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Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.

A 349- L'ÉLÉPHANT BLANC AUX DÉFENSES NOIRES: MYTHE FONDATEUR ET MOUVEMENT MESSIANIQUE DES JAWIS DE PATTANI. (THAÏLANDE DU SUD)

 

 

Nous vous avons déjà parlé de la province de Pattani à l’extrême sud du pays, siège d’un royaume historique passé tardivement à l’islam, dont l’histoire reste nébuleuse, fondée de légendes transmises par voie orale et mises tardivement par écrit (1). Dans cet article, nous avions déjà expliqué  que nous utilisons l’orthographe thaïe de «Pattani» (ปัตตานี) parce que nous vivons en Thaïlande, de préférence à celle de «Patani» (ปาตานี) qui a une connotation irrédentiste, un débat qui n‘est pas le nôtre.

 

 

 

 

A la légende du cerf chevrotain blanc que nous vous avons contée en correspond une autre, toujours vivace dans la mémoire collective des autochtones, celle de l’éléphant blanc aux défenses noires.

 

 

 

 

Nous l’avons découverte dans la thèse du professeur Pierre Le Roux, « L’Éléphant Blanc aux Défenses Noires des Jawi de Thaïlande du Sud : mythe fondateur  et mouvement messianique » qui nous parle en particulier de la fondation mythique du sultanat de Pattani liée à l’apparition de cet étrange animal (2). Pierre Le Roux est actuellement l’un des seuls ethnologues sinon le seul à avoir étudié pendant de longues années sur le terrain le peuple jawi et à en parler avec pertinence. Il est le découvreur de cette légende inconnue jusqu’alors sauf peut-être d’érudits malais. Remercions notre ami Philippe Drillien de nous l’avoir fait découvrir.

 

 

 

Quelques mots sur les Jawi.

 

 

Population musulmane d’environ trois millions de personnes localisée dans la partie thaïlandaise de la péninsule malaise, ils représentent la majorité des habitants de ce que l’on nomme « Pattani » ou  « Patani » qui  englobe la province administrative  de Pattani et celles de Yala et Narathiwat correspondant à l’ancien sultanat de Pattani absorbé par le Siam en 1909.

 

 

 

 

Pratiquant majoritairement l’Islam sunnite, Pierre Le Roux les distingue des Malais proprement dits avec lesquels ils coexistent. Ils sont les descendants des habitants originaires de l’ancien sultanat de Pattani. Ils parlent en général deux langues, le thaï du sud (phak thaï - ภาษาภาคใต้) et le Jawi (phasa yawi -ภาษายาวี) que l’on parle également dans le sultanat malais limitrophe de Kelantan qui se distingue fortement du malais officiel et n’est probablement pas compris à Kuala Lumpur.

 

 

 

 

Si l’Islam fut présent à Pattani depuis le début du XIVe siècle, il concernait  quelques princes de la bande littorale et non le peuple à proprement parler. La religion du Bédouin, nous apprend Pierre Le Roux qui écrivait dans sa thèse en 1994, fut implantée tardivement: « la religion du prophète n’a été véritablement  répandue à Patani au sein de la majorité rurale et roturière que depuis une quarantaine d’années à peine».  Il nous donne une précision significative dans un article de 1993 : «Avant les années cinquante, le pèlerinage à La Mecque, s'il existait, était onéreux et limité en nombre. Par exemple, il y a moins de trente ans, les Jawi élevaient des chiens pour notamment la chasse aux porcs sauvages, alors que, de nos jours, l'élevage et même le simple contact physique des chiens est un interdit religieux aussi fort que la prohibition du porc. Les nouveau-nés étaient présentés devant le supérieur de la pagode bouddhique et baignés rituellement. La cérémonie de l'entrée dans l'islam elle-même - la circoncision - était précédée d'un bain rituel à la pagode il y a encore une dizaine  d'année» (3).

