End House) dans lequel Hercule Poirot, le héros, utilise les talents de son collaborateur occasionnel, le Colonel Hastings.

 

 

Le fantôme Nak pour sa part est au centre de nombreux films d’épouvante, le plus connu, «  พี่นาก » qui connut un phénoménal succès date de 2013.

 

 

 

 

« M. Suwan est victime d’un vol » (นาย สุุวรรณถููกขโมย) :

 

La nouvelle suivante a pour personnage principal Monsieur Suwan, propriétaire d'une bijouterie, victime d’un vol de bijoux d'une valeur de 7 500 bahts. La somme est considérable pour l’époque. La police britannique arrête à la hâte Monsieur Kon (นายกร), commis de Suwan. Thong-in le croit innocent. En enquêtant plus en profondeur, l’enquête est longue, de nombreux indices examinés à la loupe, Thong-in a découvert Suwan est l’objet d’une maladive accointance au jeu qui l'a conduit à orchestrer son propre cambriolage.

 

 

« Un secret d’État » (ความลัับแผ่่นดิิน) :

 

Cette troisième nouvelle nous conduit dans le monde des intrigues diplomatiques internationales à mettant en jeu la sécurité du pays. Un haut fonctionnaire siamois perd un projet de traité crucial, ce qui incite le gouvernement permanent à soupçonner M. Plian (นายเปลี่่ยน) mais en consultant. M. Thong-in. Celui-ci se déguise, crée un subterfuge astucieux en deux étapes en organisant un cambriolage puis simule un incendie criminel. Il bénéficie évidemment de l’aide de Monsieur Wat et du tout jeune chef d’un gang de rue, Monsieur Chaem (นายแช่ม่). Tout comme son modèle, Sherlock Holmes, Thong-In ne craint pas de s’associer aux pires canailles dans l’intérêt supérieur de son enquête. Le traître est démasqué et le Siam est sauvé. Il est évident que le prince connaît l’œuvre de Conan Doyle par cœur, je m’en expliquerai plus bas. Tony Waters voit dans cette nouvelle trois rappels d’œuvres dont deux de Conan Doyle, « Un scandale en Bohême » (1891)

 

 

et « Le traité naval » (1893)

 

 

textes qui seraient largement inspirés de celui d'Edgar Alan Poe (1844) « La lettre volée ». On peut penser que le Prince, féru de littérature, connaissait à la fois la littérature américaine et son célèbre et incontournable Edgar Poe.

 

De toute évidence, le Prince a une évidente prédilection pour le roman policier puisque, en dehors de Conan Dolye et Edgar Poe qui l'inspire, nous lui devons en 1918 la traduction en thaï de l'un des plus singulières aventures d'Arsène Lupin, les dents du tigre de Maurice Leblanc sous le titre Fansua (ฟันเสือ).

 

 

« Monsieur Sawat, parricide » (นายสวััดิ์ปิิตุุฆาต):

 

La police, alors aux mains des anglais, rappelons-le, découvre que Bangkok est inondée de fausse monnaie. En même temps, Monsieur Sawat est accusé d’avoir assassiné son père à la morphine. Monsieur Thong-in mène une longue enquête, démonte le réseau de fausse monnaie et ses efforts conduisent à la réhabilitation de Monsieur Sawat.

 

 

« Le bungalow du cheval et son médicament » (ยาม้้าบัังกะโล) :

 

Cette histoire nous conduit dans le monde des courses de chevaux. Le meilleur animal est celui de Monsieur Yi, un chinois (จีีนอี้้) qui perd de manière inattendue une course. Thong-in est appelé par Yi pour enquêter sur la tournure mystérieuse des événements. Il démêle un complot complexe impliquant la manipulation des résultats des courses et des gains financiers commis par Yi lui-même. L'histoire met en évidence l'intersection des affaires et du crime organisé. Thong-in sera en définitive chargé de surveiller discrètement le monde des courses

 

 

« La longue aiguille » (เข็็มร้้อยดอก)  

 

Thong-in doit résoudre le problème posé par la mort mystérieuse de Monsieur Bunkhong (นายบุุญคง), un haut fonctionnaire. La police est désemparée, mais l'observation attentive de  Thong-in le conduit à la découverte d'une longue aiguille, du type utilisé pour fabriquer des guirlandes de fleurs, tachée de sang. Démêlant les détails complexes, il découvre expose un complot impliquant un mari cruel, des tensions familiales, un meurtre discret et finalement un suicide. L'histoire explore les thèmes des conflits domestiques, de la vengeance, de la médecine européenne et des efforts que font les gens  pour protéger leurs secrets.

