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Bernard, retraité, marié avec une femme de l'Isan, souhaite partager ses découvertes de la Thaïlande et de l'Isan à travers la Grande Histoire et ses petites histoires, culturelles, politiques,sociales ...et de l'actualité. Alain, après une collaboration amicale de 10 ans, a pris une retraite méritée.

214 – COMBIEN DE COUPS D’ÉTAT, DE RÉBELLIONS, DE RÉVOLTES ET DE SOULÈVEMENTS EN THAÏLANDE DEPUIS LE DÉBUT DU SIÈCLE DERNIER ?

214 – COMBIEN DE COUPS D’ÉTAT, DE RÉBELLIONS, DE RÉVOLTES ET DE SOULÈVEMENTS  EN THAÏLANDE DEPUIS LE DÉBUT DU SIÈCLE DERNIER ?

Nous nous intéressons naturellement aux événements récents survenus en Thaïlande, en particulier depuis la proclamation de la loi martiale le 20 mai 2014. Nous nous sommes étendus sur les nombreux coups d'état ou des événements similaires dans le passé. Mais, aussi singulier que ce soit, nous restons perplexes sur le nombre réel de ce que nous appellerons du terme générique de « tentative pour changer le gouvernement en dehors de toute procédure démocratique». Nous avons tenté d’en faire l’inventaire, restons modestes, il n’est pas certain qu’il soit exhaustif mais il est en tous cas beaucoup plus abondant que ce qu’on lit en général. Nous en avons déjà analysé certains, d’autres vont suivre. Rébellions, soulèvements populaires, régicide, coups d’état, certains réussis qui aboutissent à un changement de gouvernement, tentatives infructueuses aussi et mouvements « centrifuges »… (1)

 

***

 

Il est nécessaire, avant de répondre à la question, de bien la poser et de savoir quels sont les données du problème : qu’entendons-nous par « coups d’état, rébellions, révoltes et soulèvements » ?

 

Il y a d’abord le « coup d’état », une action militaire visant à éliminer un gouvernement par la force et de le remplacer par une autre. Pour mériter (si l’on peut dire) ce qualificatif, le coup d’état doit avoir réussi.

 

S’il ne réussit pas, il devient une « rébellion » ou pire, une « trahison ».

 

Si les opérations aboutissent au changement de la nature fondamentale du gouvernement, elles méritent le nom de « révolution », le meilleur exemple en est le renversement de la monarchie absolue en 1932.

 

Un « soulèvement populaire » est caractérisé par des manifestations violentes ou non violentes provenant non plus seulement de militaires mais des citoyens de base ou d’une fraction des citoyens de base qui aboutit à un changement de gouvernement couronné de succès.

 

Nous avons aussi rencontré des « coups d’état silencieux » aboutissant à un changement de gouvernement résultant de pressions ou de manœuvres souterraines pas exclusivement d’origine militaire ou un changement brutal de gouvernement venu de l’intérieur même du gouvernement ou de sources étrangères.

 

Le « coup d’état judiciaire » enfin, c’est tout simplement un changement brutal de gouvernement provoqué par les instances judiciaires.

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Citons le cas heureusement unique dans l’histoire de la Thaïlande contemporaine du régicide qui fut pourtant dans les siècles antérieurs une procédure sinon normale du moins habituelle de la transmission du pouvoir.

 

Les tentatives séparatistes lorsqu’elles échouent (ce qui fut le cas en Thaïlande au cours de cette période) deviennent selon le côté où l’on se place des actes de résistance ou des trahisons. Il n’y a pas loin du terroriste au résistant.

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Certains de ces « événements » pourront évidemment et selon les sensibilités être considérés comme n’étant pas un « coup d’état » au sens large.

 

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Commençons - donc notre inventaire « à la Prévert », le vingtième siècle a commencé le 1er janvier 1901, c’est également l’année d’un premier mouvement de protestation.

 

1erRébellion : La « révolte des saints », en réalité une rébellion selon notre terminologie, mouvement de résistance aux réformes administratives du roi Chulalongkorn commencé en 1901. Nous en avons parlé d’abondance (2). Elle est curieusement oubliée de Russel (note 1-3)

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(2d) Rébellion : La « Rébellion des Mongs » en 1902 : C’est une rébellion des populations Shans qui éclate à Phrae en juillet 1902 avec peut-être une action occulte des responsables français qui jouèrent un rôle assez trouble via le consul de Nan, Lugan,  hostiles aux tentatives du monarque d’asseoir son emprise administrative dans le nord-ouest. Elle a été noyée dans le sang en 1904 avec l’aide de troupes danoises menées par le capitaine Jensen (3).
 
A gauche, la tombe de Jensen, mort au combat, à droite celle de Lugan à Chiangmaï : 
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(3èmeRébellion : La révolte du palais en 1912 (4).

 

(4èmeRébellion : Une tentative de coup d’état en 1917 signalée par Russel (note 1 - 3) sur laquelle il n’existe que peu de sources autres que celles signalant son existence.

 

(5èmeRévolution : Celle de juin 1932 dont nous avons parlé d’abondance.

 

(6èmeCoup d’état silencieux : Celui du 1er avril 1933 qui conduisit à une féroce législation anti-communiste. Phraya Manopakorn Nititada fut le premier premier ministre de Siam après la révolution, choisi par le chef du Parti du peuple - le parti qui a incité la révolution. Il rallie ceux qui s’opposent au plan « socialiste » de Pridi y compris Phraya Songsuradet et dissout son propre cabinet pour tenter de renverser Pridi, qui bénéficiait d’un large soutien au sein du parti. Afin de retrouver une certaine stabilité et faire taire les critiques internes, il suspend quelques articles de la constitution. Pridi est contraint de fuir en France. Il approuve la loi anti-communiste ce qui lui a permis de procéder à de nombreuses arrestations : l’ensemble du comité central du Parti communiste du Siam a été arrêté et emprisonné. Conduite d’un trait de plume, cette opération peut être considérée comme un coup d’état silencieux.

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(7èmeCoup d’état : Celui du 20 juin 1933 fut mené par Phraya Pahon et d'autres dirigeants militaires. Phraya Manopakorn a été immédiatement évincé de son poste de Premier ministre. Phraya Phahon lui-même second premier ministre s’est emparé du gouvernement, le roi Pradhipok s’inclina. Manopakorn, exilé à Penang en Malaisie, y passa le reste de sa vie jusqu'à sa mort en 1948, âgé de 64 ans.

 

 

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(8èmeRébellion : La tentative « réactionnaire »  du prince Borovadej d’octobre 1933. Le prince, petit-fils du roi Mongkut et une fois ministre de la défense, réussit à mobiliser diverses garnisons provinciales et marcha sur Bangkok en investissant au passage l'aéroport de Don Muang. Le prince reprochait au gouvernement de manquer de respect au roi, de promouvoir le communisme et exigeait la démission du gouvernement. Il avait espéré en vain que certaines garnisons de la région de Bangkok se joindraient à la révolte. La marine se déclara neutre. Après de violents combats dans la banlieue nord de Bangkok, les royalistes furent vaincus et le Prince Bovoradej partit pour l'exil en Indochine.