 

 

 

Persistent toujours aujourd’hui dans les campagnes des pratiques animistes rituelles d’influence hindoue. Nous ne sommes pas en pays bouddhistes à l’abri de ces survivances (4).

 

 

Au sein du pays Jawi, Pierre Le Roux distingue le pays d’amont, celui des hautes terres du Sud, et le pays d’aval, celui du littoral ou du Nord. Le pays d’amont est le plus authentiquement jawi. Il est symbolisé par la figure mythique  de l’éléphant blanc aux défenses noires, qui représente l’ancien sultanat et nourrit une croyance  millénariste singulière.

 

 

 

 

Leurs dialectes sont différents et leurs mythes aussi puisque la figure mythique de ceux du littoral est tout aussi extraordinaire du chevrotain blanc que nous connaissons. (1)

 

 

La méconnaissance des Jawi des hautes terres par les ethnologues occidentaux  tient à une raison simple : la situation de guérilla qui atteignit un sommet dans la décennie 1970 jusqu’à la moitié des années 80, empêchant les investigations poussées dans le pays des hautes terres et cantonnent les rares chercheurs étrangers ou thaïlandais quasiment à la seule  municipalité de Pattani ou Yala, et à leurs alentours immédiats, par sécurité, c’est-à-dire en pays du sud.

 

 

 

Pierre Le Roux est probablement le premier à avoir découvert le mythe de l’éléphant blanc aux défenses noires, symétrique à celui du chevrotain blanc. Il a passé dix ans parmi eux sur les hautes terres et parle leurs dialectes ce qui lui a permis de recueillir leurs traditions orales et ses nombreux récits qui évoquent un éléphant dans l’origine de Patani.

 

 

Voici cette histoire telle qu’il nous la livre et que nous vous résumons, ce sera un périple dans l’ancien sultanat de Pattani.

 

 

 

La légende.

 

 

Un jour du temps jadis, il y a longtemps, l’éléphant blanc aux défenses noires émergea sous les yeux médusés de pêcheurs au travail sur la grève. C’était le premier de tous les éléphants, l’ancêtre des éléphants. Avant cet événement, les hommes ne savaient pas à quoi ressemblait un éléphant. Après  cela, les hommes ont reconnu les animaux qui avaient leur apparence et les ont nommés d’après leur ressemblance avec ce premier éléphant. Apeurés, ils s’enfuirent aussitôt et s’en furent respectueusement prévenir leur roi. Celui-ci s’empressa de faire prévenir à coup de canon et au tambour de bois l’ensemble de ses nombreux sujets - son royaume était très  peuplé afin qu’ils se réunissent en conciliabule.. Puis, le roi dit qu’il irait voir sur place dès le lendemain de quoi il retournait, qu’il serait accompagné pour cela des officiers et soldats de son armée et que les pêcheurs devraient lui montrer le chemin. Le lendemain, ils s’en furent donc en une  longue procession et atteignirent enfin la plage, mais aucun éléphant n’était en vue. Le roi demanda alors aux pêcheurs présents sur le bord de mer : «Où est donc apparu cet éléphant ?»  «Ici, sur ce sable blanc, sur ce morceau de plage-ci (pata ni). À cet endroit en effet, près de l’actuelle Pattani, le sable, normalement de couleur ordinaire, était resté immaculé. Ému par ce phénomène extraordinaire qu’il interpréta comme un signe céleste, le roi décida de bâtir là sa nouvelle capitale et de lui donner le nom de «Patani» en souvenir. Autrefois, l’endroit se nommait Kolo Mekoh (« embouchure de La Mecque »). D’après la tradition orale toujours, c’est de là qu’embarquaient les premiers pèlerins sur des navires à voile, près du palais royal et de l’ancienne cité à Kruese (กรือเซะ), ancienne capitale du sultanat et située dans le tambon de Tanyong Lulo (ตันหยงลุโละ) « le Cap des perles »

 

 

 

 

ou se trouve l’une des plus anciennes mosquées du pays; la Mosquée de Pittu Kraban  (มัสยิดปิตูกรือบัน).

