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  • : Le blog des Grande-et-petites-histoires-de-la-thaïlande.over-blog.com
  • : Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.
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  Il était une fois Alain, Bernard …ils prirent leur retraite en Isan, se marièrent avec une Isan, se rencontrèrent, discutèrent, décidèrent un  jour de créer un BLOG, ce blog : alainbernardenthailande.com

Ils voulaient partager, échanger, raconter ce qu’ils avaient appris sur la Thaïlande, son histoire, sa culture, comprendre son « actualité ». Ils n’étaient pas historiens, n’en savaient peut-être pas plus que vous, mais ils voulaient proposer un chemin possible. Ils ont pensé commencer par l’histoire des relations franco-thaïes depuis Louis XIV,et ensuite ils ont proposé leur vision de l'Isan ..........

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8 novembre 2024 5 08 /11 /novembre /2024 02:59

 

Je ne pensais pas apporter une suite à cet article publié il y a quatre ans (déjà) mais deux commentaires que je viens de valider me l’imposent en quelque sorte (1)

 

 

Le premier est signé Rainer Nyberg : « Ce sont des histoires intéressantes. Je crois qu'Henri Déricourt était également impliqué dans ces opérations clandestines en Indochine » (These are interesting stories. I believe Henri Dericourt was also involved in these clandestine operations in Indochina).

Il reçoit une réponse sous la signature de Paul Simpson : « Oui, Henri Déricourt pilotait un Beechcraft et je soupçonne que cela était lié à ces pilotes... Il a une histoire très intéressante et j'ai sérieusement des doutes quant à sa mort dans un accident au Laos... »

(Yes Henri Dericourt flew a beechcraft and i suspect it was linked to these pilots...He has a very interesting story and i seriously have my doubts that he died in a crash in laos....)

 

 

Notre article rappelait la genèse de ce qu’on a appelé « Air Opium » dont la néfaste activité dans ce trafic s’est déroulé de 1955 à 1965 en Indochine avant que le relais ne soit repris par la C.i.a. avec « Air America ».

 

 

Rappelons brièvement que ces opérations nauséabondes étaient liées au retrait militaire de la France en Indochine et que l’ambiance n’était pas à la francophilie dans le Vietnam indépendant depuis 1954. De nombreux anciens combattants, colons, commerçants honnêtes ou pas, restaurateur, tenanciers d’établissements plus ou moins louche, se retrouvèrent par centaine au Laos. Par ailleurs, le monopole d’Air France avait été sinon brisé du moins assoupli.  Beaucoup créèrent de petites compagnies aériennes charters, collectivement appelées « Air Opium ». Fondées officiellement pour fournir des transports pour les hommes d'affaires civils et les diplomates, elles ont progressivement établi le lien du Laos avec les marchés de la drogue du Sud-Vietnam qui avait disparu avec le départ de l'armée de l'air française. Il fallait des pilotes chevronnés, les conditions sont difficiles, les pistes d’atterrissage de fortune ne sont le plus souvent que des chemins de terre. Ainsi était Déricourt.

 

 

Qui était-il ? J’ai essayé de le découvrir en faisant abstraction de tous les renseignements fantaisistes ou romanesques que l’on trouve sur lui, notamment par les articles de presse le concernant, surabondants lors de son retentissant procès.

 

 

Henri Eugène Alfred né le 2 septembre 1909 à Coulonges dans l'Aisne.

 

Il suivit une formation de pilote civil avant de rejoindre l'armée de l'air française comme pilote d'essai en 1939. Lors de la défaite française, il retourna à l'aviation civile, il ne craint pas d'avouer qu’il fit alors du marché noir avec l’occupant car il était incontestablement cupide…

.

 

...mais patriote aussi puisqu’il rejoint la Grande-Bretagne en août 1942 et se retrouve au sein du « Special Operations Executive (SOE) ». Parachuté en France, sa mission est de trouver des terrains d'atterrissage adaptés et d'organiser l'accueil des agents amenés par avion.