 

(9ème) Rébellion : La rébellion des sergents (« Naisip Rebellion ») du 3 août 1935Le 3 Août 1935, des sous-officiers de différents bataillons de l'armée ont assassiné un officier dans une tentative de prise d’otage et de prise du contrôle du quartier général de département de l’armée. La rébellion prévue pour avoir lieu à 15 heures le 5 août après l'abdication du roi Prajadhipok a eu lieu plus tôt que prévu. Les chefs rebelles ont été exécutés après procès.

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(10èmeRébellion : La rébellion de  Songsuradet ou « la rébellion des 18 corps d’armée » du  29 janvier 1939. Il s’agit en réalité d’une opération conduite par Phibun.  Celui-ci avec l'aide de son ministre de l'Intérieur et du directeur de la Police, ordonna l'arrestation de 51 « suspects » » compris Rangsit, Prince de Chainat, un fils du roi Chulalongkorn), le général Phraya Thepahatsadin, ancien commandant de la Force expéditionnaire siamois au cours de la Première Guerre mondiale, et Phraya Udom Pongphensawad, ancien ministre d'État ainsi que d'anciens politiciens membres de l'Assemblée du peuple dont beaucoup étaient des militaires et des aristocrates, y compris l’un de propre serviteur de Phibun. Un tribunal spécial fut créé par Phibun pour juger les personnes impliquées dans cette « rébellion » et des tentatives d'assassinat sur sa personne. 7 ont été libérées pour manque de preuves, 25 ont été emprisonnées à vie et 21 devaient être exécutés mais 3 furent graciées en raison des services rendus à la nation, inclus le Prince-Rangsit et Thepahatsadin Phraya, emprisonnés à vie. Les autres ont été exécutés au rythme de quatre par jour.

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(11èmeCoup d’état : Le coup d’état du 1er juillet 1944 : En 1944, il était évident que les Japonais allaient perdre la guerre. Phibun devenu impopulaire fut évincé par un gouvernement « Seri Thaï ». L'Assemblée nationale désigne l'avocat libéral Khuang Abhaiwongse comme premier ministre.

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(12èmeRégicide : la mort du petit roi Ananda le 9 juin 1946. Revenu de Lausanne en décembre 1945, le jeune roi a été retrouvé mort par balles dans son lit, dans des circonstances mystérieuses. Trois serviteurs du palais ont été jugés et exécutés.

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(13èmeCoup d’état : Le coup d’état du 8 novembre 1947. Il eut lieu dans la soirée du 7 novembre 1947, se terminant dans les premières heures du 8. Il a renversé le gouvernement de l'amiral Thawan Thamrong Nawasawat, qui a été remplacé par Khuang Abhaiwongse et fut mené par le lieutenant-général Phin Chunhawan et le colonel Kat Katsongkhram

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(14èmeRébellion : La rébellion séparatiste du 28 février 1948. Des séparatistes tentèrent d'arrêter les membres du parlement dans le Nord-Est. L'action a échoué.

 

(15èmeRébellion : tentative de coup d’état du 1er octobre 1948. Il s’agit d’une tentative d’éviction du maréchal Phibun. Elle conduisit à une vaste purge dans la fonction publique et l’arrestation de nombreux sympathisants de Pridi.

 

(16èmeCoup d’état Le 9 novembre 1948, un coup d'état militaire conduit à la démission du Premier ministre Aphaiwongse et à son remplacement par Phibun.

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(17èmeRébellion : «  Palace rebellion » : vaine tentative de coup d’état du 29 juin 1949 suscitée par Pridi, qui désespérait de prendre le pouvoir par des moyens « démocratiques ».

 

(18èmeRébellion : « L’affaire du Manathan » du 29 juin 1951 : Nous reviendrons dans un prochain article sur ce coup d’état manqué de la marine thaïe au cours duquel le Maréchal Phibun échappa miraculeusement à la mort. Le cours de l’histoire de la Thaïlande en eut été changé.

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(19èmeCoup d’état : « Radio coup » du 29 novembre 1951, une suite et une fin à la tentative du mois de juin. Il consolide l'emprise de l'armée sur le pays, rétablit la Constitution 1932, élimine le Sénat, et établit un législatif monocaméral composé paritairement de membres élus et nommés par le gouvernement, de nombreux militaires reçoivent des portefeuilles ministériels importants.

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(20ème) Rébellion : Tentative de coup d’état du 8 novembre 1954. C’est une tentative de Kulap, créateur de la « Fondation pour la paix en Thaïlande ». Il proteste contre la guerre de Corée, exige la levée de la censure de la presse et part distribuer des vivres et des couvertures aux nécessiteux dans le nord de la Thaïlande. Accusé de trahison et condamné à 14 ans de prison, il a été libéré en février 1957 pour célébrer l'avènement du 25ème siècle du bouddhisme.

 

(21èmeCoup d’état : Celui du 16 septembre 1957 du Maréchal Sarit. Il est de toute évidence le fruit de manœuvres souterraines américaines.

 

 

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(22èmeCoup d’état : celui du 20 octobre 1958, du même. Il ne fait que renforcer son pouvoir.

 

(23èmeRébellion : Début de l’insurrection communiste en 1964.

 

 

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(24èmeRébellion : rébellion Hmong dans le nord-ouest sur laquelle les renseignements sont inexistants.

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(25èmeCoup d’état silencieux : Celui du 17 novembre 1971. Thanom effectuée un coup d'état contre son propre gouvernement, mettant ainsi fin à l'expérience de trois ans de démocratie parlementaire. La constitution a été suspendue, les partis politiques ont été interdits, et les militaires ont été chargés de réprimer l'opposition.

 

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(26èmeSoulèvement populaire : le premier est du 14 octobre 1973, ce sont les étudiants qui sont descendus par milliers dans la rue. Il constitue un tournant dans l'histoire de la Thaïlande. Il a entraîné la fin de la dictature militaire et modifié le système politique thaïlandais, mettant en évidence l'influence croissante des étudiants et des universitaires en politique. Le 6 Octobre, Thirayuth Boonmee et dix autres militants politiques ont été arrêtés pour avoir distribué des tracts dans les endroits les plus fréquentés de Bangkok. D'autres arrestations conduisent à des manifestations étudiantes qui culminent les jours suivants jusqu'à une émeute impliquant environ 400.000 à 500.000 personnes dans des affrontements armés avec la police. En fin de matinée, le 14 Octobre, il y eut des actes de vandalisme et de violence de la part des deux parties en dehors de tout contrôle. Le gouvernement envoie alors des chars, des hélicoptères et des fantassins pour soutenir la police. Plus d'une centaine étudiants ont été tués et de nombreux bâtiments dans et autour de Rajdamnern Avenue ont été incendiés. Le nombre de manifestants a rapidement grandi jusqu’à plus de 500 000. Les soldats se sont finalement retiré dans la soirée, et aux environ de  19 h. 15 Sa Majesté le Roi a annoncé à la télévision et à la radio que le gouvernement militaire de Thanom avait démissionné. La violence a toutefois continué le 15 Octobre autour du siège de la police, les étudiants demandant que Thanom soit également évincé de son poste de chef des forces armées. Quand il a été annoncé que Thanom et sa famille avaient quitté le pays, le calme revint aussi rapidement que la violence avait commencé.