 

 

 

 

L’endroit fut donc nommé « Patani ». Ensuite le roi se mit aussitôt sur la piste de l’éléphant qui s’était enfoncé dans les terres vers le sud en suivant ses traces jusqu’à un village du district (amphoe) de Yaring (ยะหริ่ง)

 

 

 

 

dans le sous district (tambon) de Yamu (ยามู) au bord du golfe.

 

 

 

 

L’éléphant est toujours suivi à la trace par le roi et son escorte jusqu’à un village du district de Panarae (ปะนาเระ) toujours sur les rives du golfe

 

 

 

 

et ensuite dans un autre village à proximité de Saiburi (ไทรบุรี)

 

 

 

 

 

où l’on trouva les traces de l’éléphant dans un village où se trouvait un siamois qu’on appelait, en raison de son grand âge «Père» (พ่อ - pho). Il montra du doigt la direction prise par l’éléphant. (En thaï, montrer du doigt se dit «chi» (ชี้) .C’est pourquoi les vieillards sont appelés  «pho chi» (พ่อชี้), «ceux qui indiquent la bonne direction».)

 

 

 

(Très symboliquement la bonne direction n’est pas seulement celle de l’éléphant mais probablement aussi celle de la sagesse que l’on prête aux vieillards.

 

Notons que de Pattani à Saiburi en longeant la côte la distance est d’environ 40 kilomètres.)

 

 

 

Après cela, l’éléphant continua de fuir, s’enfonçant dans la montagne, en bifurquant vers l’intérieur des terres en direction de la «Montagne d’or».

 

 

(Nous n’avons pu situer cette montagne qui se trouve probablement dans le parc forestier Prasat nangphomhom (วนอุทยานประศาทนางผมหอม) situé à environ 15 kilomètres à l’ouest de la côte)

 

 

 

 

Le roi et ses compagnons l’y suivirent.  Arrivé au sommet, l’éléphant déshydraté eut soif et perça la roche à l’aide de ses défenses. L’éléphant descendit ensuite dans un  village du district de Thung Yang Daeng (ทุ่งยางแดง)

 

 

(Ce district est à environ 15 kilomètres au sud-ouest du parc.)

 

 

 

Là l’un des cornacs royaux venu du nord (probablement du Siam), de religion hindouiste,  épuisé, s’arrêta, se cacha pour échapper au courroux de son roi car il avait manqué à celui-ci incapable d’attraper l’éléphant blanc aux défenses noires en dépit de plusieurs occasions de le faire.  Après le départ de la troupe royale il se convertit à l’islam et se maria avec une fille de du lieu, fondant un village et engendrant sur place une descendance métisse qui parlait et parle encore une langue étrange mêlant le malais et le thaï.  L’éléphant se dirigea vers un  village du district de Kapho (กะพ้อ).

 

 

(Ce district est à environ 15 kilomètres au sud-est de celui de Thung Yang Daeng.)

 

 

 

 

Les habitants de ce village tirèrent sur lui avec un canon et le canon éclata. Une fois le canon éclaté, la poursuite continua. Les hommes du roi parvinrent presque à attraper l’éléphant dans un village du district de Ruso (รือเสาะ) actuellement dans la province de Narathiwat.

 

 

(Ce district est à  une vingtaine de kilomètres  de Kapho.)

 

 

 

C’est alors que l’éléphant excédé se retourna contre ses poursuivants et les chargea dans un village fondé par les survivants de la charge situé dans l’amphoe de Raman (รามัน) dans la province actuelle de Yala.

 

 

(Ce district se trouve entre Kapho  et Ruso.)

 

 

 

 

Prenant encore la fuite, l’éléphant fit un grand tour et se retrouva dans un village de l’amphoe de Banang Sata (บันนังสตา) toujours dans la province de Yala.