 

 

Sa mission fut certainement efficace. Toutefois, il apparaît que son réseau fut infiltré par la Gestapo qui y a introduit un agent double. Il fut soupçonné par certains de ses compagnons. Les enquêtes auxquelles se livrèrent les britanniques n’eurent aucun résultat.

Ses mérites de résistant furent récompensés par la Légion d’honneur le 27 juillet 1946.

Il réintègre Air France comme pilote de ligne et héros de la résistance.
 

 

Le 15 avril 1946 toutefois, il fut arrêté par Scotland Yard alors qu'il allait décoller de l'aérodrome de Croydon en emportant 14 kilos de platine, des lingots d'or et des devises. Il sut trouver la somme de 500 livres nécessaire à payer l'amende dont il avait été frappé et fut relâché en quelques heures mais à la suite de cette affaire, il fut expulsé d’Angleterre et radié du personnel d'Air-France.
 
Nous ne savons ce qu’il fit jusqu’à son arrestation en novembre 1946, les enquêtes effectuées sereinement après la libération en France puis en Allemagne révélèrent son activité d’agent de la Gestapo. L’histoire de son activité de résistant et d’arpète de la Gestapo excède évidemment le cadre de ce blog. Je ne cite que le témoignage de l’un des responsables allemand de la Gestapo interrogé lors d’une méticuleuse instruction « Le capitaine Gilbert (son nom de code à la Gestapo) nous a permis de réussir nos plus belles affaires de contre-espionnage de toute la guerre. Il a d'ailleurs fréquemment reçu des primes de plusieurs millions… »
 

 

L’instruction fut longue, les archives allemandes devaient livrer leurs secrets, il comparaît devant le Tribunal militaire qu’en juin 1948. Il a loué les services de Vincent de Moro-Giafferri, alors maître incontesté du barreau, il a la réputation de demander des honoraires pharaoniques, mais Déricourt est riche. Il est acquitté, contrairement, il faut bien le dire, à toute attente.
 

 

L’argumentation de son conseil, telle du moins que relatée dans la presse, est singulière : même si l'accusation pouvait apporter de nombreuses preuves indirectes suspectes contre Déricourt, elle ne pouvait en réalité lui imputer aucun acte de trahison précis. C’est clair, vous ne pouvez pas donner le nom de ceux que la trahison de Déricourt a envoyé en camps de concentration, cruelle imprécision. J’y vois, mais je peux me tromper, un acquittement au bénéfice du doute, il est certes préférable d’être acquitté au bénéfice du doute que d’être condamné au poteau mais être acquitté au bénéfice du doute en l’occurrence, c’est dire « on vous acquitte mais nous ne sommes pas dupes ». Il est un autre élément qui me paraît d'évidence : les tribunaux militaires à cette époque n'avaient pas d'états d'âme à prononcer des condamnations à mort dans des circonstances douteuses mais pouvait-on alors laisser l'opinion publique croire qu'au sein des chevaliers blancs héros de la résistance, il pouvait y avoir des agents de la Gestapo ?
 

 

 
 
Blanchi certes, mais mal blanchi, il ne peut trouver du travail puisqu'il a été licencié d'Aix France qui a le monopole en France mais un bon pilote peut trouver du travail partout. Il disparaît pour aller on ne sait trop oů ? Nous le trouvons au Laos se livrant à des observations aériennes au Laos en 1952-1953 et 1958 pour rectifier la carte routière du nord du Cambodge et à des observations archéologiques du le site de Champassac qui n'a pas alors été dégagé. Mais cette information n'apparaît pas dans la presse à grande diffusion Je ne l'ai trouvée que dans le Bulletin de l'école française d’Extrême orient dans son numéro 50-2 de 1962 (Observations archéologiques aériennes sous la signature M. Déricourt, pilote au Cambodge et au Laos) et dans nul autre organe de presse alors que l'affaire fit la « Une » tout au long du procès de 1946. J'ai consulté pourtant de nombreues revues (3) :La ;modique redevance annuelle que,lui verse la Légion d'honneur est payée par un virement bancaise ce qui n'est pasnune adresse/ Déricourt fut oublié et bien oublié pendant près de 14 ans, sa mort étant enregistrée au 20 novembre 1962
 