 

 

«Khong, chef de district du village de Yokhi » (กำำนัันคงบ้้านโยคีี) :

  1.  

C'est la première nouvelle qui nous fait quitter Bangkok pour la province de Saraburi ( สระบุรี)  et nous permet de faire connaissance avec le génie du mal en la personne de « Aï-Man à la main de fer » (อ้ายมั่ันมือเหล็็ก้) que nous rencontrerons dans trois autres nouvelles. Nous apprendrons que c'est la démon du jeu qui a détourné ce personnage du droit chemin. Il fait régner la terreur chez les villageois du district. Le commissaire de police responsable, Thap Kwang (ทัับกวาง) est conduit à solliciter le concours de Thong-in.  Après de longues péripéties dont la magie n’est pas absente, c'est en définitive le chef de district qui se retrouvera emprisonné.

 

 

« Le meurtrier de Bang Khun Phrom » (ผู้้ร้้ายฆ่่าคนที่่บางขุุนพรหม) :

 

Nous reconnaissons facilement le scénario du célèbre roman américain d'Edgar Allan Poe Double Assassinat dans la rue Morgue  dont nous connaissons tous le version traduite part Baudelaire.

Thong-in est appelé pour enquêter sur le meurtre de M. Rot (นายรอด ) qui se trouve dans une pièce d'une haute tour fermée à clé de l'intérieur, la gorge tranchée. Après avoir écarté l'implication d'un enfant, c'est un  orang-outan qui est le meurtrier

 

 

« Le millionnaire Monsieur Charun » (นาย จรููญเศรษฐีี) :

 

La fortune de M. Charun est une source de discorde après sa mort subite par empoisonnement. Selon la loi, qui héritera ? : Le frère survivant, qui est jugé pour meurtre, ou le nouveau beau-père ? L'enquête de Thong-in révèle la vérité derrière les stratagèmes, exposant les machinations du nouveau beau-père Monsieur Phun (นายพููน) qui sera en définitive reconnu coupable par le tribunal et condamné à mort.

 

 

« Raden Landai » (ระเด่่นลัันได) :

 

Tony Waters nous apprend sans nous donner plus de précisions – dommage -  que cette nouvelle est la reprise d'un vieux conte siamois dans lequel un mendiant et un vacher  se disputent l'amour d'une femme. Il nous rappelle aussi, ce qui est plus facile à vérifier, qu'une première source est celle d'une nouvelle de Conan Doyle publiée en 1891, « L’homme à la lèvre tordue »

et d'une autre plus ancienne, de 1890 « le signe des quatre ».

 

 

Watson y tombe amoureux de l'héroïne, Mary Morstan, qu'il demande en mariage ce qu'elle accepte , au grand agacement de Holmes, qui voit d'un mauvais œil ce sentiment qui pourrait le priver d'un précieux collaborateur. Cette jeune mariée avait demandé l'aide de Thong-In pour découvrir les activités mystérieuses de son mari, Monsieur Wong (นายวง) qui mène une double vie. Thong-In découvre le secret, Wong gagne des sommes considérables et exerçant une activité occulte de mendiant professionnel !

 

 

Le mystère est résolu et il n'y a pas eu crime. « Happy end », Wat découvre l'amour en la personne de la veuve qu'il épouse.

 

 

« Le collier de cent chang » (สร้้อยคอร้้อยชั่ง่)

 

Lorsque cette nouvelle fut écrite, le chang était une unité de poids qui pèse 604 grammes. C'est une bien triste histoire. Le collier qui appartient à Monsieur Thet (นายเทศ) est volé sur la tombe de sa femme décédée. L’enquête de Thong-In permet de découvrir un réseau de pilleurs de tombes et un trafic de bijoux de contrefaçon. Monsieur Thet perd la raison, Wat est désigné  comme son tuteur guère avant que son protégé ne décède.