 

 

(Ce district est à une trentaine de kilomètres au sud-ouest de Raman.)

 

 

 

 

Les poursuivants réussirent à l’encercler, il les chargea à nouveau et s’enfuit.  Pour l’attraper enfin, les poursuivants tressèrent une énorme corde de rotin en forme d’animal (naga) qu’ils mirent sur leurs épaules. Ils parvinrent à se saisir de l’animal et l’entravèrent par un pied à l’aide de cette corde. L’endroit où il fut attaché porte le nom en langue locale d’«entrave de l’éléphant » dans un village du tambon de Kapho (กะพ้อ).

 

 

(C’est donc un retour en arrière?)

Les villageois interrogés par Pierre Le Roux lui expliquèrent que cette entrave, lovée comme un serpent, aux torons serrés, se trouvait naguère encore sur place sous la forme d’une liane pétrifiée ou d’une roche allongée, au pied d’un arbre auquel elle était fixée. Quiconque touchait cette liane mourait foudroyé.

 

 

Cet arbre et cette liane se trouvaient dans une rizière quelques années auparavant jusqu’à ce qu’un paysan défriche et laboure le terrain pour planter des hévéas  et détruise la relique que surmontait une fourmilière. Mais l’éléphant réussit à arracher la corde et à s’enfuir. La poursuite reprit donc. Les poursuivants réussirent à le faire entrer dans un enclos) à buffle existant toujours dans le tambon de Kapho. Cet enclos était prêt lorsque l’éléphant arriva à  proximité. Les poursuivants avaient abattu des arbres pour la construction du piège, mais ce fut en vain. Ils en fabriquèrent d’autres,  ils ne fonctionnèrent qu’une fois mais l’éléphant réussit encore à fuir et à tout détruire. Nous étions dans un village du district de Kapho.

 

 

Dans un autre village des environs, un cornac venu du nord manqua de se saisir de l’éléphant. Il préféra se convertir à l’islam et épouser une fille de l’endroit plutôt que de rentrer encourir le courroux de son roi, engendrant une nombreuse descendance parlant un sabir de jawi et de  siamois.

 

 

Toujours dans les environs, l’un des poursuivants tomba raide mort d’épuisement au moment même où il touchait l’éléphant. Son corps fut enterré à l’endroit même de sa chute une fois la poursuite achevée mais il grandissait étrangement d’une coudée de trop à chaque tentative jusqu’à ce que la «tombe du géant» atteigne une longueur de dix-sept coudées (près de 9 mètres). C’est une tombe sacrée que les gens viennent mesurer pour consulter les oracles en même temps qu’ils demandent à ce géant d’intercéder pour eux, leur apportant chance et fortune (5).

 

 

Puis tous suivirent encore une fois l’éléphant qui se mit à gravir la montagne Budô (บูโด) et y grimpa  (6).

 

 

(Le massif montagneux se trouve à environ 50 kilomètres au sud  de Ruso.)

 

 

 

Le roi dit alors: « pas moyen de continuer» et cessa la poursuite. En fait, il était épuisé et  n’en pouvait plus. L’éléphant continua de fuir la montagne Budô.  Personne ne sait vers où il se dirigea finalement… Il disparut dans la forêt. Peut-être  se  dirigea-t-il ensuite vers la Malaisie actuelle, nul ne le sait. Le roi et ses hommes, de fait, abandonnèrent la poursuite. Ils firent demi-tour et rentrèrent chez eux en direction d’un village en bord de mer du district de Yaring appelé «le village des  crabes» (บ้างปู) car ils y sont abondants. En fait, la procession des hommes du roi s’allongea sur la route comme les crabes qui avancent en file indienne, et continua jusqu’à l’amphoe municipal de Pattani

 

 

 

Comment interpréter ce mythe ?