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(27èmeCoup d’état silencieux : celui de  1976, qui conduisit au suivant. Les élections de janvier 1975 n’avaient dégagé aucune majorité stable et pas plus celles d’avril 1976. Les vétéran de la politique, Seni Pramoj et son frère Kukrit Pramoj alternaient au pouvoir, incapables de mener à bien un programme de réforme cohérent. Compte tenu de démarches souterraines, les Thaïs considèrent ces épisodes de démissions successives comme un « coup d’état silencieux » (Note 1-2).

 

(28èmeCoup d’état : Le massacre du 6 octobre 1976 : Le 6, des étudiants prenaient part à un « sit-in » et sont attaqués par le police. Des centaines d'entre eux ont été torturés et tués, la constitution a été suspendue et l'armée a pris le pouvoir. Sanctionné par le Roi, le coup d’état a été mené conduit par l'amiral Sangard Chaloryu, commandant suprême des forces armées récemment retraité. Une junte militaire a pris le contrôle du gouvernement, déclaré la loi martiale, annulé la constitution, interdit les partis politiques, et strictement censuré les médias.

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(29èmeRébellion Coup d’état manqué du 26 mars 1977. Le 26 Mars 1977 un groupe de jeunes officiers de l'armée qui se sont baptisés « les jeunes Turcs » tentèrent de renverser le gouvernement. Appartenant à la 9ème division d'infanterie dans la province de Kanchanaburi, ils occupèrent des bâtiments historiques, y compris le Centre des opérations de l'armée et le Bureau des relations publiques de l'armée. La rébellion a été rapidement maitrisée.

 

 

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(30èmeCoup d’état : Le 20 Octobre 1977, l’amiral Sangad Chaloryu s’empare à nouveau du pouvoir et presse Thanin à la démission. Le commandement militaire reprochait à Thanin d’avoir divisé le pays, de ne pas avoir de soutien populaire, une situation économique catastrophique et la suspension à long terme de la démocratie. Le roi Bhumibol a immédiatement nommé Thanin à son Conseil privé. L'armée installe un ancien juge ultra-conservateur comme premier ministre, et effectue une purge radicale dans les universités, les médias et la fonction publique. Des milliers d'étudiants, d'intellectuels et d’autres qualifiés de « gauchistes » fuient Bangkok et rejoignent les forces rebelles du Parti communiste dans le nord et nord-est.

 

(31èmeCoup d’état silencieux : Celui de 1980. Kriangsak démissionne en février 1980 et est remplacé par le général Prem Tinsulanonda. Bien que ce départ ait été qualifié de volontaire, on peut penser que la « pression militaire » a forcé le premier ministre dans un « coup d'état silencieux ». Prem a pris le pouvoir et le gardera pendant 8 ans.

 

(32èmeRébellion : La tentative des « jeunes turcs » (militaires) du 1er avril 1981. En avril 1981, une équipe de jeunes officiers connus comme « les jeunes Turcs » ont organisé une tentative de putsch, prenant le contrôle de Bangkok. Ils déclarent l’Assemblée nationale dissoute et promettent des changements sociaux. Mais leur position s’effondre rapidement lorsque Prem se réfugie avec la famille royale à Nakhon Ratchasima. Le roi soutient Prem, les unités loyalistes dirigées par le général Arthit Kamlang-ek réussissent à reprendre la capitale dans une contre-attaque et ce, sans presque d’effusion de sang.

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(33èmeRébellion : Coup d’état manqué du 9 septembre 1985, une nouvelle tentative des « jeunes Turcs » à l’encontre du gouvernement du général Prem, profitant de ce qu’il était alors à l'étranger. Dirigée par Manoon et son frère il est soutenu par l'ancien premier ministre Kriangsak Chomanan, l’ancien commandant suprême des forces armées, le général Serm Na Nakhon, l’ancien chef des armées, le général Yos Thephasdin, l’ancien chef de la force aérienne, le maréchal Krasae Satharat et un autre ancien chef de la force aérienne, le maréchal Arum Promthep. Le coup d'état débute avant l'aube, plusieurs centaines d'hommes et vingt-deux chars. Vers 10 heures, les troupes gouvernementales dirigées par le général Chaovalit Yongchaiyuth ont réprimé la rébellion dans le sang. Plus de 40 officiers militaires actifs ou retraités ont été arrêtés. Le financement de cette opération avortée reste mystérieux.

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(34èmeCoup d’état : Le 23 février 1991, Suchinda renverse le gouvernement élu du premier ministre Chatichai Choonhavan et installe un ancien diplomate Anand Panyarachun comme Premier ministre.

 

(35èmesoulèvement populaire : Le 17 mai 1992 « the black may  », noyé dans le sang et terminé par l’intervention royale. Ce jour-là se déroule à Bangkok une manifestation de protestation contre le gouvernement du général Suchinda Kraprayoon qui sera suivie par une répression militaire sanglante. Jusqu'à 200.000 personnes manifestent dans le centre de la capitale. La répression qui suit a entraîné 52 décès officiellement confirmés, de nombreuses disparitions, des centaines de blessés, et plus de 3500 arrestations. Beaucoup des personnes arrêtées auraient été torturées. Dès le début l'après-midi du 18 mai, Suchinda accuse Chamlong, leader des « jeunes Turcs » de fomenter ces violences et interdit l'utilisation de la force. Peu de temps après, les troupes entourent Chamlong. Il est menotté et arrêté. Après une intervention royale de la populaire princesse Sirindhorn et de son frère, le prince héritier Vajiralongkorn, le roi lui-même appele Suchinda et Chamlong à une rencontre dans laquelle il exige que les deux hommes mettent un terme à leur confrontation et travaillent ensemble au travers des procédures parlementaires. Suchinda fait relâcher Chamlong et annonce une amnistie pour les manifestants. Chamlong demande alors aux manifestants de se disperser, ce qu'ils font. Le 24 mai 1992, Suchinda démissionne comme premier ministre.

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(36èmeCoup d’état : celui du 19 septembre 2006 chasse Thaksin. L’armée royale organise un coup d'état contre le gouvernement de transition élu du premier ministre Thaksin Shinawat. Ce coup d'Etat, premier changement non constitutionnel du gouvernement depuis quinze ans, sera suivi d'une crise impliquant Thaksin, ses alliés et les opposants politiques et a eu lieu moins d'un mois avant les élections de la Chambre à l'échelle nationale. Les Thaïs murmurent que le général Prem Tinsulanonda, président du Conseil privé, en était le cerveau. L'armée annule les élections à venir, abroge la Constitution, dissous le Parlement et la Cour constitutionnelle, interdit les manifestations et toutes les activités politiques, censure les médias, déclare la loi martiale dans tout le pays, et arrête des membres du Cabinet. Accueilli au moins à Bangkok et dans le sud dans la liesse, on peut considérer cette opération comme une manifestation populaire. A vous de choisir.