 

 

 

Ces dernières nouvelles ont été insérées dans l'édition de 1921 :

 

 « Lettre de Perak » (จดหมายจา เมืืองเประ)

 

Il existe deux versions de cette nouvelle, la version de la compilation de 1921 différant de la version d'origine. Il existe un complot  pour acheter des armes aux rebelles de Malaisie britannique. Cet achat porterait atteinte aux termes du traité de 1909 entre la Thaïlande et la Malaisie, qui a officiellement établi la frontière entre le Siam et la Malaisie britannique. Comme pour tout traité de ce type, il existe des préoccupations en matière de sécurité nationale, et Thong-in est embauché en raison de la confiance que le gouvernement siamois a dans sa discrétion. La première version concerne la rébellion des états Shan de 1902, celle-ci celle des Indiens de Perak en Malaisie.

 

 

 

 

« Aï-Man Main de Fer » (อ้้ายมั มือเหล็็ก) :

 

Nous retrouvons le malfaisant Aî-Man main de fer après les mésaventures de Khong, chef de district du village de Yokhi. Aî-Man main de fer envoie une lettre de menaces aux autorités de la province demandant des compensations financières pour la mort de ses partisans la libération du chef de district  Khong. La tentative de négociation conduite par Thong-in conduit à une confrontation armée dans une forêt Seul en revient Wat qui doit retourner seul à Bangkok en ignorant tout du sort de son ami. Des cadavres retrouvés sur les lieux n'ont pas pu être identifiés.

 

 

 

« Une situation délicate » (หวุดุ หวิด) :

 

De retour à Bangkok,  Wat découvre que Chaem (แจ่ม), ce gamin des rues qui assistait souvent Thong-in en lui procurant des renseignements, est accusé de vol. Les compétences et le talent de l'avocat engagé par. Wat démontrent l'innocence de Chaem. Malgré ce résultat heureux, tous deux souffrent de la disparition de leur ami

 

 

« Le chef du district de Thap Kwang » (นายอำเภอ ทัับกวาง):

 

La dernière histoire finale tourne autour de l'arrivée du commissaire du district de Thap Kwang suite à la mystérieuse disparition de Thong-in et de Aï-Man à la main de fer. Il  informe Wat que deux corps ont bien été découverts : l'un est confirmé comme étant celui de M. Man Iron Hand, tandis que l'autre reste non identifié. Il est avec certitude que l'un est celui de Aï-Man à la main de fer. L'autre ne peut être identifié mais laisse place à l'espoir que le détective  ait survécu ?

 

 

Que dire de la fin de notre détective ?

 

On ne peut assurément pas la comparer à celle de Sherlock Holmes. Conan Doyle pensait entrer au panthéon des grands écrivains par le biais de ses ouvrages historiques que personne ne lisait et ne lit plus. Sherlock Holmes était écrit dans un but purement alimentaire et fit la fortune de l'auteur. Il prit la décision de le faire mourir. Il y a peut-être une raison bien banale : Doyle a écrit globalement 4 romans et 56 nouvelles concernant son héros. Il est une constante dans les œuvres de l'esprit, on le voit dans les romans, les films, les bandes dessinées, mettant en scène un personnage récurrent, la filière finit par s'épuiser. Holmes est apparu en 1887, le dernier roman date de 1915.. L'imagination des auteurs n'est pas inépuisable et en général, les derniers épisodes ne sont pas de la qualité des débuts. Conan Dolye prétendit qu'il n'en pouvait plus de son personnage, soit. Les fidèles lecteurs sont anéantis, soit. Il va falloir le ressusciter dans La Maison vide  une histoire fuligineuse et plus encore. Mais la cupidité de Doyle va le reprendre au vu d'un contrat pharaonique pharaonique avec les États-Unis.

Ces préoccupations très terre à terre ne furent évidemment pas celle du Roi qui estima probablement que la filière était épuisée et y mit fin d'une façon beaucoup plus élégante que celle de Conan Doyle.

 

 

 

 

Et les ouvrages français traduits ou adaptés par le roi ?

La liste des ouvrages français (en dehors de la traduction des exploits d’Arsène Lupin) traduits ou adaptés par le roi est significative et nous éclaire quelque peu sur ce monarque écrivain.