 

 

Pierre Le Roux en a entendu diverses versions qui ne varient guère entre elles, ce qui établit son implantation dans la mémoire collective.

 

 

 

Pour les gens des hautes terres, l’éléphant blanc aux défenses noires fonde et légitime le royaume de Patani, engendrant les premiers établissements humains de la région. Il en est une trace que nous enseigne Pierre Le Roux: Le nom des villages ou se déroule ce périple s’attache à l’un de ses épisodes: Ils sont en dialecte jawi transcrit aujourd’hui en thaï. Nous ne vous les avons pas cités (en dehors du village des crabes) car nous ignorons le jawi ainsi d’ailleurs que le malais. Il faut y voir la trace de l’évolution de la population, partie de la bande littorale seule peuplée à l’origine pour s’enfoncer à l’intérieur des terres probablement alors boisées jusqu’à la forêt la plus dense. C’est une leçon de géographie mythique à l’intérieur des trois provinces de Yala, Pattani et Narathiwat qui constituaient l’ancien royaume de Pattani.

 

 

 

La valeur prophétique et le millénarisme.

 

 

C’est un aspect totalement inédit et inexploité que nous dévoile Le Roux. Voilà bien un aspect qui est loin de nos habitudes mentales même si le millénarisme ne nous est pas inconnu, l’attente de l’âge d’or marqué par la venue de l’homme providentiel  (7). Il est omni présent chez les mahométans.

 

 

Citons Pierre Le Roux «Ce mythe a en effet chez les Jawi d’aujourd’hui une valeur prophétique, proche  d’un mouvement messianique, et il est d’ailleurs clairement dit dans un autre grand récit de la tradition orale jawi que, lorsque resurgira l’éléphant blanc aux défenses noires, ce sera la « guerre sainte. Le retour de cet éléphant sacré annoncera la suprématie des habitants de Patani sur leur Terre pendant quarante ans – retour à l’âge d’or du sultanat, avant une nouvelle disparition suivie de l’apparition d’un naga, siamois cette fois, qui redonnera le pouvoir aux Thaïs pour un second cycle de quarante ans. Puis le naga cédera à son tour la place au Mahdi, le dernier prophète, pour un ultime cycle de quarante ans annonciateur du chaos de l’apocalypse, c’est-à-dire la fin du monde».

 

 

Cette tradition et ce rappel au Mahdi est significative sinon inquiétante: Le mahdi  est un descendant du Bédouin Muhammad qui, en tant que chef pré-désigné et infaillible, se lèvera pour lancer une grande transformation sociale, en vue de restaurer la pureté des temps premiers en plaçant toutes choses sous une direction divine. L’histoire a connu de nombreux Mahdis auto proclamés lors des guerres coloniales qui se sont caractérisés par leur échec (8).

 

 

Aujourd’hui Daech (alias l’état islamique) d’islamisme chiite qui a prétendu faire renaître le califat supprimé par Attaruk en 1924 ne proclama jamais directement l’arrivée du mahdi. Son prophète qui prétendait connaître l’avenir, Zarqawi se contenta d’annoncer sa probable arrivée avant qu’il ne disparaisse sous des bombes américaines et – probablement – s‘auto proclame Madhi.

 

 

Du côté de sunnites auxquels appartiennent pour l’essentiel les Jawi, l’ancien président iranien Mahmoud Ahmadinejad a toujours proclamé sa conviction devant  l’imminence de l’avènement du Mahdi, Mohammad al-Mahdi, le douzième imam mort selon le dogme vers 260 de l’hégire (874 de notre ère) pour réapparaître à la fin des temps afin d’instaurer sur terre une ère de justice et de paix.