.
Participa-t-il aux opérations lucratives de Air Opium comme on l'a beaucoup dit et écrit ? Il n'y en a aucune preuve formelle mais, d'une part,  connaissant la cupidité du personnage, ce n'est pas une accusation gratuite, loin de là, d'autre part ; le rapport était évidemment bien supérieur à celui de l'archéologie aérienne. Marché noir avec les Allemands, collusion avec la Gestapo, trafic de metaux précieux, le trafic d'opium ne ferait qu'ajouter à la liste de ses turpitudes
Déricourt ne va pas claironner ses illicites activités sur les toits. La pratique de la clandestinité lui a appris qu'en la matière, le silence est d'or. Beaucoup de héros de la résistance payèrent de leur vie de n'avoir pas suivi cette règle.
Il est un autre élément dont il est nécessaire de tenir compte : Dans un très bel article publié avec toute la sérénité du recul, en 2001, Maurice Braun, qui fut un authentique résistant et chef d'un important réseau consacre de longs développements au cas Déricourt Nous y apprenons que tous ses compagnons de combat étaient convaincu de la culpabilité de Déricourt et avaient fort mal ressenti son acquittement et auraient volontiers rendu leur propre justice, Braun ne l'écrit pas mais le pense tout fort.
 

 

Maurice Braun estime que l'anéantissement du réseau "Prosper", dont Déricourt est responsable, fut pour le résistance l'un de ses plus retentissants echecs, du niveau de la capture de Jean Moulin.
 

 

Coïncidence ? Hasard ? Alors que la présence de Déricourt au Cambodge et au Laos est révélée dans une revue publiée fin 1962, celui-ci meurt victime d'un accident d'avion dans la région de Sayaburi, au Laos. Son corps n'a jamais été retrouvé et beaucoup pensent, notamment dans l'entourragvee d'ancien résistants de Braun que cette mort avait été simulée afin de lui permettre de commencer une nouvelle vie sous un autre nom. Restons en là des hypothèses et reprenons la conclusion de Braun «  Ici se présente un cas si complexe, si ambigu, si controversé, qu’il constitue un de ces trois ou quatre mystères de la guerre 1939/1945 qui ne seront probablement jamais éclaircis ».
 

 

Il serait toutefois dommage de ne pas conclure ce bref article sur une conclusion plus plaisante. Nous savons que les légionaires perçoivent un bien modeste traitement. Ainsi pour Déricourt mais son compte bancaire bénéficia après sa mort du virement de deux échéances, 1963 et 1964.
 

 

Il s'agissait d'un total de 35 francs pour les deux échéances. Il s'agissait certes de nouveaux francs. La Trésorerie générale de la Seine s'en apperçut en 1966 et invita la Grande Chancellerie à emettre un titre de recouvement contre les héritiers. Si j'en crois le convertisseur en ligne de l'INSEE, cette somme correspond à environ 50 euros de l'heure à laquelle j'écris. Courteline est toujours présent ;
 

 

 
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NOTES
 
(1) https://grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-blog.com/2020/10/a-394-bangkok-luang-prabang-saigon-des-francais-au-coeur-du-trafic-de-l-opium-avec-air-opium.html
 
(2) LA RÉSISTANCE FRANCO-ANGLAISE EN TOURAINE, EN FRANCE in . Mémoires de l Académie des sciences, arts et belles lettres de Touraine. 2001.

 

(3) Revues consultées : Combat - Franc Tireur - France Libre - La vigie marocaine - Le Figaro – L'Humanité - Le populaire du centre – L'époque - L'Est republicain - Maroc Matin -La vigie marocaine - Pégase - La petite Gironde – L'aurore – Les ailes – Libération – Navigation – L'écho du Centre .

 

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