Il choisit parmi les humoristes les meilleurs, de grands classiques du rire :

หมอจำเป็น (mo champen) est une adaptation de Molière Le Médecin Malgré Lui   mais après ce grand classique, il plonge chez les contemporains.

ล่ามดีn(Samdi) est une adaptation de la comédie de Tristan Bernard L'Anglais tel qu'on le parle 

เกินต้องการ (koen tongkan) est aussi une adaptation de la comédie de Tristan Bernard Le poulailler

วิไลเลือกคู่ (wilai lueakkhu) est une adaptation de la comédie d'Eugène Labiche Les Vivacités du Capitaine Tic 

หลวงจำเนียรเดินทาง (luang chamnian doenthang) est une adaptation de la très célèbre comédie du même Labiche Le voyage de Monsieur Perrichon

ตบตา (topta) est une adaptation de La Poudre aux Yeux toujours de  Labiche.

หมอจำเป็น (mo champen) est une adaptation de Molière Le Médecin Malgré Lui 

คดีสำคัญ (khadi samkhan) – est une adaptation de Un Client Sérieux de Georges Courteline.

Mais le roi ne donne pas que dans le classique comique français quoique ce soit un aspect sympathique du personnage.

Il adapte deux auteurs aujourd'hui injustement sombré dans l'oubli et tous deux ayant appartenu au personnel colonial qui eurent comme écrivains leur heure de gloire au début du siècle dernier et qui – dès la veille de la première guerre mondiale – contestaient le système colonial français. Je n'en cite qu'un puisque l'action se déroule en Indochine française. เกียรติยศญี่ปุ่น (kiattiyot yipun) adapté de L'Honneur japonais de Paul Anthelme Bourde nous concerne moins directement puisqu'il se situe au Japon, mais n'oublions pas qu'en 1905, ces Japonais ont démontré que les blancs n'étaient pas invincibles, à la bataille de sur terre et celle de Tsoushima sur mer.

Le roi nous dote en 1912 de ตั๊กแตน (takkataen), une adaptation de Les Sauterelles d’Emile Fabre. L'action se déroule en Indochine française, elle est d'un humour grinçant qui n'a pas du susciter que des sourires dans le microcosme des coloniaux de Saigon. Je me contente de citer au sujet de cette pièce  Le Journal du 12 décembre 1911. Ce quotidien tire alors à 500.000 exemplaires.

 

«  Monsieur Emile Fabre attaque-t-il le monde colonial ? Le théâtre du Vaudeville va représenter ce soir une pièce de M. Emile Fabre, Les Sauterelles, qui ne passera pas inaperçue. Les pièces de M. Emile Fabre, d'ailleurs, ne passent jamais inaperçues… mais Les Sauterelles surtout doivent faire du bruit. Les Sauterelles, c'est le nom que donnent les indigènes de certaines colonies aux envahisseurs blancs. Ce titre et ce sujet ont fait craindre que M. Emile Fabre n'attaquât violemment, ne dépeignît en traits aigus et satiriques notre personnel colonial. On s'est ému, on a prédit des incidents. Mais voici ce qu'a bien voulu, hier, me dire M. Emile Fabre » :

« Moi ! Dénigrer et ridiculiser ceux qui, un peu partout, dans le monde, tiennent et défendent notre drapeau, jamais de la vie ! J'ai seulement voulu signaler ce qui me paraît une erreur, ce qui me semble un péril. Aux colonies, on ne tient pas assez compte des indigènes. Ils ne supportent pas, avec la résignation qu'on croit, le joug des Européens. Moukden et Tsoushima ont ruiné le prestige des blancs. Partout germe et lève la révolte. Dans cinquante ans on ne pourra plus gouverner les trois quarts de nos colonies sans l'assentiment des indigènes. Voilà tout ce que j'ai voulu dire…. »

 

 

Un cri lucide qui ne fut pas entendu. Hasard ? 1911 plus 50 ans nous conduit en 1961

 

Il faut en tous cas en déduire que ce choix représente la piètre opinion que le roi avait de la politique coloniale française.