 

 

Nous avons lu avec attention le mémoire  d’Aurélie Kerkadi présenté pour l’obtention du Master Moyen-Orient de l’Université de Genève en 2017 sous le titre «Le mahdisme : son évolution et ses liens avec le terrorisme islamiste du XXIème siècle». Elle écrit dans ses conclusions «Ainsi à travers ce travail, nous avons voulu montrer les ponts conceptuels existant entre les mouvements de contestations instrumentalisant la religion. Notre objectif était de dépasser les définitions parfois exiguës de certains concepts comme l’islamisme, le millénarisme, le mahdisme et le salafisme, ceci dans le but de montrer que ce type de démarche peut aider à appréhender de manière différente la situation du terrorisme islamiste actuelle, cristallisée par sa manifestation la plus médiatique, celle de Daech»  ce qui est parler pour ne rien dire.

 

 

Nous préférons la conclusion de Pierre Le Roux:

 

 

« Alors, les Jawi continuent de rêver, qui de regarder la forêt au sommet de la montagne, qui de scruter l’horizon et la mer,  dans l’espoir d’y discerner à nouveau la silhouette fantastique et peut-être salvatrice de l’éléphant blanc aux défenses noires».

 

 

NOTES

 

 

(1) Voir notre article  H 40  « POUR MIEUX COMPRENDRE LE PRÉSENT DE LA PROVINCE THAÏE DE PATTANI, UN PEU D'HISTOIRE ».

http://www.alainbernardenthailande.com/2019/07/h-40-pour-mieux-comprendre-le-present-de-la-province-thaie-de-pattani-un-peu-d-histoire.html

 

 

(2) Il a recueille des traditions orales restées inédites. Il a soutenu sa thèse en 1994 à l’École des Hautes Études en Sciences sociales de Paris (mention très honorable avec félicitations du jury) sous la direction de Georges Condominas.  Ethnologue à l’Université de Strasbourg, il est arrivé à Patani au mois de mars 1988. Chargé d'une enquête socio-économique pour le compte de l'Institut de recherche sur le caoutchouc, il poussa tout d'abord ses investigations sur l'ensemble des quatre provinces de Patani, Yala, Narathiwat et Songkla, appréhendant l'entité culturelle des Jawi globalement. Par l'établissement de relations de confiance durables, tant avec les autorités thaïes qu'avec les Jawi, l'enquête de socio-économie se transforma à partir de 1990 en enquête ethnologique sans entrave particulière, fait relativement nouveau. La somme des données recueillies, pour la plupart inédites, amena, à partir de 1992, la création d'une structure de collecte, d'analyse, de conservation et de diffusion des données: le Projet Grand Sud. L'apprentissage et la pratique des deux langues locales (thaï et jawi) joua un rôle important dans la qualité des relations établies avec les habitants de cette région, de même qu’une longue présence sur le terrain, et donc également sur la qualité des matériaux recueillis : Il donne un exemple pour mieux mesurer l'importance des obstacles à cette entreprise, les premiers récits de la tradition orale (mythes, contes) ne lui furent proposés par les Jawi qu'au terme de trois années de présence. Elles étaient jusque-là restées inédites. Il put ainsi mettre en place un réseau pour le collationnement systématique des pièces de la littérature orale dans le but de créer des « archives orales de Thaïlande du Sud » ; En dehors du collationnement des manuscrits en jawi disséminés dans les villages des provinces de Patani, Yala et Narathiwat, sur parchemin, sur papier et sur lamelles de bambou, le projet comporte l’organisation de fouilles archéologiques, la réalisation de films documentaires, la publication d'ouvrages, la construction d'un musée de plein air en collaboration avec d'autres chercheurs

 

 

Sur le Projet Grand Sud voir l’article de Jacques Ivanoff, et Eric Bogdan : « Thaïlande. Dans les faubourgs de Patani... Les fours de Ban Di (Patani, Thaïlande du Sud) et la petite histoire du projet Grand Sud»  In  Bulletin de l’École française d'Extrême-Orient. Tome 82, 1995. pp. 329-337;

 

 

 

Pierre Le Roux, en dehors de multiples articles dans des revues érudites, il a écrit en collaboration avec Claire Merleau-Ponty en 2005 un ouvrage destiné au grand public «Histoires des Jawi. Un peuple de Thaïlande».