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(37èmeCoup d’état judiciaire : Le 9 septembre 2008, la Cour constitutionnelle déclare démissionnaire d'office le Premier ministre Samak Sundaravej.  Somchai Wongsawat lui succède donc par intérim avant d'être élu à la tête du gouvernement le 17 septembre par le Parlement.

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(38èmeCoup d’état judiciaire : Le 2 décembre suivant, la même Cour prononce la destitution de Somchai et son inéligibilité pendant 5 ans ainsi que la dissolution de son parti. Il est remplacé au poste de Premier ministre intérimaire par Chaovarat Chanweerakul.

 

(39èmeCoup d’état judiciaire : celui du 15 décembre 2008. Ce jour-là, Abhisit Vejjajiva, un « Etonien » de 44 ans, devient premier ministre après que le chef de l'armée, le général Anupong Paochinda, ait « encouragé » sinon contraint les députés à le soutenir. Par ailleurs, Gen Anupong, responsable de la sécurité de l'aéroport, ne fait rien pour arrêter les manifestants anti-Thaksin, qui avaient envahi les aéroports de Bangkok, bloquant 350.000 voyageurs. Un tribunal finit alors par dissoudre le parti au pouvoir et l'ancienne opposition avec l'approbation très publique de Gen Anupong. Les partisans de Thaksin, dans son groupe appelé l' « Alliance démocratique contre la dictature » alias « chemises rouges », parlent alors de « coup d'état silencieux » contre le gouvernement élu.

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0(40èmeCoup d’état silencieux : le « mois de mai sauvage ». Le 3 mai 2010, Abhisit propose de dissoudre le parlement en septembre et d’organiser des élections le 14 Novembre si les manifestants « chemises rouges » qui ont envahi Bangkok se retirent. Les dirigeants des « chemises rouges » font connaître leur accord de principe mais souhaitent obtenir plus d'informations. Dans la matinée du 8 mai, deux policiers sont tués et plusieurs passants blessés dans une fusillade près du quartier financier de Silom. Le leader des « chemises rouges », Weng Tojirakarn nie toute implication. Les manifestants exigent alors l’arrestation du vice-premier ministre comme responsable de la mort de 25 manifestants lorsque les troupes ont été confrontées aux manifestations le 10 Avril. Les manifestants refusent de mettre fin au mouvement et le 13 mai, l'offre d'une élection est retirée.

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(41èmeCoup d’état judiciaire : celui du 7 mai 2014. Ce jour–là la Cour constitutionnelle destitue à l’unanimité Yingluck Shinawat, sœur de Thaksin et certains ministres sur des questions qui restent controversées. Coup d’état ou stricte application de la Loi ? A vous de choisir.

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(42èmeCoup d’état : celui du 20 mai 2014, seconde étape et suite logique du précédent : Ce jour-là, l'armée déclare la loi martiale dans tout le pays et établit un commandement militaire pour « résoudre les situations ». Deux jours plus tard, elle organise un coup d'état contre le gouvernement intérimaire.

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Nous écrivons le 14 janvier 2016 et en resterons là. Du premier janvier 1901 au 14 janvier 2016 nous pouvons donc compter une moyenne approximative d’un « coup » tous les 1.000 jours.

 

 

214 – COMBIEN DE COUPS D’ÉTAT, DE RÉBELLIONS, DE RÉVOLTES ET DE SOULÈVEMENTS  EN THAÏLANDE DEPUIS LE DÉBUT DU SIÈCLE DERNIER ?

Cette liste est-celle exhaustive ? Probablement pas. Le mouvement communiste dont nous avons parlé ne fut en réalité pas monolithique, qu’il se situe dans le grand sud ou dans le nord-est, sous influence chinoise dans le sud, sous influence Viet et Lao dans le nord.

 

Nous avons hésité à citer un complot qui aurait été le 20ème s’il ne planait des doutes sur sa réalité ? Est-il issu de l’imagination du chef de la police ou est-ce une manœuvre policière dont le lieutenant général Phao Sriyanond (เผ่าศรียานนท์) serait à l’origine, ou s’agit-il d’une opération d’ensemble de déstabilisation de l’Asie du sud-est concoctée par le Kominform et déjà largement entamée au Laos, en Indochine et en Birmanie ? Staline ou Phao ? Le titre du Bangkok post est-il significatif « Les rouges complotaient pour évincer le roi, dit Phao » 

214 – COMBIEN DE COUPS D’ÉTAT, DE RÉBELLIONS, DE RÉVOLTES ET DE SOULÈVEMENTS  EN THAÏLANDE DEPUIS LE DÉBUT DU SIÈCLE DERNIER ?

et cet autre non moins : « Phao prétend que Pridi est derrière le complot. 

214 – COMBIEN DE COUPS D’ÉTAT, DE RÉBELLIONS, DE RÉVOLTES ET DE SOULÈVEMENTS  EN THAÏLANDE DEPUIS LE DÉBUT DU SIÈCLE DERNIER ?

Toujours est-il qu’au motif ou au prétexte de ce complot qui devait éclater le 31 décembre, la police procède le 10 novembre 1952 à de nombreuses arrestations. Quelques jours plus tard intervient une féroce législation anti-communiste et un mois plus tard on apprend que la police a (ou aurait pour le premier) assassiné Tiang Sirikhan (เตียง ศิริขันธ์), député de Sakon Nakon (สกลนคร) (Sahachip Party - พรรคสห ชีพ) - Chan Bunnag (ชาญ บุนนาค)  - Lek Bunnag (เล็ก บุนนาค) - Phong Khiewwijit (ผ่อง เขียว วิจิตร) - Sanga Prajakwong (สง่า ประจักษ์ วงศ์). Toujours est-il que lors de la tenue du XIXème congrès du parti communiste de l’Union soviétique le parti communiste thaï avait envoyé un message de félicitations ce qui avait irrité Phibun. Opération de provocation de Phao ...

214 – COMBIEN DE COUPS D’ÉTAT, DE RÉBELLIONS, DE RÉVOLTES ET DE SOULÈVEMENTS  EN THAÏLANDE DEPUIS LE DÉBUT DU SIÈCLE DERNIER ?

... ou opération Stalinienne, les deux hypothèses sont possibles ?

 

Il en est de même des mouvements centrifuges du nord-est, animés par des élus ou communistes ou cryptocommunistes ou sympathisants, sur lesquels les renseignements n’abondent pas et moins encore. Nous avons cité le cas de Tiang Sirikhan, le « héros » de Sakonnakhon pour certains, un terroriste pour les Français qui a probablement terminé sa carrière dans les maquis communistes anti-français du nord du Laos et dont on peut penser qu’il rêvait d’un rattachement de partie des provinces Isan au Laos communiste (6).

214 – COMBIEN DE COUPS D’ÉTAT, DE RÉBELLIONS, DE RÉVOLTES ET DE SOULÈVEMENTS  EN THAÏLANDE DEPUIS LE DÉBUT DU SIÈCLE DERNIER ?