 

La liste des œuvres littéraires du roi, en thaï, en anglais ou en français se trouve (en particulier sur deux sites Internet, le premier en thaï

https://politico-militaire/lino_autophagie?haut_id=384&auth_name=พระบาทสมเด็จพระมงกุฎเกล้าเจ้าอยู่หัว

l'autre en anglais. Tous deux précisent toutefois que la liste, déjà longue, n'est pas exhaustive. Effectivement, je ne trouve ni sur l'un ni sur l'autre deux articles que le roi a écrit dans le Journal de la Siam society sur la question de la romanisation du thaï sous sa signature :

THE ROMANISATION OF SIAMESE WORDS BY HIS MAJESTY THE KING. Volume IX de 1912

NOTES On the proposed system for the Transliteration of Siamese words into Roman Characters BY HIS MAJEST Y THE KING.  Volume X de 1913

Ce sujet fut débattu dans cette docte revue depuis sa fondation en 1904. Nous lui avons consacré deux articles (4)

 

 

 

NOTES

 

1 ) voir notre article

159. L'éducation anglaise du roi Rama VI :

https://grande-et-petites-histoires-de-la-taillanderie-blog.com/article-159-l-education-anglaise-du-roi-rama-vi-125066391.html

 

2) Voir notre article

 

173. Rama VI, écrivain, traducteur, journaliste, promoteur de la littérature au Siam.

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2015/03/173-rama-vi-ecrivain-traducteur-journaliste-promoteur-de-la-litterature-au-siam.html

 

3) Voir nos articles

 

  

155. Que savons-nous de Rama VI (1910-1925) ?

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/article-155-que-savons-nous-de-rama-vi-1910-1925-124661814.html

156. Introduction au règne de Rama VI (1910-1925)

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/article-156-introduction-au-regne-de-rama-vi-1910-1925-124688629.html

157. La vie privée de Rama VI, un règne de transition ? (1910-1925). (1)

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/article-157-la-vie-privee-de-rama-vi-un-regne-de-transition-1910-1925-1-124775080.html

162. Les "Tigres sauvages" de Rama VI. (1910-1925)

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/article-162-les-tigres-sauvages-de-rama-vi-1910-1925-125174342.html

163. Rama VI crée le mouvement des Scouts en 1911.

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/article-163-rama-vi-cree-le-mouvement-des-scouts-en-1911-125174353.html

168. Le "nationalisme" du roi Rama VI (1910-1925).

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/article-168-le-nationalisme-du-roi-rama-vi-1910-1925-125257916.html

171. Rama VI face à deux modèles : le modèle occidental et le modèle « siamois ».

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2015/02/1-171-rama-vi-face-a-deux-modeles-le-modele-occidental-et-le-modele-siamois-2-le-modele-siamois.html

172. Rama VI et l’économie du Siam. (1910-1925)

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2015/03/172-rama-vi-et-l-economie-du-siam-1910-1925.html

177 - Le Siam de Rama VI retrouve tous ses droits souverains en 1925

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2015/04/177-le-siam-de-rama-vi-retrouve-tous-ses-droits-souverains-en-1925.html

A 434 - ท้าวหิรัญฮู - L'ÉTRANGE HISTOIRE DE HIRAN, L'ANGE GARDIEN DU ROI RAMA VI

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2021/07/a-432-l-etrange-histoire-de-hiran-l-ange-gardien-du-roi-rama-vi.html

A88. Un bracelet de Rama VI offert à une danseuse, réapparaît.

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/article-a88-un-bracelet-de-rama-vi-offert-a-une-danseuse-reapparait-113269810.html

H 30- LE ROI VAJIRADUDH OU L'HISTOIRE D'UN RÊVE MILITAIRE CONTRARIÉ.

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2019/05/h-30-le-roi-vajiradudh-ou-l-histoire-d-un-reve-militaire-contrarie.html

H 62- LE ROI RAMA VI (VAJIRAVUDH) ET LES ARTS : ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ. (1910-1925)

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2020/12/h-62-le-roi-rama-vi-vajiravudh-et-les-arts-entre-tradition-et-modernite.1910-1925.html

 

4) Voir nos articles

 

 A91. La romanisation du thaï ?

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/article-a91-la-romanisation-du-thai-114100330.html

165. Le roi Rama VI et la romanisation du thaï.

https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/article-165-le-roi-rama-vi-et-la-romanisation-du-thai-125174362.html

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