L’un de ses conférences est disponible en ligne :

https://www.youtube.com/watch?v=-Uka8eZolY8&fbclid=IwAR3y8cb5WbEXVBmHkv_7TTOZ1XP4-7xShtt81O7S0GFCFqK5Z5_1imM0EtA

 

 

(3) Pierre Le Roux: «Les "têtes nouvelles". Intrusion d'une forme rigoriste de l'Islam chez les Jawi, Malais de Thaïlande»  In : Revue  du monde musulman et de la Méditerranée, n°68-69, 1993. États modernes, nationalismes et islamismes. pp. 201-212; Il donne d’autres précisions qui expliquent le cheminement de cette région vers un islam fondamentaliste: «Avec le développement du pays et de celui du trafic aérien, les Jawi allèrent plus nombreux et plus facilement en pèlerinage. De même, les uléma arrivèrent plus nombreux. Puis, avec l'indépendance des pays du Moyen-Orient et la découverte des gisements pétrolifères, les aides financières à la construction de mosquée, les bourses d'études théologiques, se firent plus nombreuses ». 

 

 

(4) Voir nos articles

 

22 «Notre Isan, bouddhiste ou animiste ?»

http://www.alainbernardenthailande.com/article-22-Mecklembourg-Poméranie-Occidentale-78694708.HTML

A 331 « LE CHAMANISME TOUJOURS PRÉSENT DANS LE BOUDDHISME DE L’ISAN»

http://www.alainbernardenthailande.com/2019/09/a-331-le-chamanisme-toujours-pressent-dans-le-bouddhime-de-l-isan.html

INSOLITE 4 «THAÏLANDE : BOUDDHISME, HINDOUISME ET … ANIMISME AVEC LE CULTE DES ESPRITS ET AUTRES CROYANCES MYTHIQUES ET LÉGENDAIRES»

http://www.alainbernardenthailande.com/2016/12/insolite-4-thailande-bouddhisme-hindouisme-et-animisme-avec-le-culte-des-esprits-et-autres-croyances-mythiques-et-legendaires.html

 

Pierre Le Roux cite la persistance de pratiques ancestrales malgré l‘opposition des autorités religieuses et en passe de disparition: le recours à la thérapeutique traditionnelle des guérisseurs largement mêlée de magie, la pratique de l'art martial malais, le dia, croyances relatives à la magie du  kriss, cette arme mystique à lame spiralée...

 

 

(5) Il y a dans la région de Pattani une tradition ancienne de tombes de géants, toutes découvertes par Pierre Le Roux. Il nous cite l’exemple d’une tombe de géants qui subsiste dans un village situé à la pointe sud de la baie de Pattani dans le district de Yaring et objet d’une autre légende : Voir Pierre Le Roux « Bédé kava' ou les derniers canons de Patani»  In: Bulletin de l’École française d'Extrême-Orient. Tome 85, 1998. pp. 125-162;

 

 

 

(6) S’étendant sur la province de Narathiwat, le district de Raman, la province de Yala et le district de Kapho, cette montagne d’une altitude moyenne de 1000 mètres fait partie de la chaîne de montagnes Sankala Kiri qui divise la frontière entre la Thaïlande et la Malaisie fut un haut lieu du terrorisme des maquis depuis le début des insurrections, quelles qu’elles soient. Elle est en effet le plus haut sommet de la région comprise entre Sai Buri et la frontière malaise et, sans descendre de ses lignes de crêtes couvertes de forêt dense difficilement accessibles, elle  permet de rejoindre l’État de Kelantan et d’atteindre celui de Perak en Malaisie; Elle est actuellement parc national (Uthayanhaengchatbudo Sungaipadi - อุทยานแห่งชาติบูโด-สุไหงปาดี).