Il faudrait également consacrer une étude spéciale aux mouvements « centrifuges » du sud-musulman, ouvertement sécessionnistes, rébellion contre l’oppression du pouvoir central pour ses participants, opérations de vulgaire banditisme pour les gouvernements de Bangkok toujours sur ce point d’accord entre eux.

 

Citons aussi une nouvelle donnée venue animer ce débat : les « menaces séparatistes » de la région du nord sous forme d’un supposé appel à créer une « République de Lanna » à Chiang Mai. Provocation, manifestation folklorique ou réelle campagne partisane ? Cette annonce a réussi à créer une véritable polémique, poussant les chefs militaires à multiplier les interventions publiques pour condamner cet appel et « toute atteinte à l’intégrité territoriale du royaume ». Même l’ex-chef du gouvernement elle-même, Yingluck Shinawat (née à Chiang Mai), s’est sentie obligée de réagir, indiquant que « le gouvernement ne soutient pas les mouvements séparatistes, le pays doit rester un et indivisible »

 

 

 

214 – COMBIEN DE COUPS D’ÉTAT, DE RÉBELLIONS, DE RÉVOLTES ET DE SOULÈVEMENTS  EN THAÏLANDE DEPUIS LE DÉBUT DU SIÈCLE DERNIER ?

NOTES

 

(1)

1-1 - « Counting Thailand’s coups » par Nicholas Farrelly, incomplet puisqu’il commence en 1912 et se termine en 2006, in : http://asiapacific.anu.edu.au/newmandala/2011/03/08/counting-thailands-coups/

 

1-2 - ประวัติการปฏิวัติรัฐประหารและกบฎ ในประเทศไทย (« Histoire des coups d’état et des rebellions en Thaïlande » qui ne commence qu’en 1932, anonyme, en thaï, in :

http://www.iseehistory.com/index.php?lay=show&ac=article&Id=5329067&Ntype=9

Il commence en 1932 et se termine en 1991 après analyse de 23 « opérations ».

 

1-3 - « Coups, Rebellions and Uprisings in Thailand Since 1902 » par Adam Russel, mai 2014, avec de très nombreuses références in :

http://www.arussell.com/2014/05/22/coups-rebellions-and-uprisings-in-thailand-since-1902/

 

(2) Voir notre article 140 « La résistance à la réforme administrative du roi Chulalongkorn – la révolte des saints »

 

(3) Voir le bel article de David Hary « A supreme sacrifice which brought lasting freedom » in http://www.chiangmai-online.com/gmcm/10-2002/jensen.html

 

(4) Voir notre article A 86 « Le coup d’état manqué de 1912 ».

 

(5) Voir notre article A 175 « Jean-Michel Krivine - carnets de mission dans les maquis thaïlandais ».

 

(6) Voir notre article 203 « Tiang Sirikhan – le guerrier de Phupan ». Ce sont les archives déclassées de la CIA qui nous ont permis de penser qu’il n’avait pas été assassiné par la police du maréchal Phibun mais probablement mort dans les maquis anti-français au Laos.

214 – COMBIEN DE COUPS D’ÉTAT, DE RÉBELLIONS, DE RÉVOLTES ET DE SOULÈVEMENTS  EN THAÏLANDE DEPUIS LE DÉBUT DU SIÈCLE DERNIER ?

Citons le cas heureusement unique dans l’histoire de la Thaïlande contemporaine du régicide qui fut pourtant dans les siècles antérieurs une procédure sinon normale du moins habituelle de la transmission du pouvoir.

 

Les tentatives séparatistes lorsqu’elles échouent (ce qui fut le cas en Thaïlande au cours de cette période) deviennent selon le côté où l’on se place des actes de résistance ou des trahisons. Il n’y a pas loin du terroriste au résistant.

 

Certains de ces « événements » pourront évidemment et selon les sensibilités être considérés comme n’étant pas un « coup d’état » au sens large.

 

***

Commençons - donc notre inventaire « à la Prévert », le vingtième siècle a commencé le 1er janvier 1901, c’est également l’année d’un premier mouvement de protestation.

 

1erRébellion : La « révolte des saints », en réalité une rébellion selon notre terminologie, mouvement de résistance aux réformes administratives du roi Chulalongkorn commencé en 1901. Nous en avons parlé d’abondance (2). Elle est curieusement oubliée de Russel (note 1-3)

 

(2d) Rébellion : La « Rébellion des Mongs » en 1902 : C’est une rébellion des populations Shans qui éclate à Phrae en juillet 1902 avec peut-être une action occulte des responsables français qui jouèrent un rôle assez trouble via le consul de Nan, Lugan,  hostiles aux tentatives du monarque d’asseoir son emprise administrative dans le nord-ouest. Elle a été noyée dans le sang en 1904 avec l’aide de troupes danoises menées par le capitaine Jensen (3).

 

(3èmeRébellion : La révolte du palais en 1912 (4).

 

(4èmeRébellion : Une tentative de coup d’état en 1917 signalée par Russel (note 1 - 3) sur laquelle il n’existe que peu de sources autres que celles signalant son existence.

 

(5èmeRévolution : Celle de juin 1932 dont nous avons parlé d’abondance.

 

(6èmeCoup d’état silencieux : Celui du 1er avril 1933 qui conduisit à une féroce législation anti-communiste. Phraya Manopakorn Nititada fut le premier premier ministre de Siam après la révolution, choisi par le chef du Parti du peuple - le parti qui a incité la révolution. Il rallie ceux qui s’opposent au plan « socialiste » de Pridi y compris Phraya Songsuradet et dissout son propre cabinet pour tenter de renverser Pridi, qui bénéficiait d’un large soutien au sein du parti. Afin de retrouver une certaine stabilité et faire taire les critiques internes, il suspend quelques articles de la constitution. Pridi est contraint de fuir en France. Il approuve la loi anti-communiste ce qui lui a permis de procéder à de nombreuses arrestations : l’ensemble du comité central du Parti communiste du Siam a été arrêté et emprisonné. Conduite d’un trait de plume, cette opération peut être considérée comme un coup d’état silencieux.

 

(7èmeCoup d’état : Celui du 20 juin 1933 fut mené par Phraya Pahon et d'autres dirigeants militaires. Phraya Manopakorn a été immédiatement évincé de son poste de Premier ministre. Phraya Phahon lui-même second premier ministre s’est emparé du gouvernement, le roi Pradhipok s’inclina. Manopakorn, exilé à Penang en Malaisie, y passa le reste de sa vie jusqu'à sa mort en 1948, âgé de 64 ans.

 

(8èmeRébellion : La tentative « réactionnaire »  du prince Borovadej d’octobre 1933. Le prince, petit-fils du roi Mongkut et une fois ministre de la défense, réussit à mobiliser diverses garnisons provinciales et marcha sur Bangkok en investissant au passage l'aéroport de Don Muang. Le prince reprochait au gouvernement de manquer de respect au roi, de promouvoir le communisme et exigeait la démission du gouvernement. Il avait espéré en vain que certaines garnisons de la région de Bangkok se joindraient à la révolte. La marine se déclara neutre. Après de violents combats dans la banlieue nord de Bangkok, les royalistes furent vaincus et le Prince Bovoradej partit pour l'exil en Indochine.