 

 

C’est probablement dans les profondeurs de sa jungle que se terrent encore les derniers négritos de Thaïlande?

Voir notre article  INSOLITE 9 «LES NÉGRITOS DE THAÏLANDE, DERNIERS REPRÉSENTANTS DES HOMMES DU PALÉOLITHIQUE.»

http://www.alainbernardenthailande.com/2016/12/insolite-9-les-negritos-de-thailande-derniers-representants-des-hommes-du-paleolithique.html

 

 

 

 

7) Les chrétiens (orthodoxescatholiques  et  protestants) et les musulmans (chiites  et  sunnites), prévoient un retour de Jésus sur terre avant la fin des temps.

 

 

 

 

Nous connaissons celui de ce texte mystérieux et d’origine  incertaine qu’est l’Apocalypse de Saint Jean. Il nous décrit le Millénium, cette période de mille ans durant laquelle, sous la conduite du Christ revenu sur terre, régneront la paix, la justice et la fraternité, avant la fin ultime marquée par la Résurrection des morts et le Jugement dernier. «jamais plus ils ne souffriront de la faim ou de la soif, jamais plus ils ne seront accablés par le soleil ni par aucun vent brûlant. Car l’Agneau qui se tient au milieu du trône sera leur pasteur et les conduira aux sources de la vie» (Apocalypse de saint Jean, 7, 16-17).

 

 

 

 

Le Bouddhisme avec sa conception cyclique de l’histoire enseigne néanmoins la fin de chaque cycle de dégénérescence, l’harmonie primitive est rétablie par la venue d’un nouveau Bouddha, le Bouddha du futur.

 

 

 

 

(8) Les mahométans ne sont pas plus à l’abri que les chrétiens des faux prophètes «Si quelqu'un vous dit alors: Le Christ est ici ou Il est là, ne le croyez pas car il s'élèvera de faux Christs et de faux prophètes; ils feront de grands prodiges et des miracles, au point de séduire, s'il était possible, même les élus » (Mathieu XXIV – 24).

 

 

 

 

 

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G
Je ne me vois pas commenter que c'est génial, inattendu, vraiment intéressant à chaque nouvelle histoire...et pourtant c'est le cas, chaque nouveau sujet est une découverte, je clique sur votre lien et c'est un réel petit moment enluminé pendant la lecture, mes amis me définissent tous comme une personne avec une insatiable curiosité dans dans tous les domaines possibles… Peut être est-ce cela qui qui fait que je trouve un tel plaisir à vous lire à chaque fois? ???? Votre blog est une exception absolue dans son genre, il survole à des années lumière au niveau intellectuelle toutes les tentatives de sites internet créés par des particuliers et ayant pour sujet la Thaïlande. Si je ne craignais d’exagérer je rajouterais que le mot génial concernant votre blog ne serait en rien une exagération. Mince je viens de le faire????…Mais je maintiens que je n’exagère en rien????
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G
Nous n'avons pas de prétentions au génie mais tout simplement de vous informer. Amicalement
G
Je ne me vois pas commenter que c'est génial, inattendu, vraiment intéressant à chaque nouvelle histoire...et pourtant c'est le cas, chaque nouveau sujet est une découverte, je clique sur votre lien et c'est un réel petit moment enluminé pendant la lecture. Mes amis me définissent tous comme une personne avec une insatiable curiosité dans dans tous les domaines possibles… Peut être est-ce cela qui fait que je trouve un tel plaisir à vous lire? ????Votre blog est une exception absolue dans son genre, il survole à des années lumière au niveau intellectuelle toutes les tentatives de sites internet créés par des particuliers et ayant pour sujet la Thaïlande. Si je ne craignais d’exagérer je rajouterais que le mot génial concernant votre blog ne serait en rien une exagération. Mince je viens de le faire ???? mais je maintiens que je n'exagère pas ????
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