 

(9ème) Rébellion : La rébellion des sergents (« Naisip Rebellion ») du 3 août 1935Le 3 Août 1935, des sous-officiers de différents bataillons de l'armée ont assassiné un officier dans une tentative de prise d’otage et de prise du contrôle du quartier général de département de l’armée. La rébellion prévue pour avoir lieu à 15 heures le 5 août après l'abdication du roi Prajadhipok a eu lieu plus tôt que prévu. Les chefs rebelles ont été exécutés après procès.

 

(10èmeRébellion : La rébellion de  Songsuradet ou « la rébellion des 18 corps d’armée » du  29 janvier 1939. Il s’agit en réalité d’une opération conduite par Phibun.  Celui-ci avec l'aide de son ministre de l'Intérieur et du directeur de la Police, ordonna l'arrestation de 51 « suspects » » compris Rangsit, Prince de Chainat, un fils du roi Chulalongkorn), le général Phraya Thepahatsadin, ancien commandant de la Force expéditionnaire siamois au cours de la Première Guerre mondiale, et Phraya Udom Pongphensawad, ancien ministre d'État ainsi que d'anciens politiciens membres de l'Assemblée du peuple dont beaucoup étaient des militaires et des aristocrates, y compris l’un de propre serviteur de Phibun. Un tribunal spécial fut créé par Phibun pour juger les personnes impliquées dans cette « rébellion » et des tentatives d'assassinat sur sa personne. 7 ont été libérées pour manque de preuves, 25 ont été emprisonnées à vie et 21 devaient être exécutés mais 3 furent graciées en raison des services rendus à la nation, inclus le Prince-Rangsit et Thepahatsadin Phraya, emprisonnés à vie. Les autres ont été exécutés au rythme de quatre par jour.

 

(11èmeCoup d’état : Le coup d’état du 1er juillet 1944 : En 1944, il était évident que les Japonais allaient perdre la guerre. Phibun devenu impopulaire fut évincé par un gouvernement « Seri Thaï ». L'Assemblée nationale désigne l'avocat libéral Khuang Abhaiwongse comme premier ministre.

 

(12èmeRégicide : la mort du petit roi Ananda le 9 juin 1946. Revenu de Lausanne en décembre 1945, le jeune roi a été retrouvé mort par balles dans son lit, dans des circonstances mystérieuses. Trois serviteurs du palais ont été jugés et exécutés.

 

(13èmeCoup d’état : Le coup d’état du 8 novembre 1947. Il eut lieu dans la soirée du 7 novembre 1947, se terminant dans les premières heures du 8. Il a renversé le gouvernement de l'amiral Thawan Thamrong Nawasawat, qui a été remplacé par Khuang Abhaiwongse et fut mené par le lieutenant-général Phin Chunhawan et le colonel Kat Katsongkhram

 

(14èmeRébellion : La rébellion séparatiste du 28 février 1948. Des séparatistes tentèrent d'arrêter les membres du parlement dans le Nord-Est. L'action a échoué.

 

(15èmeRébellion : tentative de coup d’état du 1er octobre 1948. Il s’agit d’une tentative d’éviction du maréchal Phibun. Elle conduisit à une vaste purge dans la fonction publique et l’arrestation de nombreux sympathisants de Pridi.

 

(16èmeCoup d’état Le 9 novembre 1948, un coup d'état militaire conduit à la démission du Premier ministre Aphaiwongse et à son remplacement par Phibun.

 

(17èmeRébellion : «  Palace rebellion » : vaine tentative de coup d’état du 29 juin 1949 suscitée par Pridi, qui désespérait de prendre le pouvoir par des moyens « démocratiques ».

 

(18èmeRébellion : « L’affaire du Manathan » du 29 juin 1951 : Nous reviendrons dans un prochain article sur ce coup d’état manqué de la marine thaïe au cours duquel le Maréchal Phibun échappa miraculeusement à la mort. Le cours de l’histoire de la Thaïlande en eut été changé.

 

(19èmeCoup d’état : « Radio coup » du 29 novembre 1951, une suite et une fin à la tentative du mois de juin. Il consolide l'emprise de l'armée sur le pays, rétablit la Constitution 1932, élimine le Sénat, et établit un législatif monocaméral composé paritairement de membres élus et nommés par le gouvernement, de nombreux militaires reçoivent des portefeuilles ministériels importants.

 

(20ème) Rébellion : Tentative de coup d’état du 8 novembre 1954. C’est une tentative de Kulap, créateur de la « Fondation pour la paix en Thaïlande ». Il proteste contre la guerre de Corée, exige la levée de la censure de la presse et part distribuer des vivres et des couvertures aux nécessiteux dans le nord de la Thaïlande. Accusé de trahison et condamné à 14 ans de prison, il a été libéré en février 1957 pour célébrer l'avènement du 25ème siècle du bouddhisme.

 

(21èmeCoup d’état : Celui du 16 septembre 1957 du Maréchal Sarit. Il est de toute évidence le fruit de manœuvres souterraines américaines.

 

(22èmeCoup d’état : celui du 20 octobre 1958, du même. Il ne fait que renforcer son pouvoir.

 

(23èmeRébellion : Début de l’insurrection communiste en 1964.

 

(24èmeRébellion : rébellion Hmong dans le nord-ouest sur laquelle les renseignements sont inexistants.

 

(25èmeCoup d’état silencieux : Celui du 17 novembre 1971. Thanom effectuée un coup d'état contre son propre gouvernement, mettant ainsi fin à l'expérience de trois ans de démocratie parlementaire. La constitution a été suspendue, les partis politiques ont été interdits, et les militaires ont été chargés de réprimer l'opposition.

 

(26èmeSoulèvement populaire : le premier est du 14 octobre 1973, ce sont les étudiants qui sont descendus par milliers dans la rue. Il constitue un tournant dans l'histoire de la Thaïlande. Il a entraîné la fin de la dictature militaire et modifié le système politique thaïlandais, mettant en évidence l'influence croissante des étudiants et des universitaires en politique. Le 6 Octobre, Thirayuth Boonmee et dix autres militants politiques ont été arrêtés pour avoir distribué des tracts dans les endroits les plus fréquentés de Bangkok. D'autres arrestations conduisent à des manifestations étudiantes qui culminent les jours suivants jusqu'à une émeute impliquant environ 400.000 à 500.000 personnes dans des affrontements armés avec la police. En fin de matinée, le 14 Octobre, il y eut des actes de vandalisme et de violence de la part des deux parties en dehors de tout contrôle. Le gouvernement envoie alors des chars, des hélicoptères et des fantassins pour soutenir la police. Plus d'une centaine étudiants ont été tués et de nombreux bâtiments dans et autour de Rajdamnern Avenue ont été incendiés. Le nombre de manifestants a rapidement grandi jusqu’à plus de 500 000. Les soldats se sont finalement retiré dans la soirée, et aux environ de  19 h. 15 Sa Majesté le Roi a annoncé à la télévision et à la radio que le gouvernement militaire de Thanom avait démissionné. La violence a toutefois continué le 15 Octobre autour du siège de la police, les étudiants demandant que Thanom soit également évincé de son poste de chef des forces armées. Quand il a été annoncé que Thanom et sa famille avaient quitté le pays, le calme revint aussi rapidement que la violence avait commencé.
 

(27èmeCoup d’état silencieux : celui de  1976, qui conduisit au suivant. Les élections de janvier 1975 n’avaient dégagé aucune majorité stable et pas plus celles d’avril 1976. Les vétéran de la politique, Seni Pramoj et son frère Kukrit Pramoj alternaient au pouvoir, incapables de mener à bien un programme de réforme cohérent. Compte tenu de démarches souterraines, les Thaïs considèrent ces épisodes de démissions successives comme un « coup d’état silencieux » (Note 1-2).

 

(28èmeCoup d’état : Le massacre du 6 octobre 1976 : Le 6, des étudiants prenaient part à un « sit-in » et sont attaqués par le police. Des centaines d'entre eux ont été torturés et tués, la constitution a été suspendue et l'armée a pris le pouvoir. Sanctionné par le Roi, le coup d’état a été mené conduit par l'amiral Sangard Chaloryu, commandant suprême des forces armées récemment retraité. Une junte militaire a pris le contrôle du gouvernement, déclaré la loi martiale, annulé la constitution, interdit les partis politiques, et strictement censuré les médias.

 

(29èmeRébellion Coup d’état manqué du 26 mars 1977. Le 26 Mars 1977un groupe de jeunes officiers de l'armée qui se sont baptisés « les jeunes Turcs » tentèrent de renverser le gouvernement. Appartenant à la 9ème division d'infanterie dans la province de Kanchanaburi, ils occupèrent des bâtiments historiques, y compris le Centre des opérations de l'armée et le Bureau des relations publiques de l'armée. La rébellion a été rapidement maitrisée.

 

(30èmeCoup d’état : Le 20 Octobre 1977, l’amiral Sangad Chaloryu s’empare à nouveau du pouvoir et presse Thanin à la démission. Le commandement militaire reprochait à Thanin d’avoir divisé le pays, de ne pas avoir de soutien populaire, une situation économique catastrophique et la suspension à long terme de la démocratie. Le roi Bhumibol a immédiatement nommé Thanin à son Conseil privé. L'armée installe un ancien juge ultra-conservateur comme premier ministre, et effectue une purge radicale dans les universités, les médias et la fonction publique. Des milliers d'étudiants, d'intellectuels et d’autres qualifiés de « gauchistes » fuient Bangkok et rejoignent les forces rebelles du Parti communiste dans le nord et nord-est.

 

(31èmeCoup d’état silencieux : Celui de 1980. Kriangsak démissionne en février 1980 et est remplacé par le général Prem Tinsulanonda. Bien que ce départ ait été qualifié de volontaire, on peut penser que la « pression militaire » a forcé le premier ministre dans un « coup d'état silencieux ». Prem a pris le pouvoir et le gardera pendant 8 ans.

 

(32èmeRébellion : La tentative des « jeunes turcs » (militaires) du 1er avril 1981. En avril 1981, une équipe de jeunes officiers connus comme « les jeunes Turcs » ont organisé une tentative de putsch, prenant le contrôle de Bangkok. Ils déclarent l’Assemblée nationale dissoute et promettent des changements sociaux. Mais leur position s’effondre rapidement lorsque Prem se réfugie avec la famille royale à Nakhon Ratchasima. Le roi soutient Prem, les unités loyalistes dirigées par le général Arthit Kamlang-ek réussissent à reprendre la capitale dans une contre-attaque et ce, sans presque d’effusion de sang.

 

(33èmeRébellion : Coup d’état manqué du 9 septembre 1985, une nouvelle tentative des « jeunes Turcs » à l’encontre du gouvernement du général Prem, profitant de ce qu’il était alors à l'étranger. Dirigée par Manoon et son frère il est soutenu par l'ancien premier ministre Kriangsak Chomanan, l’ancien commandant suprême des forces armées, le général Serm Na Nakhon, l’ancien chef des armées, le général Yos Thephasdin, l’ancien chef de la force aérienne, le maréchal Krasae Satharat et un autre ancien chef de la force aérienne, le maréchal Arum Promthep. Le coup d'état débute avant l'aube, plusieurs centaines d'hommes et vingt-deux chars. Vers 10 heures, les troupes gouvernementales dirigées par le général Chaovalit Yongchaiyuth ont réprimé la rébellion dans le sang. Plus de 40 officiers militaires actifs ou retraités ont été arrêtés. Le financement de cette opération avortée reste mystérieux.

 

(34èmeCoup d’état : Le 23 février 1991, Suchinda renverse le gouvernement élu du premier ministre Chatichai Choonhavan et installe un ancien diplomate Anand Panyarachun comme Premier ministre.

 

(35èmesoulèvement populaire : Le 17 mai 1992 « the black may », noyé dans le sang et terminé par l’intervention royale. Ce jour-là se déroule à Bangkok une manifestation de protestation contre le gouvernement du général Suchinda Kraprayoon qui sera suivie par une répression militaire sanglante. Jusqu'à 200.000 personnes manifestent dans le centre de la capitale. La répression qui suit a entraîné 52 décès officiellement confirmés, de nombreuses disparitions, des centaines de blessés, et plus de 3500 arrestations. Beaucoup des personnes arrêtées auraient été torturées. Dès le début l'après-midi du 18 mai, Suchinda accuse Chamlong, leader des « jeunes Turcs » de fomenter ces violences et interdit l'utilisation de la force. Peu de temps après, les troupes entourent Chamlong. Il est menotté et arrêté. Après une intervention royale de la populaire princesse Sirindhorn et de son frère, le prince héritier Vajiralongkorn, le roi lui-même appele Suchinda et Chamlong à une rencontre dans laquelle il exige que les deux hommes mettent un terme à leur confrontation et travaillent ensemble au travers des procédures parlementaires. Suchinda fait relâcher Chamlong et annonce une amnistie pour les manifestants. Chamlong demande alors aux manifestants de se disperser, ce qu'ils font. Le 24 mai 1992, Suchinda démissionne comme premier ministre.

 

(36èmeCoup d’état : celui du 19 septembre 2006 chasse Thaksin. L’armée royale organise un coup d'état contre le gouvernement de transition élu du premier ministre Thaksin Shinawat. Ce coup d'Etat, premier changement non constitutionnel du gouvernement depuis quinze ans, sera suivi d'une crise impliquant Thaksin, ses alliés et les opposants politiques et a eu lieu moins d'un mois avant les élections de la Chambre à l'échelle nationale. Les Thaïs murmurent que le général Prem Tinsulanonda, président du Conseil privé, en était le cerveau. L'armée annule les élections à venir, abroge la Constitution, dissous le Parlement et la Cour constitutionnelle, interdit les manifestations et toutes les activités politiques, censure les médias, déclare la loi martiale dans tout le pays, et arrête des membres du Cabinet. Accueilli au moins à Bangkok et dans le sud dans la liesse, on peut considérer cette opération comme une manifestation populaire. A vous de choisir.

 

(37èmeCoup d’état judiciaire : Le 9 septembre 2008, la Cour constitutionnelle déclare démissionnaire d'office le Premier ministre Samak Sundaravej.  Somchai Wongsawat lui succède donc par intérim avant d'être élu à la tête du gouvernement le 17 septembre par le Parlement.

 

(38èmeCoup d’état judiciaire : Le 2 décembre suivant, la même Cour prononce la destitution de Somchai et son inéligibilité pendant 5 ans ainsi que la dissolution de son parti. Il est remplacé au poste de Premier ministre intérimaire par Chaovarat Chanweerakul.

 

(39èmeCoup d’état judiciaire : celui du 15 décembre 2008. Ce jour-là, Abhisit Vejjajiva, un « Etonien » de 44 ans, devient premier ministre après que le chef de l'armée, le général Anupong Paochinda, ait « encouragé » sinon contraint les députés à le soutenir. Par ailleurs, Gen Anupong, responsable de la sécurité de l'aéroport, ne fait rien pour arrêter les manifestants anti-Thaksin, qui avaient envahi les aéroports de Bangkok, bloquant 350.000 voyageurs. Un tribunal finit alors par dissoudre le parti au pouvoir et l'ancienne opposition avec l'approbation très publique de Gen Anupong. Les partisans de Thaksin, dans son groupe appelé l' « Alliance démocratique contre la dictature » alias « chemises rouges », parlent alors de « coup d'état silencieux » contre le gouvernement élu.

 

(40èmeCoup d’état silencieux : le « mois de mai sauvage ». Le 3 mai 2010, Abhisit propose de dissoudre le parlement en septembre et d’organiser des élections le 14 Novembre si les manifestants « chemises rouges » qui ont envahi Bangkok se retirent. Les dirigeants des « chemises rouges » font connaître leur accord de principe mais souhaitent obtenir plus d'informations. Dans la matinée du 8 mai, deux policiers sont tués et plusieurs passants blessés dans une fusillade près du quartier financier de Silom. Le leader des « chemises rouges », Weng Tojirakarn nie toute implication. Les manifestants exigent alors l’arrestation du vice-premier ministre comme responsable de la mort de 25 manifestants lorsque les troupes ont été confrontées aux manifestations le 10 Avril. Les manifestants refusent de mettre fin au mouvement et le 13 mai, l'offre d'une élection est retirée.

 

(41èmeCoup d’état judiciaire : celui du 7 mai 2014. Ce jour–là la Cour constitutionnelle destitue à l’unanimité Yingluck Shinawat, sœur de Thaksin et certains ministres sur des questions qui restent controversées. Coup d’état ou stricte application de la Loi ? A vous de choisir.

 

(42èmeCoup d’état : celui du 20 mai 2014, seconde étape et suite logique du précédent : Ce jour-là, l'armée déclare la loi martiale dans tout le pays et établit un commandement militaire pour « résoudre les situations ». Deux jours plus tard, elle organise un coup d'état contre le gouvernement intérimaire.

 

Nous écrivons le 14 janvier 2016 et en resterons là. Du premier janvier 1901 au 14 janvier 2016 nous pouvons donc compter une moyenne approximative d’un « coup » tous les 1.000 jours.

 

***

Cette liste est-celle exhaustive ? Probablement pas. Le mouvement communiste dont nous avons parlé ne fut en réalité pas monolithique, qu’il se situe dans le grand sud ou dans le nord-est, sous influence chinoise dans le sud, sous influence Viet et Lao dans le nord.

 

Il en est de même des mouvements centrifuges du nord-est, animés par des élus ou communistes ou cryptocommunistes ou sympathisants, sur lesquels les renseignements n’abondent pas et moins encore. Nous avons cité le cas de Tiang Sirikhan, le « héros » de Sakonnakhon pour certains, un terroriste pour les Français qui a probablement terminé sa carrière dans les maquis communistes anti-français du nord du Laos et dont on peut penser qu’il rêvait d’un rattachement de partie des provinces Isan au Laos communiste (6).

 

Il faudrait également consacrer une étude spéciale aux mouvements « centrifuges » du sud-musulman, ouvertement sécessionnistes, rébellion contre l’oppression du pouvoir central pour ses participants, opérations de vulgaire banditisme pour les gouvernements de Bangkok toujours sur ce point d’accord entre eux.

 

Citons aussi une nouvelle donnée venue animer ce débat : les « menaces séparatistes » de la région du nord sous forme d’un supposé appel à créer une « République de Lanna » à Chiang Mai. Provocation, manifestation folklorique ou réelle campagne partisane ? Cette annonce a réussi à créer une véritable polémique, poussant les chefs militaires à multiplier les interventions publiques pour condamner cet appel et « toute atteinte à l’intégrité territoriale du royaume ». Même l’ex-chef du gouvernement elle-même, Yingluck Shinawat (née à Chiang Mai),  s’est sentie obligée de réagir, indiquant que « le gouvernement ne soutient pas les mouvements séparatistes, le pays doit rester un et indivisible »

 

 

NOTES

 

(1)

1-1 - « Counting Thailand’s coups » par Nicholas Farrelly, incomplet puisqu’il commence en 1912 et se termine en 2006, in : http://asiapacific.anu.edu.au/newmandala/2011/03/08/counting-thailands-coups/

 

1-2 - ประวัติการปฏิวัติรัฐประหารและกบฎ ในประเทศไทย (« Histoire des coups d’état et des rebellions en Thaïlande » qui ne commence qu’en 1932, anonyme, en thaï, in :

http://www.iseehistory.com/index.php?lay=show&ac=article&Id=5329067&Ntype=9

Il commence en 1932 et se termine en 1991 après analyse de 23 « opérations ».

 

1-3 - « Coups, Rebellions and Uprisings in Thailand Since 1902 » par Adam Russel, mai 2014, avec de très nombreuses références in :

http://www.arussell.com/2014/05/22/coups-rebellions-and-uprisings-in-thailand-since-1902/

 

(2) Voir notre article 140 « La résistance à la réforme administrative du roi Chulalongkorn – la révolte des saints »

 

(3) Voir le bel article de David Hary « A supreme sacrifice which brought lasting freedom » in http://www.chiangmai-online.com/gmcm/10-2002/jensen.html

 

(4) Voir notre article A 86 « Le coup d’état manqué de 1912 ».

 

(5) Voir notre article A 175 « Jean-Michel Krivine - carnets de mission dans les maquis thaïlandais ».

 

(6) Voir notre article 203 « Tiang Sirikhan – le guerrier de Phupan ». Ce sont les archives déclassées de la CIA qui nous ont permis de penser qu’il n’avait pas été assassiné par la police du maréchal Phibun mais probablement mort dans les maquis anti-français au nord du Laos ?

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